Plus d’écologie et moins d’économie à la Rio+20

 | Par Fabíola Ortiz

Des activistes demandent que les droits des peuples indigènes et l’égalité des genres soient pleinement pris en compte dans les débats sur le développement durable de la Rio+20.

Source : Envolverde - 26/03/2012

Par : Fabíola Ortiz

Traduction : Didier Bloch pour Autres Brésils
Relecture : Véronique Phelut


<img2324|left> Rio de Janeiro (Terramérica) – Des centaines d’organisations non gouvernementales et de mouvements sociaux internationaux prévoient que la Conférence des Nations Unies pour le Développement Durable (Rio+20) sera un fiasco et, pour compenser, misent sur la réussite du Sommet des Peuples. Les deux rencontres auront lieu en juin à Rio de Janeiro, la ville où s’est tenue il y a vingt ans la Deuxième Conférence des Nations Unies pour l’Environnement et le Développement, considérée comme un moment-clé du droit environnemental international.

Selon les prévisions officielles, la Rio+20 réunira près de 50 mille personnes – qui participeront aux réunions préparatoires et aux activités parallèles durant une bonne partie du mois de juin – et près de 120 chefs d’État et de gouvernement du 20 au 22 juin. Quant au Sommet des Peuples pour la Justice Sociale et Environnementale en Défense des Biens Communs, il aura lieu du 15 au 23 juin sur l’Aterro do Flamengo. Près de 10 mille participants sont attendus pour cet événement, qui est indépendant de la conférence officielle.

Des représentants de 20 organisations sociales, syndicales, de jeunesse, de femmes, des peuples indigènes, de luttes paysannes et d’afro-descendants se sont réunis au cours de la quatrième semaine du mois de mars à Rio, afin de coordonner les actions, de mettre au point le discours exprimant le mécontentement lié à la Rio+20 et d’effectuer les derniers préparatifs pour la grande mobilisation du mois de juin.

L’un des enjeux est de prendre en compte les droits des peuples autochtones dans la conception du développement durable. C’est ce qu’affirme le militant Sander Otten, du Comité technique de la Coordination Andine des Organisations Indigènes (CAOI), formée par des groupes boliviens, colombiens, équatoriens et péruviens. « Nous devons exiger le respect des droits qui, en réalité, permettent aux peuples d’être impliqués dans les projets qui seront réalisés sur leur territoire », souligne-t-il auprès de Terramérica.

Les 17 et 18 juin prochains, le Comité global des peuples indigènes débattra sur deux thèmes cruciaux : la présence et l’impact de l’industrie extractive, et le consentement préalable, libre et informé des peuples indigènes concernant les mesures qui affectent leur territoire, établi par la Convention 169 de l’Organisation Internationale du Travail.
Sander reconnaît qu’il y a eu des avancées en matière de droits indigènes au cours des vingt dernières années, mais il constate aussi que « bien souvent les gouvernements des pays andins misent sur l’intensification d’un modèle basé sur l’extraction : activités minières, pétrolières et grandes monocultures. » Il ajoute que les organisations indigènes des Andes désirent participer aux discussions sur l’économie verte – un des piliers de la Rio+20 – et proposer des alternatives fondées sur leur ‘paradigme’, le « modèle du bien -vivre » et la gestion communautaire d’une économie respectueuse de la « Terre-mère ».

« La contribution des indigènes, souligne Sander, est de continuer à promouvoir le bien-vivre en tant que modèle alternatif pour l’humanité, et d’engager le dialogue avec d’autres modèles critiques de la modernité » ; une modernité qui recherche toujours la croissance économique au lieu de « la solidarité et de la réciprocité ». La CAOI propose un modèle moins ‘économiciste’, capable d’apporter de vraies solutions à la crise de l’environnement. Selon Sander, « le modèle que les pays sud-américains mettent en œuvre actuellement n’est pas celui de l’économie verte mais son exact opposé ».

« On renforce le modèle fondé sur l’extraction qui n’a rien d’écologique. Au contraire de ‘verte’, c’est une économie ‘marron’ qui progresse dans ces pays », ajoute Sanders, qui défend la taxation des combustibles fossiles et la fin des subventions dont bénéficie ce secteur. Il propose également d’« inclure dans le prix des dérivés des hydrocarbures les coûts sociaux et environnementaux liés à leur exploitation, considérés jusqu’ici comme des externalités ».

Sandra Morán, membre de l’Alliance Politique du Secteur des Femmes au Guatemala et de la Marche Mondiale des Femmes, propose que l’égalité des genres soit articulée à la formulation de propositions alternatives susceptibles d’améliorer la qualité de vie de la population féminine. « Notre rôle est fondamental : nous sommes au cœur de la vie et nous la reproduisons. Il nous faut récupérer cette contribution des femmes et en finir avec la division sexuelle du travail », soutient-t-elle.

Les féministes cherchent à coordonner leurs actions avec d’autres mouvements sociaux. Il s’agit de cristalliser « une alternative à l’extrême pauvreté, la violence, la militarisation, le contrôle et l’autoritarisme, que nous vivons au quotidien », ajoute-t-elle. Cette militante n’attend rien de la Rio+20 car seules des décisions prises au préalable y seront ratifiées. Elle pense qu’« il est impossible d’avoir une influence sur ces décisions ». Pour Sandra, la force du Sommet des Peuples réside dans le fait de « se rencontrer, potentialiser des propositions et engendrer des mouvements qui émanent de nos propres communautés ».

Le scepticisme envers la Rio+20 semble avoir gagné certains législateurs brésiliens, qui organisent eux-aussi un événement parallèle pour attirer l’attention des médias et de l’opinion publique. Il s’agit de la Rio Clima (Rio Climate Challenge), qui vise à approfondir le débat sur le changement climatique et aura lieu du 14 au 17 juin. « Nous allons faire une grande simulation des négociations entre pays émetteurs de carbone et organisations supranationales afin d’essayer d’arriver à un consensus », annonce le député Alfredo Sirkis, du Parti Vert brésilien, qui préside la sous-commission spéciale Rio+20 à la Chambre des Députés.

L’objectif est d’organiser une discussion sur des bases concrètes, qui permettra de réunir les éléments nécessaires à un accord international conforme aux avis scientifiques, qui stipulent que pour éviter un changement climatique désastreux, la concentration de gaz à effet de serre ne devrait pas dépasser le seuil de 450 parties par million. Seront conviés à ces simulations de négociations des facilitateurs des BRICS (Brésil, Inde, Chine, Afrique du Sud), de l’Union Européenne, des États-Unis, du Canada, d’Australie, du Japon, d’Indonésie, de la Ligue Arabe et des petits États insulaires.


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