« Univers. Trop petit pour l’immensité que toute femme noire porte en elle. Preta révolutionne et passe trop vite dans le ciel des profanes, telle une étoile filante. Salutations à Claudia Silva Ferreira et à Marielle : présentes ! », déclame Midria, invitée du 5ème épisode de la série de directs de l’Académie de littérature des rues, du site Ponte. Cette émission a été diffusée ce mercredi (17/03) par la rédactrice en chef des relations du site, Jessica Santos. L’extrait du fanzine Preta Galáctica [1] décrit le pouvoir des femmes noires – que partage la propre auteure.
La poétesse et slameuse Midria a pris goût à la littérature dès son plus jeune âge. Au lycée, elle a lu non seulement des best-sellers pour jeunes, mais aussi des classiques de la littérature, de Shakespeare à Fyodor Dostoïevski, lorsqu’elle participait à un groupe de lecture après l’école.
« Une chose dont je me rends compte aujourd’hui, c’est que les références de ce que j’ai choisi de lire, en tant qu’adolescente, tout comme ce que ce projet apportait, étaient des références majoritairement blanches et masculines », commente-t-elle.
Femme noire, périphérique et bisexuelle, Midria a commencé à fréquenter les saraus [2] et a rejoint le Coletivo Sarau do Vale, dans l’est de São Paulo.
« Lorsque j’avais 15 ou 16 ans et que j’ai commencé à participer au sarau de ma favela, j’ai entendu pour la première fois des écrivaines et des écrivains, des personnes en chair et en os et qui parlaient d’expériences très semblables aux miennes », dit-elle.
Dans cet espace, elle a entendu des artistes parler de l’oppression sexiste, et alors elle a vu dans la poésie une manière d’échapper aux pressions que la société lui imposait pendant l’adolescence.
Inspirée par Slam Resistência, elle a rejoint les slams en 2017, lorsqu’elle a commencé ses études en sciences sociales à l’Université de São Paulo (USP). Elle a débuté en tant que slameuse du Slam USPerifa et a participé au Championnat paulista de poésie parlée - SLAM SP, représentant le groupe ZAP ! (Zona Autônoma da Palavra), premier slam brésilien, conçu par l’artiste Roberta Estrela D’Alva.
Midria a produit plusieurs textes depuis lors et fait partie du groupe Émancipation féminine, de la série Slam de la maison d’édition Autonomia Literária. Après le fanzine Preta Galáctica, elle a lancé La petite fille née sans couleur, un recueil de ses poésies. Récemment, le livre a été publié dans une version destinée à un public d’enfants.
Le slam va bien au-delà de la compétition
L’idée du slam, également connu sous le nom de Poetry Slam, a été conçue par le poète Marc Kelly Smith, qui souhaitait que les gens se nourrissent à nouveau de poésie. Il a créé un concours de poésie à haute voix dans la ville de Chicago, aux États-Unis, dans les années 1980. Ce type d’événement s’est répandu dans le monde entier et aujourd’hui, le slam est devenu l’une des principales manifestations artistiques, émanant principalement de la périphérie.
La compétition a des règles de base : un maître de slam organise la compétition à laquelle les poètes s’inscrivent ; les juges sont recrutés de manière aléatoire parmi les membres du public, afin qu’ils soient aussi divers que possible. A chaque présentation, des poèmes d’auteur d’une durée maximale de trois minutes sont déclamés et évalués avec des notes allant de zéro à dix. Midria explique que pour la déclamation « vous ne pouvez utiliser aucun instrument de musique, ni d’objet scénique ou de costume, c’est juste vous, votre idée, vos mots et vos idées et ce que vous pouvez créer comme spectacle à partir de cela ».
« C’est un format très ouvert et il existe aujourd’hui plusieurs types de slams, comme le Slam des Mines [3], réservé aux femmes, et le Slam du Corps, qui est un slam pour les personnes sourdes », souligne-t-elle. Très active dans cet espace, Midria a été la gagnante du concours Poésie qui fait vibrer, du Slam des Mines SP. Pour elle, le slam a un rapport avec l’esthétique de la culture hip hop, et bien qu’elle soit influencée par la littérature de la périphérie, les poèmes peuvent traiter de n’importe quel sujet.
Mots de résistance
La poétesse raconte que ses poèmes sont inspirés des moments de la vie qui l’ont fortement marquée. Parmi ceux-ci, le processus de transition capillaire [4], se reconnaitre en tant que fille noire, la façon dont elle a traité les questions des cheveux féminins et la question de l’épilation.
« Dans les ateliers que j’anime ou lorsque je vais dans les écoles, je présente toujours le slam, comme un cri de voix historiquement réduites au silence, car cela permet alors de comprendre pourquoi les gens parlent si fort et au sujet de ces questions », explique-t-elle.
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Son poème La petite fille née sans couleur dépeint les problèmes raciaux présents dans sa vie des femmes noires. Midria explique que l’idée du titre est liée au fait que certaines des questions abordées font partie de sa vie familiale.
« Il y aura des espaces qui me verront plus facilement comme une Noire et d’autres où l’ambiguïté va se maintenir. Je suis née dans une famille interraciale, avec un père noir et une mère blanche. Le débat au sein de la famille n’est pas racialisé, mais lorsqu’il s’agit de parler des cheveux, des racismes subtils surgissent », dit-elle.
Midria avait l’habitude de demander à sa grand-mère de quelle couleur elle était et ne s’est reconnue comme femme noire que lorsqu’elle était au lycée, lors du processus de transition capillaire. Aujourd’hui, la poétesse continue d’aborder toutes ces questions et accompagne des écrivaines noires telles que Patrícia Meira, Mel Duarte, Luz Ribeiro et Ryane Leão.
Pour aller plus loin : "Webinaire : Slam, art engagé avec Jessica Campos" ;