Les abus commis par les policiers aggravent le climat de tension

 | Par Arthur Stabile, Ponte Jornalismo

Dans le rapport annuel établi par l’ONG Human Rights Watch (HRW) pour l’année 2018, la violence policière occupe la première place du chapitre sur le Brésil. Dans son bilan, l’organisation met en lumière les abus commis par des agents de l’État qui ne font qu’aggraver le climat de tension déjà présent dans le pays.

Traduction de Anne-Laure Bonvalot pour Autres Brésils
Relecture : Adèle Goliot

Le rapport se fonde sur des chiffres du Forum Brésilien de Sécurité Publique de 2016, année où l’on dénombre 437 décès de policiers à travers le pays. La même année, les représentants des forces de l’ordre ont provoqué la mort de 4 224 personnes, soit 26% de plus qu’en 2015.

« Le nombre incalculable d’abus commis par des policiers aggrave le climat de tension. Au Brésil, nous avons une police qui ne protège pas la société et qui la plupart du temps n’est pas protégée elle-même, en termes d’équipement notamment », analyse César Muñoz, chercheur de la HRW au Brésil, l’un des auteurs du rapport.

L’un des exemples cités est Rio de Janeiro : sa police est la plus meurtrière du pays (elle a causé cette année 1 035 morts) et la plus touchée (on dénombre en 2017 134 décès parmi ses membres). « Au moment de leur création en 2007, les Unités de Police Pacificatrices [1] connurent un franc succès, car elles permirent d’établir de nouveaux liens entre la Police Militaire et la communauté. Avec la crise des UPP, l’impunité, les abus de pourvoir, la corruption et les passages à tabac de civils sont devenus monnaie courante. Qui peut faire confiance à une police abusive ? » demande Muñoz.

L’ONG Human Rights Watch affirme qu’elle considère comme un recul la loi 44/2016, ratifiée l’an dernier par le président Michel Temer (PMDB), qui établit que le jugement des crimes perpétrés par des militaires sur des civils relève désormais du droit commun.

La Police Militaire de São Paulo s’est récemment servi de cette loi pour enquêter sur des décès dus aux agissements de la Police Militaire, empiétant ce faisant sur le domaine de compétences de la Police Civile. Cette possible brèche légale est source de frictions entre les deux corporations. L’ONG pense toutefois qu’il y a peu de risque que ce qui s’est passé à São Paulo se répète dans d’autres États.

Les violences faites aux femmes

Un autre point mis en avant par l’ONG Human Rights Watch est l’incapacité des policiers et des politiques publiques à réduire la violence domestique et donc à éviter les féminicides. Les chiffres sont alarmants. Selon les informations de l’ONG, on enregistre au Brésil 4,4 cas de féminicides pour 100 000 habitants, contre 3,8 au Mexique, second pays sur la liste.

« C’est une véritable défaite pour le Brésil. Il y a une passivité envers la violence faite aux femmes, victimes de 4 600 féminicides l’an dernier, soit 50% de plus qu’en 2016 », révèle Maria Laura Canineu, directrice de l’organisation au Brésil.

La critique la plus forte concerne l’absence d’enquête. Selon Maria Laura, déléguée de l’État du Roraima, État comptant le plus grand nombre de féminicides dupays (11,4 morts pour 100 000 habitants), 8 400 plaintes pour violences ont été classées sans suite, aucune enquête n’ayant été ouverte.

« [Les policiers] n’ont même pas été capables de prendre correctement les dépositions des femmes afin de rechercher les coupables. Ceci est un crime, que l’on peut prévenir si l’enquête est menée correctement », soutient la directrice.

Crise au Venezuela

Parallèlement, l’actuelle crise politique et sociale au Venezuela était citée dans le rapport pour le fort taux d’immigration qu’elle engendre. Uniquement pour le Brésil, 13 600 demandes d’asile ont été faites jusqu’en octobre de l’année dernière. Ce chiffre est 400% supérieur à celui de 2016, avec 3 368 demandes.

Le nombre de demandes augmente de manière exponentielle depuis 2010, année où l’on n’enregistrait pas plus de quatre demandes. Ce chiffre s’est élevé à 55 en 2013, à 209 l’année suivante et à 829 à 2015. Selon l’ONG, près de 100 000 Vénézuéliens ont quitté leur pays l’année dernière.

Voir en ligne : Ponte

[1Polices Pacificatrices : polices de proximité instaurées dans les bidonvilles de Rio de Janeiro à l’initiative du secrétariat d’État de la sécurité publique dans le but de désarticuler les groupes qui contrôlaient ces territoires sous forme d’États parallèles.

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