Photo : Caio Couto pour Midia NINJA
Les discussions entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay), ouvertes il y a 20 ans, pourraient aboutir cette semaine à un vaste accord de libre-échange. Dans une lettre ouverte, plus de 340 organisations appellent les présidents des institutions européennes, en amont de la réunion des ministres des affaires étrangères, à interrompre immédiatement ces négociations commerciales. En cause : la détérioration des droits humains et de la situation écologique au Brésil, depuis l’arrivée au pouvoir de Jair Bolsonaro le 1er janvier dernier.
Ces derniers mois, le gouvernement brésilien a démantelé les mesures de protection de l’environnement. Il s’est notamment attaqué aux populations indigènes en plaçant leurs terres sous la juridiction du ministère de l’Agriculture, ouvrant la voie à la déforestation par les entreprises agroalimentaires de bétail. Selon les associations environnementales, la déforestation en Amazonie aurait augmenté de 54 % en janvier 2019, par rapport à la même période en 2018. « Les attaques contre les personnes qui défendent leurs territoires ou leurs ressources naturelles sont de plus en plus fréquentes dans les zones rurales du Brésil, entraînant la mort d’un nombre croissant de dirigeants communautaires, paysans et activistes » alertent les organisations.
Utiliser un levier commercial pour mettre fin aux violations des droits humains
D’autres populations et droits fondamentaux sont également menacés par le gouvernement brésilien. « Il y a des signes inquiétants vis-à-vis de la lutte contre le sida. Les politiques de prévention doivent désormais être en accord avec les ’valeurs familiales’, ce qui pourrait exclure les personnes LGBT, les usagers de drogue, etc. », alerte ainsi François Emery, d’Act-Up. Ces « valeurs familiales » sont prônées par la nouvelle ministre de la Famille, Damares Alves, une pasteur évangélique intégriste. Act-Up, ainsi qu’une vingtaine d’organisations françaises, ont interpellé le 20 juin, à l’Assemblée nationale, les parlementaires sur « le délitement de la démocratie au Brésil » [1]. « Nos partenaires brésiliens nous demandent de les accompagner dans la résistance. Cette résistance, ils ne peuvent la mener tout seuls, la solidarité internationale, notamment de l’Europe et de la France, est nécessaire », a également lancé un représentant du Secours catholique, Luis Fernando Urrego Clavijo. L’appel à interrompre les négociations du Mercosur y a aussi été relayé.
Les États-membres constituent la principale source d’investissements étrangers directs du Brésil. En 2017, 42% des importations de bœuf de l’UE provenaient de multinationales brésiliennes. La société civile exhorte donc l’Union européenne à utiliser ce levier commercial pour mettre fin aux violations des droits humains et à la déforestation au Brésil. Comme le rappellent les organisations signataires, les États membres, liés par les traités, se sont engagés à respecter et à promouvoir les droits humains en tant qu’objectif primordial dans le cadre de leurs relations avec des pays tiers. Cecilia Malmström, commissaire chargée du commerce, a également déclaré que les nouveaux accords commerciaux de l’UE devaient assurer « un développement durable ».
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