Entre spiritualité et spiritueux (1)

 | Par Phydia de Athayde

Un bar, une église, un bar, une église. Un bar, quelques petites maisons amoncelées, une église. La disposition des établissements dans les rues étroites, où se mêlent l’asphalte et la terre, de la périphérie de São Paulo, peut être résumée ainsi.

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Des doses alternées de cachaça et de rencontres religieuses sont facilement offertes en n’importe quelle fin d’après-midi dans le quartier sud de la ville. A quelques mètres de la ligne de métro mauve (curieusement la seule sans aucune connexion avec les autres) se trouvent le Jardin São Roque et le Parc Arariba, quartiers qui se mélangent et se ressemblent.

Une succursale de l’Eglise Internationale de la Grâce de Dieu partage un mur avec un bar, sans nom, comme tous par là-bas. A l’église, c’est le jour de « conseil en vie sentimentale ». Au bar, une femme voluptueuse en minishort, de papier-carton en taille réelle, invite le passant à prendre une bière.

Lindaura Ferreira Alves, âgée de 50 ans, est à côté de l’église. Deux Bibles à la main, elle fréquente l’église Bonnes Nouvelles de la Salvation, qui est également tout près. Lindaura a passé l’après-midi au Jardin de São Luiz, un quartier proche, en campagne. « Une campagne, c’est prier pour les nécessiteux, porter la bonne parole, louer le Seigneur » explique-t-elle. Joana Helena Santiago, âgée de 44 ans, est sa « sœur en Jésus Christ », ou aussi, son amie. Bible à la main, elle parle des églises qu’elle a fréquentées : "Avant, j’allais à la Bergerie de Dieu. Mais il n’y avait pas de fidèles là-bas, ça devenait presque vide, alors ils sont partis ailleurs. Alors je suis allée à l’église Bonnes Nouvelles de la Salvation. Je préfère être à l’église que de voir certaines choses en-dehors. Je préfère louer le Seigneur. On ne le voit pas mais on sent sa présence."

En-dehors de l’église signifie dans la rue et souvent, au bar. En quantité, l’offre des bars est bien supérieure à celle des églises. « J’ai un frère qui boit, il boit beaucoup. On prie Jésus d’avoir de la miséricorde pour lui. Le Seigneur a fait sortir mon mari des bars, cela fait maintenant déjà 4 ans qu’il est en présence du Seigneur », se rappelle une Joana souriante.

Dans la rue du haut, l’imposante architecture de l’Assemblée de Dieu évoque des souvenirs à Carlos Eduardo da Silva, âgé de 17 ans. Par impératif familial, il a fréquenté cette église durant 3 ans. Aujourd’hui, il se déclare athée mais considère Jésus comme « un gars très intelligent » : "Ma sœur est évangéliste et elle m’obligeait à y aller, elle m’a dit que je recevrai une chemisette en cadeau. On ne m’a pas offert une chemisette mais une Bible... Ce qui est drôle, c’est que rien que dans ma rue, il y a 3 églises, une à côté de l’autre. Pourquoi ne se réunissent-elles pas pour aider les gens, pour améliorer la rue ? Chacune ne veut que récupérer les fidèles de l’autre."

Près d’ici, un même mur sépare une autre église d’un autre bar. La succursale de l’église Arariba de la Renaissance du Christ est fermée. Accroché au portail, un appel aux fidèles : « Donnez canettes et cartouches d’imprimantes ». Dans le coin, n’importe qui sait que 60 canettes d’aluminium font 1 kilo et qu’1 kilo est vendu pour 3 R$. Il est curieux de penser que les fondateurs de l’église Arariba de la Renaissance du Christ, accusés de blanchir de l’argent au Brésil, ont été emprisonnés aux Etats-Unis et leurs biens, qui comprennent des villas et des voitures de luxe, bloqués par la Justice de Miami.

De ce côté-là du mur, le bar de Juarez est ouvert. Parmi les clients, Francisco Eduardo, un verre de bière à la main, prend la parole : "Il est plus que temps que cette église s’en aille ! Ils font un tapage du tonnerre ! Si tu discutes et qu’ils se mettent à jouer, tu peux crier que personne ne t’entendra. Ils jouent de la guitare et de la batterie, là, en haut. Il y a aussi une femme qui s’égosille à plein poumons ! Elle parle super fort !"

Juarez a ouvert ce bar il y a 10 ans. A côté, où aujourd’hui est l’église de la Arariba de la Renaissance du Christ, il y avait un débit de boissons. « D’ici, il ne sortait que de la cachaça à 51° ! », garantit Francisco, habitant du quartier depuis 28 ans. Juarez dit qu’avec l’église, il a gagné quelques clients occasionnels : "Si le mari n’est pas croyant, il vient, laisse les autres là-bas à boire leurs sodas, et passe ici prendre un verre, en cachette."

Francisco continue à se plaindre du bruit « tonitruant » des cultes. Il est encore en tenue de travail. Ses mains avec ses gros doigts calleux, confirment. Francisco est maçon. Un maçon très fidèle : "Ah, ici, c’est mon repère. Je passe ici tous les jours. Je sors du chantier à 17h30 et je viens. Quand ça ferme à 21h, je rentre chez moi."

Religieusement.


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