Cette étude est née d’un dense parcours de vie et professionnel qui a permis à Janaina Cardoso de forger un regard critique sur la culture brésilienne. Ayant travaillé pendant de nombreuses années dans le marketing pour des multinationales brésiliennes, elle a été témoin d’une société marquée par une mondialisation effrénée. Une mondialisation qui n’est pas totale, car elle exclut certains peuples et en place d’autres au centre des flux économiques et culturels. Selon Cardoso, ce processus d’exclusion concerne aussi le domaine culturel. L’auteure s’intéresse à la façon dont se sont construits les stéréotypes sur le Brésil en France, et à comment les déconstruire aujourd’hui. Pour cela Cardoso propose de privilégier la diffusion du cinéma brésilien, notamment le cinéma documentaire.
L’auteure a alors choisi d’étudier le festival documentaire Brésil en Mouvements organisé annuellement par l’association Autres Brésils à Paris. Le festival ouvre le champ à un cinéma libre, allant des docu-fictions inspirés de la mythologie brésilienne à des biographies des grands artistes nationaux. La particularité de ce festival serait, entre autres, l’intérêt pour les productions locales, qui retranscrivent une histoire des peuples autochtones sans le filtre des stéréotypes produits par les caméras de l’étranger. Selon Cardoso, les médias et le cinéma étrangers risquent de transposer un ensemble de clichés sur le Brésil quand ils filment le pays. Il faudrait laisser d’avantage la caméra aux mains des peuples locaux et c’est dans cette dynamique qu’agit le festival documentaire Brésil en Mouvements (BEM) organisé par Autres Brésils, selon Janaina Cardoso. Pour elle BEM représente un espace destiné à la discussion des réalités du Brésil, pour ensuite tenter de dépasser, ensemble, les clichés existants.
Cependant le festival parvient-il réellement à montrer à l’écran des images enracinées dans la culture et le vécu local ?
Pour répondre à cette question Cardoso traverse cinq siècles d’Histoire marqués par des rapports idéalisés et stéréotypés entre la France et le Brésil. Une Histoire où les symboles brésiliens ont été manipulés par les médias et l’industrie culturelle. La distance géographique rendait difficile la rupture avec ces représentations. 2006, l’année du Brésil en France, n’a pas réussi à rompre avec l’image d’un pays festif, du carnaval, de la samba, du foot. L’imaginaire français représente toujours le Brésil comme un mélange entre un pays exubérant, sublime, avec des gens heureux et l’image d’un pays pauvre, violent, misérable et corrompu.
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Avec la mondialisation, le développement d’Internet, l’accès plus facile aux images, il y a de plus en plus de narrateurs et de narrations sur le Brésil. Il devient alors indispensable de pouvoir se référer à une plateforme qui s’appuie sur les récits des luttes et groupes de résistance locaux. Cardoso souligne l’importance du site d’Autres Brésils dans la diffusion des actualités politiques en gardant une analyse critique des faits. L’identité d’Autres Brésils ne tombe pas dans « l’exotisme » fréquemment associé au Brésil. C’est une identité complexe, se basant sur « l’ensemble de tous les Autres Brésils », ce qui justifie aussi le positionnement idéologique de l’association.
Finalement, le groupe se positionne comme un satellite français des populations marginales/oubliées au Brésil, et encore jamais, ou en tout cas très rarement, exposées au public français. L’auteure démontre l’avancement de cette lutte pour l’information par son étude de cas du festival documentaire Brésil en Mouvements. Cardoso a analysé 225 films présentés en 13 ans de festival (entre 2005 et 2018) et a pu constater le regard critique du festival, la diversité des films et des thèmes présentés, l’impact des choix cinématographiques – narrant d’autres réalités, et la possibilité de débattre avec le public lors de chaque évènement.
En fin de compte le but de BEM n’est pas de montrer un Brésil qui plaît ou séduit. « Rien n’est caché, tout est révélé ». En effet, on laisse la parole aux victimes des problèmes ou à ceux qui se battent pour trouver des nouvelles solutions : « Les autochtones se filment eux-mêmes, la forêt est un théâtre de mouvements de préservation et destruction, les favelas sont des espaces de création artistique et cible de projets sociaux », explique-t-elle. Ici chaque plan est enraciné dans la culture et identités locales.
Finalement, Janaina Cardoso conclue son travail de recherche en réaffirmant l’importance d’Autres Brésils en tant que nouvelle source d’information et de communication :
« Dépasser les stéréotypes, rechercher et diffuser une réflexion d’un pays sur un autre se traduit, dans le cas d’Autres Brésils, par un acte d’idéalisme, de courage, d’effort et d’amour pour le Brésil. »
À consulter : Le blog du festival « Brésil en Mouvements »
Consulter le Mémoire complet au format PDF :