Procès de l’assassinat du Père Gabriel Maire : le juge Pedro Valls Feu Rosa annonce la prescription

Le prêtre français Gabriel Maire est assassiné au Brésil le 23 décembre 1989 [1]. Un procès s’ouvre l’année suivante [2]. En octobre 2017, le juge Pedro Valls Feu Rosa, chargé du dossier, a annoncé à contrecœur la clôture du procès pour prescription. Nous publions ici la traduction de l’intégralité du discours fait par le juge à cette occasion.

État de l’Espírito Santo
Pouvoir judiciaire
Tribunal de justice
Cabinet du juge Pedro Valls Feu Rosa

Procès n° 0023600-20.1998.0.0035
Décision

France, 1er août 1936. Naissance de Gabriel Félix Roger Maire. Dès sa plus tendre enfance sa vocation pour le service de la religion se manifeste. C’est ainsi qu’à l’âge de 12 ans il a poussé les portes d’un séminaire. Quelques années plus tard le voici ordonné prêtre, en 1963.

Je n’ai pas eu l’honneur de le connaître personnellement. Mais, en contemplant son œuvre, je puis affirmer sans crainte de me tromper que si un mot peut décrire son apostolat, c’est le mot « force d’âme » – tout au long de son cheminement on a remarqué ses positions fermes contre les injustices et les abus de l’État. De la torture à la corruption, du laisser-faire au manque d’attention, chaque manquement des puissants devenait immédiatement la cible de la sainte colère de ce prêtre remarquable.

Ce n’est pas un hasard si, rapidement, il allait être choisi comme secrétaire général du « Mouvement populaire des citoyens du monde » où se retrouvaient tous ceux qui, indépendamment de leur confession, conviction politique ou nationalité, armés de leur seul courage citoyen, voulaient simplement dire « non » – non à l’oppression, non aux armements, non à la misère morale et matérielle.

Le 2 octobre 1980 il a quitté une vie confortable dans son pays pour venir continuer son voyage à Porto de Santana – un lieu alors très pauvre – différent en tout de l’éclat de la Ville-Lumière qu’il a laissée derrière lui avec tant de dévouement.

Dans cette nouvelle phase de son apostolat il se trouva confronté avec ce qui allait être son ennemi le plus redoutable : le mal infiltré dans les institutions, quelque chose que nous pourrions dénommer avec justesse : le « crime organisé ».

Mais il n’a pas reculé, notre prêtre si désintéressé. Il ne s’est pas laissé intimider. Presque témérairement, il s’est lancé à la défense des opprimés, cherchant à les conscientiser et à les organiser. Avec tout son cœur il a dénoncé les pratiques ténébreuses de la corruption.

Ne tarderont pas à arriver ici et là les habituelles « menaces de mort », encore si communes dans ce pays, bien qu’il se soit déjà écoulé quatre décennies [3]. On imagine ce que cela devait être en ces jours si sombres !

Ce furent des messages, des coups de fil et des intimidations les plus diverses, mais notre prêtre n’a pas reculé d’une semelle – entre l’éclat de la « Ville-Lumière » et l’obscurité des périphéries d’un endroit aussi délaissé, il a choisi ces dernières. Avec abnégation, il a choisi d’y rester.

Et voilà que, le 23 décembre 1989, le Père Gabriel Félix Roger Maire est assassiné. Il tombe, victime d’un tir bien ajusté qui l’atteint dans la partie gauche de son thorax.

Ce fut cela la « récompense » du Brésil pour un prêtre dont l’unique péché avait été de chercher à être une lumière pour ses enfants. C’est ainsi que notre patrie a remercié celui qui est arrivé, apportant dans ses bagages, non pas le mal et la convoitise, mais simplement une immense volonté d’aider !

Voir en ligne : DIAL

[1Voir DIAL 1448 - « BRÉSIL - Un prêtre français assassiné ».

[2Voir DIAL 1466 - « BRÉSIL - L’enquête sur l’assassinat du P. Gabriel Maire », DIAL 1488 - « BRÉSIL - Révélations sur l’assassinat de G. Maire », DIAL 1645 - « BRÉSIL - Scénario probable de l’assassinat du père Gabriel Maire », DIAL 1886 - « BRÉSIL - L’affaire Gabriel Maire »…

[3Depuis la dictature militaire (1964-1985) – NDLT.

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