Politiques de l’identité : les anthropologues face aux droits quilombolas et aux quotas raciaux

 | Par Andreas Hofbauer

Source : Marina Frúgoli / Couv : K. Penalba et M. Ishtar de Luca

La question raciale au Brésil est indubitablement en pleine évolution. La « cause noire » a gagné en visibilité de diverses manières. Des espaces qui, peu de temps auparavant, étaient presque exclusivement occupés par des personnes blanches comptent aujourd’hui une « présence noire ». Une classe moyenne noire urbaine – bien qu’encore limitée – s’est constituée. Les dernières statistiques relatives à la catégorie « couleur noire » peuvent également être lues comme un indicateur de ce changement [1] . La proportion de pretos [2] a été conservé en portugais dans le texte (Ndt).]] dans les recensements officiels avait décru tout au long du siècle dernier pour atteindre 4,9% en 1990. Depuis, la courbe s’est inversée pour se situer, en 2010, à 7,6% (IBGE 2011, 76).

En même temps qu’augmentait le nombre des personnes non blanches dans des professions valorisées, comme à la télévision et, de façon générale, dans la sphère publique, les traditionnelles perceptions relatives à la différence et à l’inégalité ont commencé à être ébranlées. Après une longue période au cours de laquelle le discours officiel des gouvernants du pays présentait la société brésilienne comme une « démocratie raciale », un nouveau consensus social a vu le jour, reconnaissant l’existence d’un « problème racial ». Pour la première fois, des propositions politiques ciblées visant à combattre la discrimination ont été mises en œuvre. Deux d’entre elles, en particulier, ont acquis une grande visibilité : la reconnaissance, par l’article 68 de la Constitution de 1988, du droit à la terre des quilombolas [3] ou, selon le texte de la loi, des « descendants rémanents de communautés de quilombos [4] » et la mise en place, à partir de 2002, de dispositifs de discrimination positive (« quotas raciaux ») dans les universités publiques. Ces mesures ont suscité beaucoup de polémiques tant dans la presse que dans la communauté scientifique.

Cet article se propose d’analyser les contributions et les différentes prises de position des anthropologues brésiliens dans les débats portant sur ces deux projets et sur leur mise en œuvre.

Lire la suite sur : Brésil(s)

[1La langue portugaise distingue preto de negro. Les deux catégories discriminent la même couleur (noir) et ont des connotations péjoratives, la seconde étant utilisée le plus souvent comme synonyme d’esclave et généralement associée à des classifications raciales.

[2En raison de la complexité de la différence entre preto et negro, exposée note 2 par l’auteur, negro a été traduit par noir et [[preto

[3Un quilombo est, au Brésil, une implantation d’esclaves fugitifs dès lors considérés comme des quilombolas, des Noirs marrons selon la terminologie de la Caraïbe française (Ndt)

[4En 1988, année où le pays fêtait le centenaire de l’abolition, une nouvelle constitution était proclamée. Elle comportait deux articles que le mouvement noir a perçu comme des victoires : l’article n° 5 qui définit la pratique du racisme comme crime imprescriptible et sans caution possible ; l’article n° 68 qui reconnaît aux descendants rémanents (remanescentes) des communautés des quilombos la propriété définitive de leurs terres, attribuant à l’État le devoir de leur émettre des titres de propriété. Cette conquête constitutionnelle a une signification symbolique importante pour les militants noirs, car le concept de « quilombo » a été construit comme un modèle de contre-société créée par des esclaves fuyants le monde colonial : le jour de la mort héroïque de Zumbi, leader du plus grand et plus durable quilombo au Brésil, Palmares (XVIIe siècle), est remémoré chaque année par les militants noirs lors du Jour de la conscience noire.

Agenda

Tous les événements

Suivez-nous

Newsletter

Abonnez-vous à la Newletter d’Autres Brésils
>
Entrez votre adresse mail ci-dessous pour vous abonner à notre lettre d’information.
Vous-pouvez vous désinscrire à tout moment envoyant un email à l’adresse suivante : sympa@listes.autresbresils.net, en précisant en sujet : unsubscribe infolettre.

La dernière newsletter

>>> Appel à dons - Catastrophe climatique au Rio Grande do Sul/Brésil

Réseaux sociaux

Flux RSS

Abonnez-vous au flux RSS