Tout pour la Patrie

 | Par Gabriel Perissé

De quoi nos candidats sont-ils capables !

<img498|left> J’ai regardé avec extase, le gouverneur Geraldo Alckmin sucer un bâtonnet à la cristophine [1] dans le programme de Ronnie Von (il a encore affirmé que cela avait le goût du citron... bon, la cristophine n’a vraiment pas de goût).

En d’autres temps, mes parents ont voté pour Jânio Quadros, qui faisait campagne en soulevant un balai (promesse de balayer la corruption du pays, les bandes de voyous) et qui, pendant les discours, mangeait un sandwich à la mortadelle et du pain avec de la banane pour démontrer son identification aux pauvres.

Lula, récemment, s’est sacrifié en embrassant le président Bush et en affirmant clairement et à voix haute que le grand chef d’Etat et un allié du Brésil. Nous devrions réélire Lula pour son acte d’héroïsme. Oh, combien a t-il souffert pour interpréter cette scène.

En 1994, Fernando Henrique Cardoso a monté une jument dans l’Etat d’Alagoas, tenté quelques pas de forró [2] dans le Pernambuco, bu de la garapa [3] au Pará, du « vin d’amour » dans le Minas Gerais et a posé en poncho et chapeau de cow-boy dans le Rio Grande do Sul. Tout, tout pour la Patrie.

Fernando Collor avait un profil d’athlète, victorieux : il a fait du jet ski, piloté un avion de chasse et une Ferrari à 200 km/h, joué au football, au volley et au tennis. Le candidat olympique !

Pendant les campagnes, tout candidat qui se respecte embrasse les électeurs, serre tout le monde dans ses bras, pleure quand il entend des enfants chanter, bénit les bébés, applaudit le peuple, mouille la chemise, plante des arbres, gravit les collines, visite les bidonvilles, met les pieds dans la boue, goûte n’importe quel plat typique (et le trouve très bon), touche le malade - tout, tout pour la Patrie.

Toute cette performance pour nous faire croire que nous avons le leader idéal, le dieu qui s’est incarné pour sauver le pays. Le leader politique vient sur terre pour faire des miracles que lui-même n’avait pas réalisés auparavant. De façon messianique, il condamne les opposants et promet le paradis - emploi, santé, éducation, sécurité, alimentation. Sa prédication est parfaite et elle l’est encore davantage lorsqu’il a un rédacteur publicitaire à ses côtés.

Prophète de soi-même, le candidat ne peut pas se permettre de nourrir des doutes. Le doute appartient au Démon... pas à la démocratie. Le candidat est venu pour vaincre.

Ambiance de campagne. Quelques candidats ressuscitent des cendres. D’autres, sont décédés avant l’heure. Ils, tous, commencent à s’entraîner aux phrases clés. Le temps des accusations et des défenses est arrivé, l’occasion de se montrer utile, réellement ou fictivement.

Sacerdoces du peuple, fidèles interprètes de nos désirs les plus profonds, les candidats menacent de marcher sur les eaux.


Par Gabriel Perissé - Correio da Cidadania N° 490 - mars 2006

Traduction : Adriana Aubert pour Autres Brésils


Gabriel Perissé est Docteur et professeur en Philosophie de l’Education à l’Uninove-SP. Web Site : www.perisse.com.br


Notes :

[1] christophine : [NDLR] Ou encore chayotte, chouchou, brionne... Ces noms désignent le même légume. On le trouve dans toute l’Amérique Centrale, les Antilles, la Réunion, en Afrique du Nord.

[2] forró

[3] garapa : [NDLR] Selon les régions du Brésil, nom de jus de canne à sucre ou d’eau de vie locale (cachaça) à base de canne à sucre.

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