Épidémie de « fake news » au Brésil

Avec plus de trois mille militaires dans les ministères — dont neuf ministres officiers actifs ou retraités —, on ne peut pas dire que l’armée brésilienne reste neutre par rapport à la politique. Le président Jair Bolsonaro est lui-même un fruit des casernes.

Les militaires et leurs familles lui ont apporté leurs voix aux élections municipales de 1988 qui lui ont permis de devenir conseiller municipal de Rio de Janeiro. Élu député fédéral sept fois consécutives, il a défendu les intérêts des militaires, y compris en demandant l’amnistie pour les mutineries de la police militaire qui revendiquait des augmentations de salaire en février 2020 [1]. Il a été élu président du Brésil en 2018 avec le soutien de l’armée.

Ouvertement autoritaire, M. Bolsonaro défend la dictature (1964-1985) et méprise tous les jours les institutions démocratiques. Il a supprimé les subventions et financements publics pour les syndicats, les universités publiques, les centres de recherche et les associations. Il menace ouvertement le Parlement et le Tribunal suprême fédéral de mise au pas [2]. Les mouvements sociaux sont désormais criminalisés et poursuivis, plusieurs de leurs dirigeants ont été assassinés ; les journaux et chaînes de télévision qui s’opposent au gouvernement ont les plus grandes difficultés d’accès aux subventions publiques ; la presse d’opposition est attaquée et ses journalistes sont menacés par des groupes d’extrême droite sur Internet.

Certains généraux qui entourent M. Bolsonaro étaient au commande de la Mission des Nations unies pour la stabilisation d’Haïti (Minustah), accusée d’avoir perpétré des massacres à la Cité Soleil, la plus grande favela de la capitale, Port-au-Prince. Forts de ce savoir-faire, ils quadrillent aujourd’hui les favelas de Rio de Janeiro en y imposant la terreur. Plusieurs généraux retraités qui occupent des postes importants dans le gouvernement ont participé à la dictature. Les crimes de cette période restent d’ailleurs largement impunis.

M. Bolsonaro utilise massivement les infox (fake news) pour déconsidérer l’opposition et défendre la politique de son gouvernement. Soutenu par plusieurs chefs d’entreprise, ce système est organisé depuis le sommet de l’État. Installé au troisième étage du palais présidentiel, il est appelé le « Cabinet de la haine » [3] et constitue des dossiers contre les adversaires politiques et les opposants [4]. Il s’agit d’un vaste système de production de fake news reposant sur des millions de robots. Déjà utilisé pendant la campagne présidentielle, il fonctionne désormais grâce à un financement public. Selon la députée Joice Hasselmann (Parti social-libéral), ce « cabinet de la haine » est coordonné par les propres fils de M. Bolsonaro, Carlos et Eduardo, et compte dans ses rangs le conseiller spécial de la présidence, Felipe Martins, ainsi que trois assistants de Carlos : Tércio Arnaud Tomaz, José Matheus Sales Gomes et Mateus Matos Diniz. Il diffuse des attaques racistes, sexistes, de fausses accusations de corruption, des calomnies en tout genre, grâce à des cyber-milices et une armée de trolls, cyborgs et bots. La députée Joice Hasselmann estime que M. Bolsonaro dispose de 1,4 million de robots.

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Voir en ligne : Épidémie de « fake news » au Brésil

Photo de Couverture : Manifestation antiraciste et contre le président Bolsonaro, 14 juin 2020 © CSP-Conlutas

[1Ver Eliane Brum, « Brasil sofre de fetiche da farda » [Le Brésil souffre d’un fétiche d’uniforme], El Pais, 2 mai 2020.

[2Marcos Nobre Ponto Final — a guerra de Bolsonaro contra a democracia [Point final — la guerre de Bolsonaro contre la démocratie], Todavia, São Paulo, 2020.

[3Silvio Caccia Bava ; « As milícias digitais do capitão » [Les milices numériques du capitaine], Le Monde diplomatique Brésil, avril 2020.

[4Peter Pomerantsev, This is not propaganda — adventures in the war agains reality, Faber & Faber, Londres, 2019.

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