Brésil, assassinat d’une conseillère municipale, femme, noire, de gauche

Marielle Franco, l’une des deux élues noires du Conseil municipal de Rio de Janeiro a été assassinée ce 14 mars 2018. Ce crime vient après bien d’autres. Un mois pratiquement après la décision du président de fait, Michel Temer, de déployer l’armée fédérale dans les rues des quartiers pauvres de la « ville merveilleuse ». Neuf mois après la condamnation de Lula, candidat de gauche, candidat en tête des sondages pour les prochaines présidentielles, à neuf ans et demi de prison. Deux ans après la destitution inconstitutionnelle de la présidente élue en 2014, Dilma Rousseff.

Le Brésil n’a pas fini de solder les conséquences du coup d’État parlementaire ayant écarté la présidente élue Dilma Rousseff. La mort programmée de Marielle Franco est inscrite dans un déroulé de décisions criminalisant les idées et les personnalités progressistes, et déclassant la nécessité de réduire les inégalités.

Marielle Franco a été abattue dans son véhicule de neuf balles tirées d’une autre voiture par des professionnels. Elle sortait d’une réunion avec des jeunes femmes noires dans le quartier de Lapa, centre historique de Rio. Étudiante, elle avait pour son rapport de fin d’études choisi de traiter « l’insécurité sociale préconisée par un État pénal ». Élue en 2016 conseillère municipale sous les couleurs du PSOL, elle avait pris à bras le corps le problème de l’insécurité créée par les forces de police. Elle venait d’être désignée rapporteur en charge du suivi de l’intervention de l’armée décidée par le président de fait, Michel Temer.

Rio, comme le Brésil, est à majorité noire et métisse. Marielle Franco était l’une des deux seules noires dans un Conseil municipal de 51 membres. Sur 811 conseillères municipales élues en 2016 dans les villes capitales brésiliennes, seules 32 sont des femmes noires. Ou « foncées » pour reprendre la terminologie euphémistique du système statistique brésilien, l’IBGE. Soit 3,9%. Née en 1979 dans la favela de Mare, la défense des pauvres, de la communauté noire, était son souci principal. Compte tenu des initiatives les concernant, à caractère policier et militaire, elle avait ciblé ce problème en priorité, sans négliger d’autres sujets, relatifs aux droits des femmes ou de la minorité LGBT. Mais le comportement de la police de Rio et de l’armée, depuis le 16 février 2018, était tel qu’il imposait selon elle sa priorité. Les « forces de l’ordre » ont en effet abattu 1124 personnes en 2017, majoritairement noires, jeunes, et résidants dans les favelas. Le déploiement de l’armée fédérale, le 16 février 2018, n’a rien arrangé. Marielle avait ciblé ces derniers temps le 41e bataillon de la police militaire qui venait d’assassiner cinq jeunes du quartier pauvre d’Acari. Depuis 2011, ce bataillon a abattu 567 personnes.

Le 10 mars 2018 sur son compte Twitter, elle dénonçait « l’absurde ». Un bataillon de police militaire, le 41e, qui au lieu de protéger, tue. « Arrêtez », écrivait-elle, « de tuer nos jeunes ! Le 41e bataillon de PM est réputé être le bataillon de la mort ». Cet activisme incommodait beaucoup de policiers en uniforme, ou complétant leurs revenus comme « miliciens » dans des activités parallèles. De façon révélatrice, Jair Bolsonaro, candidat présidentiel, ancien militaire prônant l’usage de la force policière et militaire pour remettre de l’ordre dans la maison Brésil n’a fait aucun commentaire après cet assassinat.

Voir en ligne : IRIS

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