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"Il ne s’agit pas de savoir si Dieu accepte ou non une guerre Il l’accepte" annonce le pasteur américain Ralph Drollinger, lors de l’un de ses enseignements bibliques hebdomadaires, d’une voix pleine d’émotion mais posée, de manière à ce que ceux qui visitent son site adhèrent à son mode de penser. Dans la foulée, il explique que la phrase biblique "Bien heureux ceux qui promeuvent la paix car ils seront appelés fils de Dieu" (Mathieu 5, 9) ne se rapporte "qu’à la manière dont les fidèles doivent mener leur vie privée". En d’autres termes, elle ne vaut pas pour les gouvernements qui, eux, peuvent faire la guerre.
Publié en mai 2018, cette "étude biblique [1]" était justifiée selon le propre pasteur car il s’agissait d’aider les membres du gouvernement américain à réfléchir sur "la menace de guerre avec la Syrie, l’Iran et la Corée du Nord", démarche initiée par le président américain Donald Trump. Il s’agissait de les convaincre qu’une guerre contre ces pays était bénie par la propre bible. Quelques jours plus tard, Drollinger allait être plus explicite dans sa prédication en demandant à ce que "vous, en tant que service public, aidiez à réduire la tendance anti-biblique laïque en faveur du pacifisme et de la non intervention ! Celle-ci va conduire au chaos global !"
Ce n’était ni la première ni ne serait la dernière fois que le fondateur du ministère évangélique Capitol Ministries [2] allait trouver dans la bible une justification aux actions radicales du gouvernement Trump. Le véritable objectif de l’église fondée par Drollinger n’est-il pas, finalement, de "convertir" les dirigeants politiques et les représentants des pouvoirs publics à une vision chrétienne évangélique qui corresponde parfaitement à celle de l’extrême droite américaine. "En l’absence d’une telle vision, il est bien plus difficile d’arriver à mettre en œuvre des politiques publiques conformes à la volonté de Dieu et qui soient bénéfiques au progrès de la nation" résume Drollinger dans l’un des écrits de son site.
Ralph Drollinger, fondateur du ministère évangélique Capitol Ministries, a reçu du pasteur Raul José Ferreira Jr. un maillot de l’équipe de foot brésilienne.
Alors que le président américain rejette les accords sur le réchauffement climatique et remet ouvertement en cause son existence, Drollinger, dans une autre étude biblique rejette l’idée que l’homme puisse avoir un quelconque impact sur l’environnement. "Nous devons avoir une entière confiance en la capacité et la volonté de Dieu à maintenir la qualité de l’écosystème de notre monde", dit-il et il conclut, d’une voix exaltée "Quelles vérités glorieuses Dieu nous a-t-il transmises ! Elles sont une gifle au visage des théoriciens à la mode qui essaient de nous faire peur avec le réchauffement global".
Et si quelqu’un se demande si construire un mur à la frontière avec le Mexique afin d’éviter l’entrée d’immigrants et de réfugiés - la plus importante promesse de Trump - est compatible avec le principe chrétien de compassion, il a une réponse toute prête : " La Genèse dans son chapitre 11 dit que, selon les desseins de Dieu, les nations doivent disposer de langues, de cultures et de frontières différentes. Les politiques migratoires de chaque nation doivent se fonder sur la bible et être strictement appliquées – avec l’absolue confiance et la certitude que Dieu approuve de telles actions." C’est le pasteur qui le garantit !
Capitol Ministries – nom qui signifie "Ministères du Capitole" – symbole du Congrès américain – a été fondée par un ancien joueur de basquet, Ralph Drollinger, en Californie, en 1996, en vue de "former des disciples de Jésus Christ dans l’arène politique à travers le monde entier". L’idée du pasteur était de faire bénéficier le monde politique de ses activités antérieures, l’évangélisation des athlètes.
Jusqu’en 2010, son public se limitait aux députés étatsuniens ; cette année-là, un premier cercle d’études a été fondé au Congrès, à Washington. Ce n’est qu’en 2017 que Drollinger a fait sa percée au niveau de la politique mondiale, quand il a fondé le premier groupe d’études réservé aux seuls membres du gouvernement de Donald Trump. La rencontre hebdomadaire réunit dans un lieu secret, dix membres du premier cercle du gouvernement dont le vice-président, Mike Pence et le secrétaire d’état aux affaires étrangères, Mike Pompeo. L’ex-directeur de l’agence pour l’environnement, Scott Pruitt, qui a organisé la sortie des Etats-Unis de l’Accord de Paris sur le réchauffement global et qui, lui aussi, remettait en cause les effets des émissions de carbone sur le climat, a également participé à ces réunions.
