Belo Monte : Lula au pied du mur (6/6) La dernière chance pour la rivière Xingu et ses populations

 | Par Sumaúma

Le 22 juin 2010, le président Lula, alors dans son second mandat, s’est rendu à Altamira, dans l’État du Pará, et a prononcé un discours controversé dont la région se souvient encore. Lula a défendu la construction de l’Usine hydroélectrique de Belo Monte, qui inonderait une partie de la ville, noierait des îles, affecterait les peuples autochtones, assécherait la Volta Grande de la Xingu et expulserait quelque 55 000 personnes de leurs maisons, certaines d’entre elles appartenant à des communautés traditionnelles de la forêt. Aujourd’hui, près de 13 ans après ce discours, alors que Lula est au début de son troisième mandat, les faits et les preuves abondent pour affirmer que Belo Monte est un « crime de folie ».

Par Helena Palmquist _ Aussi disponible en anglais ici
Traduction pour Autres Brésils : Du DUFFLES
Relecture : Philippe ALDON

Autres Brésils propose une traduction par semaine, choisie par l’équipe éditoriale de Sumaúma. Pour mieux connaître Sumaúma voir en fin d’article

La plupart des droits des dizaines de milliers de personnes affectées par Belo Monte ont été arrachés de haute lutte. Sans les manifestations des peuples autochtones et riverains de la Volta Grande, il n’y aurait ni le système de transposition des bateaux ni le pont sur le canal de dérivation qui garantit l’accès par la route à la rivière Xingu dans la TI Paquiçamba. Sans la pression des habitants des quartiers Independente I et Independente II, ils n’auraient pas été reconnus comme affectés et réinstallés. Sans la pression de la SBPC, du MPF et des populations riveraines, leurs droits en tant que communautés traditionnelles n’auraient pas été pris en compte et le territoire riverain n’aurait pas été prévu par l’IBAMA. Sans les luttes des autochtones de la ville, la construction d’un quartier plus adapté à leur mode de vie, le Tavaquara, n’aurait pas eu lieu.

La catastrophe environnementale et humanitaire de la Volta Grande de la Xingu est un autre chapitre dans lequel la mobilisation des personnes affectées peut être cruciale. En août 2022, un premier résultat du travail conjoint des chercheurs autochtones, riverains et universitaires a été déposé à l’IBAMA avec une évaluation technique indépendante concernant les informations fournies par Norte Energia. L’avis, émis par le MPF, propose une série de mesures qui, si elles sont adoptées, pourraient sauver les écosystèmes et les communautés de la région.

La proposition a reçu de la part des riverains le nom plein d’espoir de « Hidrograma das Piracemas ». L’idée est d’appliquer un hydrogramme provisoire ajusté pour la Volta Grande, pendant que des études complémentaires sont menées, et de créer un groupe multidisciplinaire, avec des représentants des communautés autochtones et riveraines, pour élaborer un hydrogramme socio-écologique de la Volta Grande qui garantira la viabilité des écosystèmes et des modes de vie des populations ainsi que la production d’énergie par Belo Monte. Pendant que ces études sont menées, les habitants et les scientifiques demandent à l’IBAMA de respecter les phases de crue et de décrue du fleuve.

Il s’agit donc d’inverser la logique dans laquelle Belo Monte fonctionne depuis sa conception et d’adopter un point de vue de protection des richesses socioculturelles et écologiques de la région. « Jusqu’à présent, on a calculé la quantité d’eau dont Belo Monte a besoin pour produire de l’énergie et seul le reste est déversé dans la Volta Grande », résume le scientifique André Sawakuchi. « S’il s’agissait vraiment d’un projet visant à réduire les pertes de biodiversité, la logique devrait être inverse. Il faudrait réfléchir à la quantité minimale d’eau nécessaire au maintien des écosystèmes et utiliser le surplus pour produire de l’énergie. » Pour le géologue, si l’IBAMA et le gouvernement acceptent les propositions des scientifiques, des riverains et des populations autochtones, la rivière Xingu aura une chance. « Dans la zone du réservoir de l’usine, les pertes sont déjà irréversibles. Dans la Volta Grande, il y a encore une chance », affirme-t-il.

Il n’y a pas de réparation pour les impacts produits par Belo Monte. Ils se sont déjà produits. Ses effets ont laissé des traces sur plus d’une génération d’êtres humains et détruit des millions de vies non humaines, en plus d’avoir compromis l’existence connectée de la forêt, avec des dommages qui vont bien au-delà. Comme on le sait, les effets de ce qui se passe dans la nature ne sont pas circonscrits, ils produisent des destructions en chaîne. Mais il est possible — et constitutionnellement requis — que de nouveaux impacts, certains encore plus destructeurs, soient finalement interdits par le gouvernement et que les conditions qui auraient dû régir la construction et l’exploitation du barrage hydroélectrique soient finalement remplies.

Ce n’est pas seulement la Volta Grande de la Xingu qui peut avoir une chance, mais aussi le legs de Lula et du PT à l’Amazonie.

Carlos Eduardo de Almeida, à vélo, apporte un bidon à eau vide à sa mère à RUC Laranjeiras, à Altamira, Pará.
Photo de janvier 2023 : Soll Sousa / SUMAÚMA

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Voir en ligne : A hora é agora : Lula terá que decidir sobre Belo Monte

Des centaines d’arbres morts composent le paysage du cimetière de la nature dans le réservoir de Belo Monte.
Photo de janvier 2023 : Soll Sousa/ SUMAÚMA

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