Médias et pouvoir : le comportement de la presse revient à l’ordre du jour dans la dernière ligne droite avant les élections (1)

<img751|left> Chercheurs, analystes et professionnels du secteur identifient la manifestation d’un phénomène de déplacement de l’influence des canaux médiatiques dans la définition des intentions de vote. Le traitement médiatique actuel du cas du « dossier » remet ce thème sous les feux de la rampe.

Le compte à rebours pour les élections générales du 1er octobre a fait éclore, depuis quelques semaines, un florilège de textes, éditoriaux et commentaires dans les « grands médias » (canaux commerciaux d’envergure nationale) qui expriment tous un sentiment de perplexité. De différentes façons, les « voix » ont lancé une réflexion publique -bien que non explicite- sur le pourquoi de la force de la candidature du PT malgré son exposition négative dans les journaux et sur les chaînes de télévision.

Une des raisons invoquées a été le manque d’"information" de la base qui a l’intention de voter pour Lula, majoritairement de faible revenu. Par « information », il faut comprendre les reportages diffusés par les moyens de communication les plus puissants. Mais de quelle information s’agit-il ? Selon une enquête réalisée entre juillet et août par l’Observatoire Brésilien des Médias et portant sur la couverture des principaux journaux et magazines du pays, le candidat Lula est décrit de façon négative dans 47,41% des articles, contre 31,2% où il bénéficie d’un traitement positif. Dans le cas d’Alckmin, la situation s’inverse, avec un abordage positif caractérisant 44,56% des dépêches dans lesquels le présidentiable apparaît, contre 31,42% de citations négatives.

La comparaison avec d’autres élections dans lesquelles les « grands médias » avaient exercé une grande influence -comme dans celle de 1989, quand ils « créèrent » un candidat sans histoire comme Fernando Collor de Melo, était la preuve que quelque chose ne tournait pas rond. Pendant quelques semaines, l’argument du « peuple désinformé », du peuple « qui ne sait pas voter » fut en vigueur. Le peuple, dans le cas présent, serait la majorité la plus pauvre qui vote pour Lula. Selon le sondage de Datafolha des 18 et 19 septembre, parmi les familles dont le revenu ne dépasse pas deux salaires minimum (SMs), le président actuel atteint 57% d’intentions de vote, alors que dans les familles qui gagnent plus de dix salaires minimaux ce pourcentage tombe à 30%. Avec Alckmin, à nouveau les taux s’inversent. Dans les familles de plus de 10 SMs, 42% disent voter pour le candidat du PSDB, alors que dans les familles de moins de deux salaires minimaux l’indice tombe à 24%.

Les discours perplexes des chroniqueurs de « grands médias » commencèrent à évoquer une dissociation de la population avec « l’opinion publique ». Pour les intellectuels et les analystes, cependant, ce groupe ne parvient pas à faire la distinction entre les opinions de ses propres canaux médiatiques et l’opinion de la population. « Les analystes politiques se sont toujours imaginé qu’ils forgent l’opinion. Ils aiment l’idée que leur opinion est celle qui, normalement, prévaudra. Ils pensent qu’ils sont l’opinion publique », dit le professeur de l’Université de Brasília Venício Lima, lors d’un débat sur le thème « Médias et Pouvoir » organisé par le Syndicat des Employés de Banque de Brasília la semaine passée. Lima a lancé récemment un livre sur le traitement par la presse de la crise politique née des dénonciations de l’ex-député Roberto Jefferson (PTB-RJ).

Sur son blog, le sociologue et chroniqueur de Carta Maior, Emir Sader, a durement critiqué la posture des chroniqueurs en rappelant que la force de Lula prend sa source dans l’ensemble des politiques mises en œuvre par le gouvernement. « Ils n’apprennent donc pas, ils ont rejeté la faute sur le peuple, dans l’espoir -comme a dit Lula- de dissoudre le peuple, de remplacer le peuple par un autre, celui de leurs rêves. Qui est cette presse, pour revendiquer cette mission de contrôler les gouvernements ? De quelle morale dispose-t-elle pour cela ? Qui leur a confié ce mandat ? Par le vote populaire, personne. Ils se revendiquent eux-mêmes ».

Dans une entrevue accordée au magazine Caros Amigos, le journaliste Franklin Martins, ex-commentateur politique de la TV Globo et actuellement sous contrat avec la TV Bandeirantes, tente d’expliquer la perte d’influence des médias en utilisant la théorie du « caillou dans le lac ». L’opinion de ce groupe de journalistes irradierait vers l’ensemble de la population leur vision des faits. Pour Martins, les premiers ricochets de la vague, pour employer la métaphore visuelle, ont cessé d’être les classes riches et moyennes pour devenir les classes C et D, plus directement affectées par les politiques gouvernementales et par la réduction de la misère et de la pauvreté. Selon le raisonnement du journaliste, non seulement il y a eu un déplacement, mais le vote des pauvres s’est mis à influencer celui de la classe moyenne, en référence à la progression de la candidature Lula dans ce segment. Pour Venício Lima, il serait plus correct d’utiliser la « théorie du miroir », selon laquelle les chroniqueurs des grands médias voyaient une telle identification entre ce qu’ils écrivaient et ce que pensait l’"opinion publique" qu’ils en venaient à imaginer que leurs analyses et leur ligne éditoriale n’étaient que le reflet de la position de la population.

Lima évalue cependant le scénario actuel à l’aide d’une autre référence : la « théorie de la cascade », de l’intellectuel italien Giovanni Sartori. Selon celle-ci, il existe un processus d’irradiation des idées des élites économiques et politiques, au-delà des médias, vers l’ensemble de la population. Mais à mesure que l’ « eau » descend, elle est « contaminée » par les différents niveaux de la cascade, une nouvelle métaphore pour expliquer le fait que la population interprète les idées dominantes selon ses valeurs. La théorie aiderait à expliquer comment les conditions de la population joueraient un rôle important dans la formation de l’opinion, mais pour Venício Lima, le phénomène de la candidature Lula représente quelque chose de « nouveau, qui reste encore à être mieux compris et expliqué ».

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