Bien au-delà d’un simple bavardage, les prédications de Drollinger ont eu un effet pratique sur un gouvernement qui, plus d’une fois, a reconnu avoir été élu grâce au vote évangélique. En juin dernier, l’un de ses sermons a été utilisé par l’ex-procureur général, Jeff Sessions, pour rassurer la conscience des électeurs quant à la détention, dans des conditions lamentables, de milliers d’enfants immigrants, à la frontière avec le Mexique. "Je vous citerais l’apôtre Paul et son commandement clair et sage dans l’épitre aux Romains, ch. 13, demandant d’obéir aux lois du gouvernement car Dieu a choisi ce gouvernement pour réaliser ses desseins", disait Sessions invoquant comme justificatif la bible et non la législation américaine. Alors que la presse américaine, choquée, réagissait, Drollinger a tenu à montrer ses empreintes digitales au dos de la déclaration.
"J’ai eu l’insigne honneur de le former sur ce sujet et sur beaucoup d’autres" a-t-il ajouté. "Il n’y a rien de plus enthousiasmant pour un professeur de la bible de voir que l’un des gars avec qui vous travaillez met en place quelque chose que vous lui avez enseigné." De fait, cette phrase est extraite du manuel de base de Drollinger. Sessions, quand il était au gouvernement, participait réellement à ses rencontres d’études bibliques.
Séparer les parents de leurs enfants serait approuvé par Dieu, dit le pasteur. "Quand quelqu’un enfreint la loi d’un pays, il doit s’attendre à ce que la séparation d’avec ses enfants soit l’une des conséquences de son comportement illégal. C’est le cas des voleurs et des assassins qui sont arrêtés" dit-il pour se justifier.
A la conquête de Bolsonaro, Capitol arrive au Brésil.
Financée par le vice-président, Mike Pence et par le secrétaire d’état aux affaires étrangères, Mike Pompeo, selon ce qu’a indiqué Drollinger lui-même dans son site, la Capitol Ministries se réclame de l’appui du gouvernement américain pour réaliser sa mission "divine" : dominer le monde. Depuis l’année dernière, elle a ouvert des représentations dans cinq pays latino-américains – le Mexique, le Honduras, le Paraguay, le Costa Rica et l’Uruguay – elle a annoncé l’ouverture de deux autres, au Nicaragua et au Panamá et elle vient d’arriver au Brésil pour un lancement officiel, programmé pour la deuxième quinzaine d’août, au Senat, "sans beaucoup de tapage, réservé uniquement aux autorités" et "en présence de Drollinger et de son épouse" comme l’expliquait le pasteur de l’église baptiste Vida Nova, Raul José Ferreira Jr. à Agência Pública. Celui-ci assurera la conduite des études bibliques au Sénat et à la Chambre des députés.
Et d’ajouter que, "si Dieu le veut", il va aussi diriger des études bibliques au sein de la Casa civil en présence du président Bolsonaro et de ses ministres, traduisant les paroles du pasteur américain au président brésilien. "Nous faisons tout notre possible pour obtenir au moins une rencontre du pasteur Drollinger avec le président Bolsonaro, maintenant en août afin de pouvoir commencer à développer notre action. Mais, même si le président n’est pas présent à cette rencontre, nous allons essayer de mettre en place un travail au sein de la Casa civil, auprès des ministres ayant un accès direct au palais présidentiel", dit-il.
L’objectif de ces études bibliques, qui ont été traduites en espagnol et le seront prochainement en portugais, est de diffuser la vision du christianisme de Drollinger appliquée à la politique. "Notre objectif est d’atteindre le niveau de la présidence de la république et les ministres proches du Président. Nous avons un slogan qui est ’first of the first’, c’est-à-dire, les premiers des premiers. Par l’intermédiaire de ces personnes d’influence, nous pourrons changer le destin de notre nation", dit le pasteur Ferreira Jr., qui, sur l’indication du directeur régional au Brésil, a suivi une formation d’une semaine à Seattle avec Ralph Drollinger et son équipe.
