Le patrimoine historique et culturel de Lençóis est fondamental pour la préservation de la mémoire, et l’événement vise à discuter littérature sous cet aspect, au-delà de la culture écrite ; de même pour la préservation de la culture orale dans laquelle sont conservées de grandes histoires essentielles à la formation de la mémoire de la région.
L’inauguration de la FliLençóis suscite une grande attente dans cette ville historique, inscrite comme patrimoine du Brésil par l’Institut national du patrimoine artistique et historique (IPHAN). Des noms importants de Bahia ont déjà confirmé leur présence à la rencontre. À la Conférence d’ouverture : des récits poétiques, esthétiques et édifiants proposeront d’imaginer d’autres mondes par la littérature ; le débat tournera autour de [3] et de Dom Obá, [4], auxquels cette édition rend hommage. La table ronde débattra aussi sur la littérature comme occasion de discuter le Brésil profond.
Brasil de Fato Bahia a interviewé la poétesse, écrivaine et professeure de Littérature de l’Université Fédérale de Bahia (UFBA), Lívia Natália, l’un des noms confirmés pour l’événement.
Brasil de Fato – Vous serez présente à la Conférence d’ouverture de la FliLençóis. Quelle est l’importance de ces Festivals Littéraires dispersés sur l’État de Bahia, en particulier, celui-ci, à Lençóis ?
Lívia Natália - Lors de chaque festival littéraire la vigueur de notre culture se réaffirme, principalement celle des cultures de chaque lieu. Nos festivals comportent non seulement des auteurs célèbres de la littérature brésilienne, mais, depuis déjà longtemps, il a été admis que les artistes locaux intègrent le festival et fassent en sorte que chacun des festivals montre autant de vitalité chaque année !
Des récits poétiques, esthétiques et édifiants : la littérature capable d’imaginer d’autres mondes”. D’après les réflexions sur ce thème de table ronde, la littérature peut-elle transformer le monde ?
Elle le peut, oui. Je crois fermement en la culture, sous une vision large, et, en la littérature, particulièrement. L’une des choses les plus belles que l’on puisse ambitionner est d’être l’auteure d’un livre pris dans une bibliothèque scolaire, ou de celles que la communauté organise dans une vente d’occasion et, soudain, une main, étrangère, t’emporte, te lit. Des millénaires après, disons, la nouvelle de cette lecture parvient au monde, décide, interfère, enrichit. Elle enrichit le monde et le monde de qui lit, avant tout !
Cette édition rend hommage à Gagum et Dom Obá. Pouvez-vous nous parler d’eux ?
J’apprends, en compagnie de qui ne connaît pas ces noms importants de Lençóis, que Gagum, écrivaine et professeure de Lençóis, a laissé un riche héritage à sa communauté, a été reconnue à titre posthume et donné, ainsi, son nom au Marché municipal de Lençóis.
Dom Obá, dont les origines ancestrales remontent à Alaafin Abiodun, a été le dernier souverain du Royaume de Oyó [5], a été un grand abolitionniste et défenseur de l’égalité raciale. Comme je l’ai dit, j’apprends, en particulier avec l’une des commissaires de ce festival, originaire de Lençóis, Samira Soares.
La littérature nous place face à de multiples possibilités de récits. Avec une caractéristique poétique très importante, la poésie est-elle votre genre littéraire préféré ? Qu’est-ce qui vous touche le plus dans la poésie ?
La poésie, pour moi, possède l’incroyable capacité de paraître traduire un sentiment, une pensée et, finalement, de maintenir grand ouvert à l’intérieur des gens un mystère, intransposable en paroles. Or cela produit son effet pour qui lit et pour qui est lu.
Água Negra et Outras Águas (non traduit) publié, à l’origine, en 2011, a été votre première publication. Qu’est-ce qui vous a décidée à publier vos poésies ?
En réalité, cela n’a pas été une décision. La poésie m’a poursuivie et gouvernée. Jusqu’à ce jour j’obéis.
En un peu plus de dix ans, aujourd’hui, depuis la publication du premier livre, vous avez déjà cinq œuvres lancées à travers le monde. Quel est votre processus créatif d’écriture ?
Rigoureux, mais pas discipliné. Je n’écris pas tous les jours, j’écris beaucoup sur du papier, c’est pourquoi je garde tous mes carnets et mes imprimés en feuilles A4 des livres. Quand je suis au plus près de boucler un livre, cela devient une pure obsession, je ne mange pas, je dors ce qui vient et j’écris et réécris. Entre un livre et un autre, j’aime oublier un peu la poésie, cependant elle insiste !
Comment le féminisme noir utilise-t’il la littérature et vice-versa ?
Pour moi, le féminisme noir a dû, pour parvenir dans la littérature, passer par les navires négriers, par les Senzalas [6], par les favelas, par les sambas de mesas et les sambas de rodas [7], vous comprenez ? À partir de là, déambulant à travers les favelas, dans les omnibus pleins, supportant l’insolence du patron, ma mère, nos mères, nos plus vieilles ont alimenté toute la famille et, aujourd’hui, on nomme cela féminisme noir. De même avec notre littérature de femmes noires, si on ne reconnaît pas celles qui nous ont précédés, on n’arrive nulle part.
Quels auteurs et auteures avez-vous lus dernièrement ? Avez-vous en tête un conseil de lecture ? Quelques livres en permanence sur votre table de nuit ?
Audre Laude [8], Conceição Evaristo [9], Lubi Prates [10]. Lorde, toujours ! En dehors de ceux-ci, des auteurs de la nouvelle génération : Gonesa Gonçalves, Patrícia Maria, Bruna Mitrano [11], il est difficile d’énumérer parce que l’oubli est toujours mauvais, une vilaine gaffe… Jorge Augusto [12], Cuti, Lande Onawale [13]Poète et compositeur né en 1965, diplômé d’Histoire par l’Université Fédérale de Bahia, il est militant du Mouvement Noir Brésilien, et responsable d’un terreiro de candomblé., je recommande leur lecture, sans limite, sans arrêt, intégrale !