Chronique du pire annoncé, le fascisme par le vote

 | Par Autres Brésils

Le Brésil connaît sa pire crise sociale, économique et politique depuis la fin de la dictature civilo-militaire.

L’extrême violence de la campagne présidentielle, d’août à octobre 2018, est une étape de plus dans la montée de l’autoritaire institutionnel et du discours de haine, notamment sur les réseaux sociaux. Mais les résultats du second tour ont été tels qu’ils ont abasourdi même les plus pessimistes d’entre nous. Sur fond de rejet des élites et de vote anti-système, la démocratie a une nouvelle fois permis l’ascension du fascisme.

Le dimanche 28 octobre, le candidat d’extrême-droite Jair Bolsonaro (Parti social-libéral, PSL) a remporté le scrutin avec presque 58 millions de votes ( 55,13% des voix exprimées), face au candidat du Parti des Travailleurs, Fernando Haddad. Bolsonaro a pu compter avec le soutien d’une partie des élites traditionnelles, notamment les grands propriétaires terriens, des lobbies pro-armement et des puissantes églises évangélistes, les « 3B » : Bœuf, Balles et Bible. À cette coalition pestilentielle s’ajoute le renfort des communicants et financeurs états-uniens, comme Steve Banon, et leurs virales « fake news ».

Démystifier Bolsonaro !

En direct, sans cacher son désarroi, Autres Brésils a rappelé lors de ses différentes interventions que le candidat élu est la promesse de plus de violence, un faux dégagisme, l’aboutissement de la bataille politique pour le pouvoir qui avait provoqué le coup d’État parlementaire en 2016. La victoire de Bolsonaro, député qui avait dédié son vote en faveur de la destitution de l’ex-présidente Dilma Rousseff à la mémoire de son tortionnaire, est celle de la banalisation des propos et des actes racistes, sexistes, homo- et transphobes d’une partie non-négligeable de la société brésilienne. C’est une réaction au rôle des mouvements féministes, noirs et LGBTI dans l’élection de justesse de Dilma Rousseff, qui vise à réinstituer un système autoritaire tourné vers les « citoyens de bien », promouvant les « droits de l’homme pour les hommes droits » et la hiérarchie sociale et genrée.

Faux-prophète anti-corruption, Bolsonaro a 27 ans de carrière dans des partis mêlés aux différents systèmes de corruption faisant l’objet d’enquêtes en cours. Une procédure vient d’ailleurs d’être ouverte pour financement illégal de campagne politique.

Ne nous y trompons pas, le vainqueur est tout ce qui a été annoncé et les coalitions qui le soutiennent ne se sont pas encore pleinement révélées : elles sont maintenant légitimées et encouragées par la haine institutionnalisée qui promeut la torture et les exécutions sommaires pour nettoyer le pays de celles et ceux qui sont définis comme « rouges » ou vagabonds. L’expression un « bon bandit est un bandit mort » est à prendre au sérieux dans un pays où la criminalisation des mouvements sociaux et la multiplication des assassinats des défenseurs des droits humains n’ont jamais été aussi fortes.

Il n’est guère surprenant que le premier discours du vainqueur de ces élections présidentielles ne soit pas une conférence de presse mais un Facebook Live suivi d’une prière sur une chaîne nationale. Le futur président a promis le respect des libertés d’entreprendre et de confession. On assiste à l’avènement d’une théocratie où les libertés civiles et politiques ainsi que les droits du travail et la défense de l’écosystème et l’équilibre environnemental planétaire seront les cibles de prédilection. Dès le lendemain des élections, apparaît ainsi un appel à la jeunesse pour qu’elle dénonce les professeur.es qui « essayeraient de les endoctriner ».

Leurs existences menacées, mouvements sociaux, intellectuel.le.s, étudiant.e.s et autres acteurs et actrices de la société civile organisent la résistance.

Les mouvements sociaux, les milieux artistiques, culturels, universitaires ainsi que les partis politiques prennent progressivement conscience de l’ampleur de la défaite. Une constatation s’impose : de toutes les stratégies, la plus capable d’affronter le spectre fasciste qui menace le Brésil est la résistance active et constante des femmes, notamment des femmes noires. En organisant des rassemblements massifs, des rencontres, des assemblées et des ateliers d’auto-défense, ces femmes nous ont montré que le combat contre l’horreur fasciste sera dans une grande mesure une lutte féministe intersectionnelle. Redoublant d’inventivité face à l’urgence créée par l’arrivée de l’autoritarisme, les opposants à Bolsonaro se sont organisés pour discuter dans la rue avec les indécis, pour renouer avec ce qui est un des fondements de la démocratie : reconnaître autrui comme son égal.

Fidèle à son engagement profondément démocratique et anti-fasciste, l’association Autres Brésils continuera à décrypter l’actualité brésilienne pour un public francophone et à lutter pour la reconnaissance de la diversité des différents Brésils.

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