Le pasteur Raul José Ferrreira, responsable de l’organisation des études bibliques au Sénat, en présence du président Jair Bolsonaro
Des réunions bibliques dans les cabinets des députés
Les aspirations de la Capitol Ministries au Brésil, sont ambitieuses - même si le pasteur Ferreira Jr. parle d’un "travail de fourmi" – puisqu’il s’agit de diriger, à huit clos dans les bureaux ministériels, des études bibliques individuelles ou avec des parlementaires, tout particulièrement les non convertis, auxquelles s’ajoutent des réunions collectives hebdomadaires. Il s’agit, en plus, de s’assurer que chaque parlementaire du Congrès national reçoit bien les textes de ces études, par courriel ou par message sur son portable. "Notre objectif est de reconstruire la nation en s’appuyant sur les valeurs chrétiennes qui sont forgées à partir de l’étude de la parole de Dieu", dit le pasteur.
Pour atteindre ces objectifs, il indique que le ministère pastoral de Drollinger dispose déjà de l’appui de quelques parlementaires qui sont des membres actifs du Front parlementaire évangélique [3] tels que le sénateur et pasteur Zequinha Marinho (Parti Social Chrétien – Para), le député Sóstenes Cavalcante (DEMocrates [4] - Rio) et le député et également pasteur Roberto de Lucena (Podemos – São Paulo).
Giovaldo Freitas, l’homme de la Capitol Ministries au Brésil
Les négociations pour l’arrivée de la Capitol Ministries au Brésil ont commencé sous le gouvernement Temer, en 2017, comme l’explique à Pública son directeur au Brésil et pasteur de l’église baptiste de Moema , Giovaldo Freitas, dans son bureau à São Paulo. Cette année-là, Giovaldo faisait partie de la Global Leadership Summit, une organisation évangélique américaine qui réalise de grands événements de formation des dirigeants d’entreprises dans le monde entier. Au cours de l’une de ces manifestations à Chicago, le pasteur a été invité par l’actuel coordinateur de la Capitol Ministries pour l’Amérique latine, à participer à un déjeuner qui définirait les détails de l’arrivée de ce ministère pastoral au Brésil.
Giovaldo est alors passé par le centre de formation de Drollinger à Washington avec des personnes du monde entier. Il se souvient "qu’il y avait des gens d’Amérique latine, quelques-uns des Caraïbes, d’Europe, d’Asie … d’Argentine, du Paraguay, d’Uruguay, d’Equateur, de Colombie, des Bermudes, des Bahamas, du Guatemala, du Honduras, de Costa Rica, du Mexique, des Pays-Bas, de Roumanie, de Russie, …" Et il ajoute : "Ce fut très intéressant car soudainement je me suis vu là en train de d’échanger avec un sénateur américain extrêmement motivé car il allait venir au Brésil. A cette réunion, il y avait huit sénateurs et deux députés [américains]". Le pasteur n’a pas voulu révéler le nom des congressistes américains présents mais il a ajouté que trois ministres de Trump avaient participé à cette réunion, la ministre de l’Education, Betsy De Vos, le ministre de l’énergie, Rick Perry et celui de l’agriculture, Sonny Perdue.
D’après lui, ces affinités religieuses ont donné des résultats au niveau politique. "Par exemple, ce ministre [américain] de l’énergie a eu une longue conversation avec notre ministre des mines et de l’énergie en raison même de l’arrivée au Brésil de Capitol Ministries", a-t-il révélé.
Depuis lors, le pasteur explique que plusieurs négociations ont eu lieu au Congrès, en plus de réunions avec les ambassadeurs brésiliens ainsi qu’avec le chef de cabinet de Temer, en mai 2018, "afin de décider certaines choses" au sujet de lancement d’une représentation au Brésil, selon Giovaldo. Interrogé sur le contenu de ces discussions, il n’a pas souhaité en dire plus. Pública a trouvé des traces d’une réunion avec celui qui, en juillet 2018, était le ministre en charge du Secrétariat général de la présidence de la république, Ronaldo Fonseca, réunion à laquelle participaient Giovaldo et un autre membre de Capitol Ministries, le pasteur Beserra.
En juillet 2018, le ministre en charge du Secrétariat général de la présidence de la république, Ronaldo Fonseca, s’est réuni avec Giovaldo et un autre membre de Capitol Ministries, le pasteur Beserra.
Bien qu’il dise que l’objectif de Capitol Ministries n’est pas de faire du prosélytisme, le pasteur admet qu’il existe une proximité naturelle avec les partis les plus à droite. Pour lui, le nouveau gouvernement est le scénario idéal pour l’arrivée de ce ministère. "La première semaine d’avril, nous nous sommes réunis avec Onyx Lorenzoni [ministre de la Casa civil] qui s’est montré très réceptif ; il est membre d’une église évangélique, dans le Rio Grande do Sul ; ce fut très agréable. Le président Bolsonaro était en Israël, nous n’avons donc pas pu le rencontrer mais nous avons été bien reçus par les services de la présidence" ajoute-t-il.
