Dans le long combat que mènent les Indiens du Brésil pour voir leurs droits reconnus, la décision de la Cour suprême du mercredi 16 août marque une victoire importante. À l’unanimité, les juges ont rejeté la demande de l’État du Mato Grosso qui réclamait une indemnisation pour les terres occupées par les tribus Nambikwara et Pareci, dans le sud-ouest du pays.
Cette décision intervient dans un contexte de plus en plus tendu pour les populations indiennes du Brésil. « Avec la fin de la dictature militaire (1964-1985) et le retour de la démocratie, la situation des Indiens au Brésil s’est améliorée, note Hervé Théry, géographe spécialiste du Brésil, professeur invité à l’université de São Paulo. Leur population a augmenté, la plupart des terres indiennes ont été attribuées de manière définitive, et les droits des peuples indigènes ont été inscrits dans la Constitution de 1988 comme une priorité. La situation s’est détériorée avec la chute de la présidente Dilma Rousseff. »
Poussée du lobby agricole
Une fois Dilma Rousseff destituée, c’est son ancien vice-président, Michel Temer, qui est devenu président. Mais l’équilibre des forces politiques a changé, au bénéfice de la bancada ruralista. « Ce terme désigne un groupe de députés dits ruralistes, qui représentent les intérêts des grands propriétaires terriens, indépendamment de leur appartenance à un parti politique », explique Hervé Théry. Impopulaire, cerné par les affaires de corruption, le président Michel Temer a été obligé de concéder bien des faveurs à ces parlementaires afin d’éviter de connaître le même sort que son mentor.
Le lobby agricole en profite donc pour mener une offensive sans précédent. « Il y avait déjà eu un épisode sous Dilma Rousseff en 2012, lorsque les grands propriétaires avaient réussi à faire réviser le Code forestier qui limitait l’étendue des terres à défricher, rappelle Hervé Théry. Mais, à présent, ils veulent remettre en question la démarcation des terres déjà attribuées aux Indiens, un principe que l’on pensait définitivement établi par la Constitution. »