Bolsonaro reçoit l’évêque Edir Macedo et signale de nouveau son dédain pour la Globo

Traduction : Charlélie POTTIER pour Autres Brésils
Relecture : Sarah LAISSE

« Celui qui est venu à Rio pour rendre visite à Jair Bolsonaro, en ce jour férié, c’est l’évêque Edir Macedo de l’Église universelle du royaume de Dieu et de la TV Record », a rapporté le journaliste Ancelmo Gois. Pièce centrale dans la construction du coup d’État de 2016, la Globo se voit mise à l’écart pour la Record, laquelle devrait devenir le relai principal du bolsonarisme.

Ci-dessous la note du syndicat des journalistes de São Paulo (SJSP) à propos des relations entre la Record et Bolsonaro :

Le syndicat des journalistes de São Paulo ¬– Le syndicat des journalistes professionnel de l’état de São Paulo (SJSP pour Sindicato dos Jornalistas Profissionais no Estado de São Paulo) a reçu des plaintes de plusieurs journalistes de la part du réseau Rede Record – comprenant une chaîne de télévision, une radio et le portail d’informations R7 – selon lesquelles ils subiraient une pression permanente de la direction de la station pour que les informations avantagent le candidat à la présidence Jair Bolsonaro (PSL) et désavantagent le candidat Fernando Haddad (PT). Le syndicat rend ainsi public, comme l’exige son devoir de représentation de la catégorie professionnelle, une situation irrégulière vécue par ces professionnelles avec des pressions inacceptables et inappropriées au sein d’une entreprise de communication.
 
La pression interne pour la promotion du candidat du PSL a pour origine l’annonce du 29 septembre dernier faite par l’évêque Edir Macedo de l’Église universelle du royaume de Dieu, propriétaire de la station, dans laquelle il annonçait soutenir Bolsonaro pour la présidence. Dès lors, les informations relayées ont changé d’orientation et ce avant même le premier tour des élections. L’un de moment crucial a été l’interview de Jair Bolsonaro diffusée le 4 octobre, au même moment où les sept autres candidats à la présidentielle débattaient sur la TV Globo, malgré l’absence du favori des sondages.
 
 
Cette réorientation s’est également révélée par les décisions de ne pas rediffuser d’importants reportages, diffusés sur d’autres chaînes affiliées, mais annulées sur la grille des informations nationales de la chaîne, car il a été jugé qu’elles pourraient défavoriser Bolsonaro ou bien aider Haddad. Le portail d’informations R7 a également été explicitement orienté en faveur du candidat du PSL : pendant plusieurs jours, la rubrique « Élections 2018 » de la page d’accueil mettait en valeur soit des reportages en faveur de Bolsonaro, soit des reportages en défaveur d’Haddad.
 
Les pressions internes pour fausser les informations ont pris la forme d’intimidations subies par plusieurs journalistes. La tension dans la rédaction est même devenue insupportable pour certains professionnels. Ce fait a déjà été révélé par plusieurs sites d’information.
 
Concession publique
 
Dans une telle situation, il faut rappeler en premier lieu qu’une chaîne de télévision ouverte est une concession publique octroyée par le gouvernement fédéral et elle est soumise aux dispositions de l’article 5 de la Constitution brésilienne, paragraphe XIV, veillant à l’accès à l’information de toute la population. Lors d’une élection, et dans le domaine du journalisme, cela signifie que la société a le droit de recevoir une information précise, mesurée et équilibrée qui contribue à une compréhension des propositions en jeu et des engagements et intérêts liés à chaque candidature. Autrement dit, le citoyen doit avoir accès à un ensemble d’articles et de reportages sur les élections qui témoignent d’une bonne pratique du journalisme, en rapportant correctement les faits, quel que soit le candidat concerné. Ceci reste valable, même pour un média ayant adopté un positionnement politique explicite en faveur d’un des candidats, ce positionnement ne doit pas interférer avec sa fonction journalistique.
 
Il existe des outils propres à la profession de journaliste afin d’en jalonner l’action, parmi eux il y a le code d’éthique des journalistes brésiliens. Ce code indique que le journaliste a pour objectif de « publier des faits et des informations d’intérêt public » et non de se « soumettre à des directives contraires à la sélection précise des événements et à la diffusion correcte de l’information. »
 
Il faut comprendre que le réseau Rede Record est une entreprise privée, pour laquelle la législation prévoit un « pouvoir exécutif » de l’employeur sur les employés. Ceci est valable pour l’ensemble des relations de travail, mais le journalisme compte parmi les professions qui exigent une relative autonomie de par sa nature (comme pour les professeurs, par exemple). L’engagement du professionnel pour « l’accès à l’information », selon la clause de la Constitution, doit être favorisé quand il existe un conflit.
 
 
Le syndicat des journalistes agit pour garantir les prérogatives professionnelles dans les relations de travail et il cherche à insérer une « clause de conscience » dans les conventions collectives, selon laquelle, en résumé, par « respect de l’éthique journalistique, de la conscience professionnelle et de la liberté d’expression et de la presse », le journaliste a le droit de « refuser la réalisation d’articles qui enfreindraient le code d’éthique, porteraient atteinte à sa conscience et contrarieraient sa perception des faits ». Par cette clause, le professionnel pourrait même s’opposer à l’utilisation d’un contenu qu’il a produit pour un article collectif (y compris pour préserver sa relation avec les sources) et refuser l’association de son nom ou de sa photo à un travail journalistique avec lequel il ne voudrait pas être associé. Les entreprises de radio et de télévision refusent d’accepter cette clause fondamentalement démocratique, se gardant le droit d’exercer des pressions abusives sur les journalistes, lesquelles proviennent d’intérêts privés en contradiction avec le droit public à l’information.
 
Rejet

En défense du droit à l’information correcte et équilibrée pour la couverture des élections, le syndicat des journalistes professionnels de l’état de São Paulo rejette les pressions exercées par la Record et exige le respect de l’autonomie des journalistes d’entreprise pour la sélection et l’édition des informations. De plus, en réponse à la situation, il adopte les dispositions suivantes :

  • a) en respect de l’autonomie de la commission d’éthique du SJSP, il renforce sa demande auprès de la direction de la Record pour qu’elle adopte le « protocole éthique pour le second tour des élections de 2018 », envoyé par la commission d’éthique aux directions de journalisme de toutes les entreprises de communication de l’état fédéral ;
  • b) il demande une réunion immédiate avec l’entreprise pour y exprimer directement sa position et réclamer des garanties afin que les pressions sur les journalistes cessent dès que possible ;
  • c) il insiste dès à présent pour que les entreprises de radio et de télévision de l’état fédéral, lors des négociations de la campagne salariale de cette année (base de données du 1er décembre), intègrent la clause de conscience, en tant que partie de la liste des demandes ;
  • d) il décide de joindre les plaintes relatives au réseau Rede Record au dossier qu’il se prépare à remettre au ministère public des Droits de l’Homme concernant les violations des garanties professionnelles des journalistes pour la période électorale actuelle ; et
  • e) il se met à disposition des tous les journalistes de la station pour organiser des débats, des réunions et adopter toutes les mesures nécessaires afin de garantir le respect de l’autonomie professionnelle à laquelle tous les journalistes ont droit.

São Paulo, le 19 octobre 2018

Direction – Syndicat des journalistes professionnels de l’état de São Paulo.

Voir en ligne : Brasil 247

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