Selon la professeure de droit et directrice du Centre juridique traitant des questions de genre et de sexualité à l’université de Colombia, Katherine Franke, l’exportation de missions fondamentalistes des USA vers l’Amérique latine, avec la bénédiction du gouvernement fédéral, viole les principes constitutionnels des Etats-Unis concernant la séparation de l’Eglise et de l’État. "Le gouvernement fait de la promotion de la religion un projet officiel du gouvernement et cela viole clairement l’une des clauses de la Constitution. Qui plus est, le gouvernement fait la promotion d’une vision particulière de la religion, il ne le fait donc pas de manière impartiale", dit cette spécialiste au sujet de cet ensemble de moyens qui font partie du projet "Transnationales de la foi".
Les baptistes en première ligne
Pour Christina Vital da Cunha, professeure à l’université fédérale fluminense (UFF), et chercheuse à l’Institut des études de la religion, certains éléments prennent une importance particulière avec l’arrivée au Brésil du ministère pastoral de Drollinger, l’un d’eux serait le nouveau protagonisme politique de l’église baptiste. Alors qu’autrefois cette église était considérée comme progressiste et éloignée de la politique, la ministre Damares est pasteure baptiste, la Première dame, Michelle Bolsonaro, également ainsi que d’autres membres du gouvernement. C’est le cas de Raul José Ferreira Jr. de l’église baptiste Vida Nova, qui dirige les études religieuses destinées aux membres du gouvernement.
"On peut observer que depuis quelque temps, quelque chose de nouveau se produit au Brésil, une affinité organique entre les Etats-Unis et les pays de l’Amérique latine à partir de cet élément religieux qui trouve, dans la politique institutionnelle, une marge d’action importante. On constate un alignement de type conservateur au Brésil, en Amérique latine et dans les autres pays du monde dont les principaux acteurs, dans les pays d’Amérique latine, sont les religieux évangéliques et catholiques" fait-elle remarquer. Elle attire l’attention sur la légitimation d’un discours à droite s’appuyant sur la bible, lequel existait déjà jusqu’à un certain point, depuis la campagne présidentielle de Bolsonaro. "Il faudra également être attentif à de possibles luttes de pouvoir avec des institutions déjà bien établies telles que l’Eglise universelle [5] et l’Assemblée de Dieu [6]."
A Pública, le pasteur Giovaldo explique qu’il existe une différence entre le travail de Capitol Ministries et celui du front parlementaire évangélique. "Il s’agit de choses différentes. Notre public cible, à l’intérieur du Congrès, ce ne sont pas les évangéliques. Les études bibliques sont destinées à ceux qui n’ont pas de lien avec l’église, avec Dieu. Il s’agit d’évangéliser, de cheminer ensemble, de prier. Et alors, si par chance, certains reconnaissent le Christ comme leur Seigneur, ils pourront intégrer le FPE [Front parlementaire évangélique]", dit-il, bien qu’il reconnaisse que le partenariat avec les parlementaires évangéliques – comme ceux cités par le pasteur Ferreira Jr. – est fondamental et que les premières études bibliques seront réalisées dans le cabinet du sénateur Zequinha Marinho et celui du député Silas Câmara (PRB-Amazonie), pasteur de l’église Assemblée de Dieu et président du Front parlementaire évangélique.
Représentants du Front parlementaire évangélique en réunion lors de la présentation de Capitol Ministries.
En Amérique latine
Drollinger nie que son organisation fasse du lobbying, indiquant que son objectif se limite à convertir les personnalités politiques au Christ. Cependant la Capitol Ministries est entrée au Honduras, pays d’Amérique centrale, par l’intermédiaire du propre vice-président des Etats-Unis, Mike Pence. En juin 2018, alors que le président du Honduras, Juan Orlando Hernández était en visite officielle à Washington, Mike Pence et le secrétaire d’état aux affaires étrangères, Mike Ponpeo, lui ont suggéré d’ouvrir une représentation de la Capitol Ministries au sein de la Présidence et du Congrès.
"Il est également bon de savoir que le vice-président Pence et le secrétaire d’état aux affaires étrangères Pompeo ont eu une influence décisive sur le président Hernández concernant le lancement des activités de Capitol Ministries auprès des membres de son gouvernement" écrivait Ralph Drollinger dans le communiqué d’inauguration des études bibliques au Honduras, le 08 novembre 2018.
