Un projet d’Engie au Brésil menace dix Quilombos au Paraná

 | Par De Olho nos Ruralistas, Márcia Maria Cruz

Traduction pour Autres Brésils : Du DUFFLES
Relecture : Philippe ALDON

Avec le projet d’installation de plus de mille kilomètres de lignes de transmission, le Projet Gralha Azul, de la multinationale française Engie, aura des impacts significatifs sur au moins dix territoires quilombolas dans la région de Campos Gerais dans le Paraná, une zone de grande importance écologique et touristique.

C’est la conclusion d’une étude présentée par des chercheurs de l’Université Fédérale du Paraná (UFPR), à la demande de l’OJC-Observatório de Justiça e Conservação (Observatoire de la justice et de la préservation), qui a constaté que les 1069 tours de transmission d’électricité prévues dans le projet, disposées à environ 500 mètres les unes des autres, auront des impacts irréversibles sur la biodiversité et la qualité des sols sur 320 mille hectares, soit l’équivalent de sept fois la superficie totale de la ville de Curitiba.

Avec 1 000 kilomètres d’extension, le Système de transmission de Gralha Azul menace les quilombos du Paraná. (Image : Divulgation/Engie)

Parmi les quilombos directement concernés par le projet figurent les communautés de São Roque et de Rio do Meio, dans la municipalité d’Ivaí ; Paiol de Telha, à Guarapuava ; Sutil et Santa Cruz, à Ponta Grossa ; Sete Saltos et Palmital dos Pretos, à Campo Largo ; Preto de Cercado et Rio das Pedras, à Palmeira. Dans le quilombo Manoel Ciríaco dos Santos, à Guaíra, l’une des lignes passera à moins de 400 mètres du territoire.
Selon le leader communautaire Adir Rodrigues dos Santos, vice-président de la Fédération nationale des communautés quilombolas du Paraná (FECOQUI), les Quilombolas n’ont pas été consultés par l’entreprise :

" Nous pensons que ce n’est pas légal. Nous n’avons pas de nouvelles pour l’instant. Nous attendons de voir si l’entreprise viendra nous en parler, si elle envisage de nous indemniser ou non. Nous avons été contactés quand ils ont dit qu’ils allaient passer par ici ; on en a parlé et ils ne sont jamais revenus. Pour nous, la ligne de transmission n’apporte aucun bénéfice."

DES EXPERTS REMETTENT EN QUESTION LES ÉTUDES DES ENTREPRISES

Pour qu’une entreprise puisse obtenir une licence préalable pour des projets qui ont un impact direct sur les territoires des Quilombolas, il y a deux étapes d’études. La première s’inscrit dans le cadre de l’Etude d’impact environnemental (EIA - Estudo de Impacto Ambiental) : l’entreprise doit informer s’il reste des communautés quilombolas - certifiées ou ayant fait l’objet d’une demande de certification - dans la zone de portée du projet, en plus de signaler les dommages potentiels et d’élaborer des mesures d’atténuation et de compensation.

A partir de cette identification, l’Etude sur la Composante Quilombola [1], réglementée par la Fondation culturelle Palmares (FCP) et nécessitant un plus grand approfondissement sur l’histoire de l’occupation et de l’utilisation des terres par les quilombos, doit être réalisée pour déterminer, avec précision, les impacts directs et indirects sur les communautés. "Les deux études devraient être complémentaires, étant donné que l’étude spécifique rassemble des informations importantes afin que l’agence environnementale soit en mesure d’évaluer la viabilité environnementale du projet", déclare Rafael Brito, sociologue et consultant en environnement.

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Cependant, en ce qui concerne le Système de transmission de Gralha Azul, ni la FCP ni l’Instituto de Água e Terra do Paraná-IAT-PR (Institut de l’eau et de la terre du Paraná) n’ont répondu à la demande concernant la composante quilombola. Selon Brito, bien que l’EIA fasse référence aux communautés traditionnelles quilombolas, les caractérisations sont précaires, insuffisantes pour évaluer les effets et les impacts que la ligne de transmission aura sur le mode de vie de ces communautés :

"Les évaluations de l’EIA ne permettent même pas d’identifier des aspects les plus généraux, tels que les moyens d’accès, le nombre de familles, la situation socio-économique. Il n’y a pas non plus de caractérisation socioculturelle, relationnelle et symbolique, ce qui empêche d’observer la relation de dépendance et les interactions entre ces communautés, leurs territoires et les ressources environnementales impactées par le projet."

LE PATRIMOINE ARCHÉOLOGIQUE ET LA BIODIVERSITÉ SONT MENACES PAR CE PROJET

L’un des tronçons les plus controversés du Complexe Gralha Azul est celui qui va de Ponta Grossa, dans les Campos Gerais, à Campo Largo, dans la région métropolitaine de Curitiba. Sur ce segment, la ligne de transmission passe par la zone de préservation environnementale (APA) de l’Escarpement Dévonien, connu pour ses sites archéologiques mais aussi pour être l’un des principaux refuges de la faune et de la flore de l’État du Paraná. Selon l’EIA - Etude d’impact environnemental réalisée par Engie, 398 tours seront installées sur ce seul tronçon.

Comprenant quinze lignes de transmission interconnectées, le Système de transmission de Gralha Azul est divisé en sept tronçons, dont cinq ont présenté un rapport environnemental simplifié. Les deux tronçons qui dépendent de l’autorisation environnementale sont suspendus par une injonction préliminaire des tribunaux.
Le 5 octobre, en réponse à une action civile publique déposée par des organisations de la société civile et des environnementalistes, la 11e Cour fédérale de Curitiba a rendu une ordonnance d’annulation des licences des lignes de transmission de 525 kV dans les tronçons Ivaiporã/Ponta Grossa et Ponta Grossa/Bateias, en invoquant le fait que l’installation et l’exploitation des pylônes impliqueront l’abattage de la végétation autochtone, la mort d’animaux, la dégradation des sols et la perte potentielle du patrimoine archéologique.

Richesse naturelle et archéologique de Campos Gerais. (Photo : Marta Regina Barroto do Carmo/Université de Ponta Grossa/UEPG)

Selon le groupe de chercheurs de l’Université Fédérale du Paraná (UFPR) dont le travail a inspiré l’action en justice, les EIA-études d’impact environnemental présentées par l’entreprise présentaient de sérieux problèmes en ce qui concerne le respect de la législation en vigueur. Par exemple, les Termes de Référence - documents qui présentent les lignes directrices pour la préparation de ce type d’étude - n’avaient pas été inclus dans le processus d’autorisation environnementale.

Le Ministère Public du Paraná s’est également interrogé sur les raisons pour lesquelles l’Institut brésilien de l’environnement et des ressources naturelles renouvelables (IBAMA) n’a pas participé au processus d’octroi des licences préalables (LP) et d’installation (LI) du projet.

Márcia Maria Cruz est journaliste. |

Voir en ligne : Empreendimento de multinacional francesa ameaça dez quilombos no Paraná

Photo de Couverture (Terra de Direitos) : Quilombo Paiol de Telha, le premier à avoir été reconnu en tant que tel dans le Paraná, fait partie des communautés menacées par le projet de la multinationale Engie.

[1NdT : Estudo do Componente Quilombola est une étude des impacts sociaux et environnementaux sur les communautés quilombolas liés à la localisation, l’installation, l’exploitation et l’expansion d’un travail, d’une activité ou d’un projet.

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