Le gouvernement brésilien ne cherche pas à respecter les droits indigènes

 | Par Adital

« Nous aimerions que le ministre Gilberto Carvalho [du Secrétariat général de la Présidence, NDT] vienne ici sur le chantier, pour lui donner en main propre nos revendications, afin qu’il nous dise directement quelles actions sont possibles et lesquelles ne le sont pas. Malheureusement, il semble que le dialogue avec lui ne soit pas possible », affirme le dirigeant indigène Munduruku.

Par l’Institut Humanitas - Unisinos

Source : Adital

Traduction : Caroline Sordia pour Autres Brésils

« Ce mandat de retrait est basé sur des informations qui ne sont pas vraies, à savoir, que nous empêchons les travailleurs de sortir et d’entrer sur le chantier, que nous dégradons le patrimoine de l’entreprise. Or il a été prouvé au cours de ces derniers jours de dialogue que cela n’était pas vrai  ». La déclaration est de Valdenir Munduruku, dirigeant indigène du village de Teles Pires, lors d’une interview réalisée par téléphone, alors qu’il venait d’apprendre la décision du Tribunal régional fédéral de la première région. Ce dernier a statué dans la nuit du 8 mai dernier sur le retrait du chantier de l’usine hydroélectrique de Belo Monte, près d’Altamira dans l’État du Pará. D’après Valdenir Munduruku, le préavis judiciaire a été une vraie « surprise », quelques heures après que les Indiens aient sollicité auprès du gouvernement brésilien un délai pour répondre à la lettre reçue dans l’après-midi du 8 mai. « Nous avons été surpris par cette décision, parce que jusqu’à présent, nous étions en pleine négociation avec le gouvernement », a expliqué Valdenir Munduruku à IHU On-Line.
Une semaine plus tôt, 160 Indiens de six ethnies différentes avaient occupé le chantier de l’usine hydroélectrique de Belo Monte et revendiqué la présence du ministre Gilberto Carvalho afin de défendre leurs droits. Valdenir Munduruku déplore l’absence de négociation : « Cette décision du gouvernement fédéral de ne pas nous écouter et d’envoyer ce mandat montre une fois de plus qu’il ne s’intéresse pas à la résolution des problèmes liés à la question indigène. Nous allons poursuivre ce combat, parce que nous subissons l’impact de ces travaux et que nous devons lutter pour nos droits ».

Entretien

IHU On-Line Comment les Indiens qui campent sur le chantier de Belo Monte ont-ils reçu la nouvelle du mandat de retrait ?

Valdenir Munduruku – Nous avons été surpris par cette décision, parce que jusqu’à présent, nous étions en pleine négociation avec le gouvernement. Nous avons reçu hier une lettre du gouvernement et avons demandé un délai pour y répondre, mais le soir même, nous avons reçu la nouvelle du mandat de retrait. Nous campons toujours pacifiquement sur le chantier et attendons qu’un représentant de la justice vienne nous présenter le mandat.

IHU On-Line – Quel était le contenu de la lettre envoyée par le gouvernement fédéral ?

Valdenir Munduruku – La lettre disait que le gouvernement était disposé à dialoguer, à organiser une réunion avec les communautés indigènes et à effectuer des consultations préalables, à condition que nous cessions l’occupation du chantier. Il était très clair que cette lettre ne répondait pas à nos revendications.

IHU On-Line – Comment le Ministère public fédéral a-t-il réagi à ce mandat de retrait du chantier ?

Valdenir Munduruku – Le Ministère public essaie de retourner la situation, ne serait-ce que parce que ce mandat est basé sur des informations qui ne sont pas vraies, à savoir, que nous empêchons les travailleurs de sortir et d’entrer sur le chantier, que nous dégradons le patrimoine de l’entreprise. Or il a été prouvé au cours de ces derniers jours de dialogue que cela n’était pas vrai. Nous avons campé pacifiquement pendant sept jours. Nous aimerions que le ministre Gilberto Carvalho vienne ici sur le chantier, pour lui donner en main propre nos revendications, afin qu’il nous dise directement quelles actions sont possibles et lesquelles ne le sont pas. Malheureusement, il semble que le dialogue avec lui ne soit pas possible. Il ne nous reste plus qu’à attendre et voir ce qui va se passer dans les jours qui viennent.

IHU On-Line – Comment les ouvriers du chantier ont-ils réagi à l’occupation ?

Valdenir Munduruku – Les ouvriers soutiennent entièrement notre combat, parce qu’ils comprennent notre souffrance et nos droits. Plusieurs d’entre eux ont fait des déclarations favorables à notre cause. Eux-mêmes ont déjà manifesté plusieurs fois pour revendiquer le respect de leurs droits. Nous avons de bonnes relations avec les ouvriers et à aucun moment il n’y a eu entre nous de conflit.

IHU On-Line – D’après la presse, l’usage des forces de police a été autorisé pour retirer les Indiens du campement en cas de résistance. Comment la police s’est-elle comportée durant cette semaine de manifestations ?

Valdenir Munduruku – Les policiers de la Force nationale de sécurité et de la police militaire sont ici dans la région, et en ce moment plusieurs d’entre eux se trouvent sur le chantier. Néanmoins, il n’y a eu aucun conflit.

IHU On-Line – Quelles nouvelles actions envisagez-vous à partir d’aujourd’hui, suite à ce mandat de retrait du chantier ?

Valdenir Munduruku – Dans un premier temps, nous attendons de recevoir la notification du mandat judiciaire et dès sa réception, nous quitterons le chantier et chercherons de nouvelles façons de lutter pour nos droits.

IHU On-Line – Quel est votre sentiment face à une tentative de dialogue avec le gouvernement brésilien à nouveau avortée ?

Valdenir Munduruku – Je regrette vraiment que le gouvernement brésilien nous démontre qu’il ne cherche pas à respecter les droits indigènes. Nous campons ici et ne revendiquons rien d’autre que nos droits. Nous ne sommes pas là pour demander des bateaux ou des voitures. Nous ne revendiquons que ce qui nous appartient, qui est inscrit dans la loi. Cette décision du gouvernement fédéral de ne pas nous écouter et d’envoyer ce mandat montre une fois de plus qu’il ne s’intéresse pas à la résolution des problèmes liés à la question indigène. Nous allons poursuivre ce combat, parce que nous subissons l’impact de ces travaux et que nous devons lutter pour nos droits, pour montrer à la société que tout ne se passe pas comme le prétend le gouvernement quand il dit que les droits indigènes sont respectés, et pour montrer qu’il ne répond pas aux demandes de notre communauté.

IHU On-Line – Où en est le projet hydroélectrique du complexe de Teles Pires ? Y a-t-il eu une négociation avec vous ?

Valdenir Munduruku – Les techniciens sont en train d’effectuer des études, mais ils ne nous ont pas consultés. Les forces de police sont là pour garantir la sécurité des chercheurs et elles envahissent notre territoire. C’est vraiment révoltant. Nous avons déjà vu que le gouvernement était capable de tout lorsqu’il veut parvenir à ses fins, et qu’il fait tuer des gens si nécessaire, comme cela s’est produit dans mon village de Teles Pires lors de l’opération Eldorado, au cours de laquelle un Indien a été assassiné. Nous n’accordons aucune confiance aux forces de sécurité ni à la police fédérale. Il existe bien sûr des personnes bienveillantes et sincères, mais tant d’autres ne souhaitent pas savoir ce qui se passe et se contentent de suivre les ordres du gouvernement.

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