En 2017, Drollinger a recruté Oscar Zamora, un pasteur péruvien qui a étudié la théologie au West Coast Christian College, en Californie. Depuis lors, Zamora voyage sur le continent, négociant l’ouverture de ministères pastoraux dans les parlements de la région. Il maintient un profil discret et évite de donner des interviews. Ces pasteurs, comme cela s’est produit avec Giovaldo, sont recrutés au sein du Global Leadership Summit, programme qu’il dirige en Amérique du sud. Trois pasteurs de Drollinger nous ont affirmé que les réunions sont financées par des fonds américains.
Au Costa Rica, la direction de Capitol Ministries sera confiée au président de l’Assemblée de Dieu, Ricardo Castillo Medina. Ce religieux va diriger les études bibliques destinées aux membres du Congrès, "afin que ceux-ci puissent prendre des décisions fondées sur une conscience pure et sans tâche", dit-il. En mars dernier, Ralph Drollinger et son épouse, Danielle, se sont rendus dans ce pays pour se réunir avec un groupe de congressistes à l’hôtel Radisson dans un quartier chic de la capitale, pour un petit déjeuner dont le thème était "Reconstruire une nation", titre du livre dont il est l’auteur
"Je voudrais vous transmettre les salutations du vice-président Mike Pence et du secrétaire d’état aux affaires étrangères, Mike Pompeo. Ces deux hommes aiment Jésus Christ de tout leur cœur et leur influence se fait littéralement sentir sur le monde entier. Ils ont fait leurs ces principes et les diffusent, chacun avec sa personnalité", dit Drollinger. Et il a pronostiqué un bel avenir : "Si vous gagnez des leaders politiques à la cause du Christ, cela aura des retombées bénéfiques pour votre pays et produira d’énormes effets, très positifs sur les orientations que prendra le Costa Rica".
Mais Capitol Ministries ne s’est pas contenté de s’approcher des gouvernements d’une droite altière et conquérante. Le 19 juillet dernier, Drollinger était présent aux commémorations des 40 ans de la révolution sandiniste au Nicaragua, présidées en grande pompe par Daniel Ortega et son épouse, Rosario Murillo alors que le pays traverse une crise politique qui a provoqué la mort de plus de 300 personnes, a conduit plus de 500 manifestants à la prison et des milliers de personnes à l’exile.
Selon une note transmise à la presse, c’est Ortega lui-même qui a invité Capitol Ministries à ouvrir une représentation dans son pays. Dans sa lettre d’invitation, Ortega a déclaré : "Nous savons que, si les personnes à qui Dieu a confié le destin de la nation, renaissent [dans la foi], nos députés légiféreront en s’appuyant sur les valeurs de la bible". Et c’est ainsi que, devant des milliers de personnes, Drollinger a rappelé les valeurs chrétiennes du pays et a remercié l’opportunité offerte par le gouvernement d’Ortega. "Je prie pour votre nation, je prie pour vous et pour les leaders du gouvernement pour que tous nous puissions faire rayonner les valeurs du Christ tous les jours", dit Drollinger, selon le journal officiel La voz del sandinismo.
La guerre contre l’Église catholique menée par le gouvernement Ortega entre certainement dans cette stratégie politique. Dans une interview à Pública, en juillet 2018, l’écrivain et ancien vice-président du pays, Sergio Ramírez, a indiqué que l’un des points les plus sensibles à une possible réélection en 2021 était justement ceci. "Ortega a également l’Église catholique contre lui. Le gouvernement a commencé à attaquer les églises catholiques comme dans le cas de la fusillade de 15 heures à l’intérieur de l’église de la Divina Misericórdia, à Managua [le 13 juillet, des étudiants réfugiés dans l’église ont été, pendant 15 heures, la cible de tirs de la police]. Il me semble que s’opposer à l’Église catholique dans un pays éminemment catholique comme le nôtre, c’est une cause perdue".
Les études bibliques dans le cabinet présidentiel et au Congrès du Nicaragua seront confiées à Arsenio Herrera, pasteur de la plus grande église évangélique de Managua, la Hosanna Church. Herrera fut le disciple du créateur de la communauté Hosanna, l’américain David Spencer, auquel il attribue l’exploit d’avoir converti plus de 500 âmes par semaine lors des premières années de cette église et que, peu avant sa mort, Ortega et Rosario Murillo lui ont accordé la citoyenneté nicaraguayenne en honneur des services rendus au peuple du Nicaragua.
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