11/02/2016
Traduction : Roger GUILLOUX
Relecture : Pascale Vigier
L’association Rede de JustiçaCriminal [1] a lancé, ce mois-ci [février 2016], une nouvelle édition de l’étude « Les chiffres de la justice pénale » qui regroupe une série de faits concernant le système carcéral brésilien. Selon les données du Ministère de la Justice présentés dans ce document, 41 % d’un total de 607.731 détenus dans le système pénitencier national sont des détenus provisoires et donc qui pourraient être innocentés.
Selon cette entité qui est un regroupement d’organisations de la société civile, le système de Justice pénale, en général, applique de manière abusive des peines de prison préventive, utilisant celles-ci dans des cas non prévus par la loi ce qui conduit inutilement à une augmentation de la population carcérale.
« Nous avons diffusé cette information avec l’idée d’attirer l’attention afin d’arriver à une approche plus responsable des données du système pénal du Brésil. Toute politique publique doit être formulée sur la base de diagnostics réels et révisés périodiquement » affirme à Brasil de Fato, Janaína Homerin, secrétaire exécutive de l’association Rede de Justiça Criminal.
« La note d’information sur les données de la justice pénale qui vient d’être diffusée va contribuer au renforcement de l’ensemble des informations et statistiques sur ce système. Elle attire l’attention sur la transparence, la régularité et la fiabilité des données », affirme-t-elle.
Récemment, des membres de ce réseau ont lancé une campagne sur Internet « Presos provisórios, danos permanentes » [2] alertant sur les conséquences néfastes de l’usage abusif des prisons provisoires sur les prisonniers, leurs familles et la société en général.
Surpeuplement des prisons
Selon cette étude, plus de la moitié des personnes incarcérées dans les prisons brésiliennes pourrait, en accord avec ce que la loi permet, se trouver en régime de semi liberté ou de prison domiciliaire. « Cependant , selon un extrait de ce document, moins de 18 % de ces personnes ont été effectivement condamnées à ces régimes moins sévères. Les juges brésiliens imposent le régime carcéral, condamnation plus lourde que ce qui serait en théorie possible et sans possibilité de recours juridique ». Cette posture de l’appareil judiciaire contribuerait donc à une surpopulation des prisons.
C’est dans ce contexte que ce réseau attire l’attention sur le fait « qu’il n’existe que 164.823 places dans le système pénitentiaire brésilien pour accueillir les condamnés au régime fermé alors que 250.094 personnes privées de liberté se retrouvent dans cette catégorie ». Puisque la moitié de ces personnes pourrait bénéficier de régimes plus amènes, « le problème du déficit de places seraient surmonté au Brésil si les directives légales étaient mieux observées par nos juges ».
Les conséquences de cette préférence pour l’incarcération en régime fermé se répercutent sur les droits fondamentaux : un prisonnier a dix fois plus de risque de mourir qu’une personne liberté.
« Beaucoup de données choquantes ! En pratique, sur 10 prisonniers, 4 n’ont pas été condamnés. Nous mettons également en évidence le nombre de morts en prison, une donnée qui jusqu’à la publication du dernier Relevé national des Informations Pénitentiaires – Infopen – en juin 2015, n’était pas connue » indique Janaína.
Questions de genre
L’un des points abordés dans ce document est l’écart de traitement entre les hommes et les femmes. Selon cette association, d’une manière générale, les informations sur le système pénitentiaire sont peu transparentes, non intégrées et incomplètes. En ce qui concerne les femmes, la situation est encore bien pire.
Toujours selon ce document, les autorités disposent de moins d’informations sur la population carcérale féminine. A titre d’exemple, « pour ce qui est du temps total de d’emprisonnement des personnes condamnées, l’écart est abyssal, nous avons obtenu des informations pour 65 % des hommes et seulement pour 27 % des femmes ».
Dans ce même domaine, l’absence de détails concernant ces données, doit être signalé. « Un exemple, l’absence d’information concernant les femmes enceintes, en allaitement et les femmes en couches » est mis en évidence dans un autre passage du document.
Alternative
« On prête à l’opinion publique nombre de points de vues qui, très souvent, ne correspondent pas à la réalité mais qui se propagent en raison du manque d’information, le fameux « je crois que ... ». La prison est un mécanisme qui produit violence et destruction, exactement le contraire de ce qui conduit à une société plus juste et plus pacifique, à ce que les gens souhaitent » nous dit Janaína.
La Rede Justiça Criminal se pose donc en faveur de peines alternatives à l’incarcération afin d’améliorer le fonctionnement du système de justice pénale.
Liens vers les chiffres de la Justice pénale : “Os Números da Justiça Criminal”.