Au Brésil, Marche des Marguerites 2023 revendique l’accès à la terre et la lutte contre la violence

 | Par Brasil de fato

Ce mercredi 16, à l’aube, 100 000 femmes se sont rendues au Congrès national à Brasilia, coiffées de chapeaux de paille et vêtues d’habits couleur lilas. La septième édition de la Marche des Marguerites a porté sur la place publique le débat sur le thème « Pour la reconstruction du Brésil et pour le bien-vivre ». Elle regroupe des paysannes, des femmes de communautés riveraines, de quilombolas, des autochtones et des ramasseuses de coquillages, ... Des représentantes de mouvements populaires de 33 pays participent également à cette manifestation.

Par Cristiane Sampaio et Gabriela Moncau
Traduction : Roger Guilloux pour Autres Brésils
Relecture : Felipe Kaiser Fernandes

La Marche Mondiale des Femmes France a participé à la 7ème Marche des Marguerites !

L’agricultrice Neri dos Santos est venue du campements [1] « Dom » Tomás Balduíno à Formosa (État de Goias) pour participer à cet événement, dont les activités ont débuté le mardi 15 août. "Je suis ici pour me battre pour la terre", a-t-elle déclaré, elle qui attend depuis huit ans que sa communauté soit régularisée dans le cadre de la réforme agraire.

 
"C’est difficile, mais ceux et celles qui veulent obtenir des choses doivent aller les chercher. Nous avons des enfants, des petits-enfants et nous avons besoin de terres pour survivre. On ne peut pas vivre en ville", dit-elle. Pour Neri, qui participe à l’événement depuis des années - "J’ai participé à toutes les Margarida" nous dit-elle - la fin de la violence contre les femmes - que ce soit celles de la ville, de la campagne, de la forêt ou des bords de rivières - est au cœur de leur combat.
 

Les viols, les féminicides, les choses sont très difficiles. Nous devons donc nous battre pour ne pas voir nos compagnes mourir comme c’est le cas en ce moment. Ce n’est pas facile, car en dehors des moments de travail, on peut être tuée par son compagnon

", dit-elle.

 
Selon l’annuaire de la sécurité publique brésilienne, 1.437 féminicides ont été enregistrés dans le pays en 2022, soit une augmentation de 6,1 % par rapport à l’année précédente.
 
Lire aussi Au Brésil, la violence en zone rurale flambe - Amazonia Real traduit sur l’Observatoire de la démocratie Brésilienne

Walkíria Alves s’est rendue à la Marche des marguerites depuis la ville de Cabo de Santo Agostinho (État de Pernambouc), où, selon elle, 35 % de la population vit dans les zones rurales. Le savoir-faire des travaux de la terre a été transmis de générations en générations dans sa famille. Ses grands-parents sont originaires de la zone rurale de Garanhuns, dans la région agreste du Pernambuco. Aujourd’hui, Walkíria est à la tête du Secrétariat des femmes de sa commune.

"Nous sommes ici parce que, en plus de la défense de nos racines, nous nous réapproprions la démocratie en cette période de lutte, pour être ensemble et dire que nous n’allons pas accepter moins de droits", déclare Walkíria.

Agée de 73 ans, Josefa Fernandes da Silva a voyagé pendant deux jours depuis Juripiranga (Paraiba) pour assister à sa première participation à la Marche des marguerites. "Je suis venue à cause du mépris des hommes vis-à-vis des femmes et pour la lutte pour nos droits", souligne-t-elle. "Nous sommes venues pour gagner ce que nous sommes en droit de demander et ce dont nous avons besoin. L’égalité, la paix, la démocratie, un avenir meilleur et le bien commun", dit-elle.

Un masque de tissu rouge autour du cou et un chapeau sur la tête, Josefa rappelle que "les femmes souffrent beaucoup du manque de respect des hommes et des puissants, c’est pourquoi nous nous sommes toujours regroupées …

Revendications

Organisée tous les quatre ans depuis 2000 par la Confédération Nationale des travailleurs ruraux et agriculture familiale (Contag), la Marche des marguerites se réalise cette fois-ci à Brasilia en vue d’obtenir des réponses du gouvernement à une série de revendications présentées le 21 juin dernier.

Organisé en 13 points, le cahier des revendications de la Marche de cette année a été remis lors d’un évènement auquel ont participé 13 ministres ainsi que le président de la Chambre des députés, Arthur Lira.

Parmi les thèmes les plus importants, figurent l’autonomie des femmes et la liberté de leur corps et de leur sexualité, la justice environnementale et climatique, l’autodétermination des peuples, la souveraineté alimentaire, hydrique et énergétique, la démocratisation de l’accès à la terre et la garantie des droits territoriaux et fonciers et l’accès universel à l’internet. Dans un livret de 52 pages, chacun de ces points est détaillé avec des propositions d’actions et de politiques publiques.

Ce mercredi 16, en fin de matinée, le président Lula a prononcé un discours devant les manifestantes, sur l’Esplanade des Ministères. Parmi les mesures annoncées, la priorité qui sera donnée aux femmes lors de la sélection des bénéficiaires du Plan d’urgence de réforme agraire.

Le gouvernement fédéral a également annoncé la création du Programme national en faveur des jardins potagers (qui vise à promouvoir l’autonomie économique des agricultrices) et la mise en place du Pacte national pour la prévention des féminicides.

Alors qu’elle écoutait le discours présidentiel, Fátima Costa, enseignante et petite agricultrice, a déclaré que cela valait la peine de sortir du Piauí pour participer à la mobilisation. "C’est ce que nous attendons", a-t-elle déclaré lorsqu’elle a entendu le Président dire que les femmes peuvent compter sur l’administration pour garantir des politiques en faveur du monde rural. "Parce que l’agriculture familiale a beaucoup souffert ces dernières années", a-t-elle ajouté.

"Dans ma région, par exemple, le terrain permet la construction de retenues d’eau, la pisciculture et la production de miel", dit-elle à propos des politiques publiques réclamées par les responsables locaux.

Le nom de la marche rend hommage à Margarida Maria Alves, qui présidait le syndicat des travailleurs ruraux d’Alagoa Grande, dans l’État de Paraíba et qui a été assassinée le 12 août 1983 sur ordre des propriétaires terriens de la région. Prophète, Margarida disait qu’"il vaut mieux mourir dans la lutte que mourir de faim".

Voir en ligne : Com 100 mil agricultoras em Brasília, Marcha das Margaridas cobra acesso à terra e combate à violência

[1Les campements, en portugais acampamento, sont différents des ’assentamentos’ car il est occupé par des familles agricultrices en vu d’exercer une pression pour l’expropriation du propritétaire terriens dans le cadre de la réforme agraire et la Constitution brésilienne. Les campements sont donc ’irréguliers’ car ils ne sont pas encore régularisés comme le sont les ’assentamentos’.

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