<img1367|left> A première vue, les avantages semblent vraiment illimités. Il semblerait que les émissions de gaz à effet de serre responsables du réchauffement planétaire vont être réduits de manière substantielle car le CO2 rejeté par les véhicules roulant aux biocarburants aura au préalable été capté par les plantes qui les produisent. Les pays deviendront plus autonomes dans leurs besoins énergétiques car ils auront été capables de cultiver leur carburant eux-mêmes. Les économies rurales et les communautés en tireront des avantages car elles auront de nouveaux débouchés pour leurs cultures. Et les pays pauvres auront accès à un nouveau et vaste marché pour leurs exportations.
Ce tableau idyllique est peint par ceux qui ont intérêt à promouvoir ces carburants. Mais ce nouveau monde d’énergie verte et propre, avantageux pour tous, peut-il réellement exister ? On en doute. Nous recevons des rapports sur les territoires des populations autochtones qui sont occupés et rasés pour faire la place aux plantations produisant des carburants, sur davantage de forêt pluviale abattue pour planter des millions d’hectares de palmiers à huile et de soja, et sur des ouvriers vivant comme des esclaves dans les plantations de canne à sucre à éthanol du Brésil. Prenant exemple sur les ONG et les mouvements sociaux d’Amérique latine, nous estimons que le terme agrocarburant est meilleur que le terme de biocarburant pour décrire le processus conduisant à cette destruction : se servir de l’agriculture pour produire du carburant pour les voitures.
Bio ou business ?
Pour comprendre ce qui est réellement en train de se passer, il est important, avant toutes choses, de mettre l’accent sur le fait que la promotion des agrocarburants n’est pas proposée par des décideurs politiques soucieux d’éviter le réchauffement planétaire et la destruction de l’environnement. La manière dont les agrocarburants vont être développés a déjà été définie, et cette voie est maintenant suivie par les grandes multinationales et leurs alliés politiques. Celles qui ont le contrôle sont quelques-unes des plus grosses compagnies du monde : dans les industries pétrolières et automobiles, et parmi les négociants de produits alimentaires, les entreprises de biotech, et les sociétés d’investissement mondiales.
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Pour faire face au changement climatique, nous n’avons pas besoin des plantations d’agrocarburants pour produire de l’énergie combustible. Par contre, nous avons besoin de transformer complètement le système alimentaire industriel. Nous avons besoin de politiques et de stratégies pour réduire la consommation d’énergie et pour empêcher le gaspillage. De telles politiques et stratégies existent déjà et certains luttent pour elles. En agriculture et en production alimentaire, cela signifie orienter la production vers les marchés locaux plutôt qu’internationaux, cela signifie adopter des stratégies pour maintenir les gens sur les terres, plutôt que les jeter dehors ; cela signifie soutenir des approches à long terme et durables pour réintroduire la biodiversité dans l’agriculture ; cela signifie diversifier les systèmes de production agricoles, en se servant et en développant les savoirs locaux ; et cela signifie remettre les communautés locales aux commandes du développement rural.
De telles politiques et stratégies impliquent l’utilisation et un développement accru des techniques agroécologiques pour maintenir et améliorer la fertilité et la matière organique et dans le processus de capter le dioxyde de carbone dans le sol plutôt que de le rejeter dans l’atmosphère. Et cela demande aussi une confrontation directe avec le complexe agro-industriel mondial, maintenant plus fort que jamais, qui nous mène avec son programme d’agrocarburants dans la direction totalement opposée.
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Par GRAIN
Source : GRAIN
GRAIN est une organisation non gouvernementale internationale (ONG) dont le but est de promouvoir la gestion et l’utilisation durables de la biodiversité agricole fondées sur le contrôle exercé par les populations sur les ressources génétiques et les connaissances locales.