La conversion évangélique des Kayapó suscite des inquiétudes quant à l’abandon de la culture traditionnelle.

 | Par Kokokaroti Txukahamãe

Source : Agência Pública
18 octobre 2024
Par : Kokokaroti Txukahamãe
Traduction : Roger Guilloux
Relecture : Adrien Sainty

Façade d’une église évangélique dans le territoire de Kayapó

Reportage : Sur les Terres Autochtones Capoto/Jarina (Mato Grosso, MT) et Kayapó (Para, PA), des autochtones formés par des missionnaires implantent des églises dans les villages.

Depuis 2010, alors que j’avais 9 ans, j’ai été témoin de la présence croissante de représentants d’églises évangéliques sur mon territoire, la terre autochtone Capoto/Jarina, dans le nord du Mato Grosso. C’est dans le village de Kapot, où ma famille vit encore aujourd’hui, que la première église évangélique de notre terre a été créée, en 2009. Au début, peu de membres de ma famille ont accepté ou adhéré à ses doctrines, mais le mouvement a rapidement pris de l’ampleur, de manière incontrôlable. Des pasteurs et des missionnaires ont commencé à s’installer sur notre territoire, enseignant des chants et des doctrines évangéliques dans notre langue et influençant de plus en plus la façon de penser de ma communauté.

Carte montrant la localisation de la terre autochtone Capoto/Jarina, du peuple Kayapó, dans le Mato Grosso.

Mon inquiétude s’est accrue lorsque j’ai réalisé que nos manifestations culturelles, qui auparavant étaient très marquantes, perdaient de leur vigueur. Pour nos parents, la nouvelle perception du monde a, en quelque sorte, simplifié les choses comme si tout était, selon les prêches des églises, une question de choix entre le bien et le mal. Comme dans l’histoire d’Eve et d’Adam, dont les yeux se sont ouverts après avoir croqué le fruit du péché, après avoir été trompés par le serpent : Eve a commencé à avoir honte d’être nue ... C’est comme si nos parents commençaient à sentir qu’ils péchaient parce qu’ils étaient nus lors des danses traditionnelles, comme nos ancêtres avaient l’habitude de le faire.

Le dernier rassemblement connu sous le nom d’Appel du Cacique Raoni [1] convoquée par notre leader le plus connu de la Terre Autochtone Capoto/Jarina, s’est tenu en 2023 dans le village de Piaraçu. Cet événement a réuni des représentants de peuples autochtones de tout le Brésil qui ont évoqué les défis qu’ils rencontrent dans leurs territoires. Chaque peuple est arrivé en présentant un chant traditionnel d’auto-affirmation et de bienvenue. Ce jour-là, un représentant du peuple Mebengõkrê Kayapó, de la terre autochtone Kayapó (Pará), a présenté un chant chrétien dans notre langue maternelle. Les dirigeants présents ont été déçus par cet abandon des chants traditionnels, qui sont si importants lors des moments d’union et de lutte avec d’autres peuples.

En tant que militante aux côtés des dirigeants, j’ai compris que cette présence évangélique s’est beaucoup développée par le biais d’activités culturelles. Il y a de plus en plus d’événements organisés par les églises, et les jeunes générations grandissent endoctrinées par les pasteurs et avec de moins en moins de pratique (culturelle) Mekukradja, notre façon de penser avec nos aînés. Nous sommes la jeunesse ! Nos aînés attendent de nous que, d’une manière ou d’une autre, nous gardions et transmettions la connaissance de nos origines, Mebengõkrê kukradja (culture des Kayapó), à la génération suivante.

Évangéliques kayapó dans l’église du village de Kapot (Terre Autochtone Capoto/Jarina - MT)

De nombreuses questions demeurent. D’où viennent ces églises ? Que recherchent-elles quand elles manipulent nos pensées et pourquoi veulent-elles changer notre façon d’être ? Pourquoi mon peuple accepte-t-il passivement ce processus ? Pourquoi ne le perçoit-il pas comme une menace ? Quelles sont les similitudes entre les processus de colonisation et le mode de catéchisation des églises, qui ont commencé avec l’arrivée des Européens sur nos territoires, en l’an 1500 ?

Au Pará, là où tout a commencé

Mokuka Kayapó, leader de la Terre Autochtone Kayapó du Pará, fondateur du village de Moikarako et premier cinéaste autochtone du peuple Mebengõkrê Kayapó, raconte que les premiers missionnaires évangéliques sont arrivés dans le village de Kubenkrakei dans les années 1960. Leur mission était de traduire la Bible en langue Kayapó. "À l’époque, nous ne connaissions pas bien la langue portugaise et nous n’avons pas beaucoup participé à la traduction de la Bible ni au premier chant que le missionnaire Horácio a produit", explique-t-il.

Le pasteur Kaijôre Kayapó du village de Gorotire (Terre Autochtone Kayapó-PA) (à gauche sur la photo) et Bepkimeiti Metuktire (à droite), pasteur responsable de l’église évangélique du village de Kapot (Terre Autochtone Capoto/Jarina - MT), lors de la première réunion des évangéliques autochtones dans le village de Metuktire (Terre Autochtone Capoto/Jarina - MT), en 2022.

Le site web de la Mission évangélique destiné aux populations autochtones du Brésil (Meib), une sorte de consortium regroupant divers groupes dédiés à la conversion des peuples autochtones, explique que cette entité a été créée en 1967 à l’initiative de missionnaires étrangers. Dès le début, les Kayapó ont été parmi les principaux peuples ciblés par ces groupes de missionnaires. Mais aujourd’hui, selon la Meib, la stratégie a changé et ne consiste plus à emmener les missionnaires sur les Terres Autochtones. "Aujourd’hui, le travail d’implantation et de construction d’églises locales est entièrement réalisé par des leaders des ethnies Guajajara, Kayapó et Xicrin", peut-on lire sur son site Internet. Il indique également que, de temps à autre, des missionnaires passent dans des villages du Pará et du Maranhão.

Mon travail de cinéaste au sein du collectif Beture [2], dans huit villages, m’a donné l’occasion d’en savoir plus sur la croissance des églises et l’arrivée des missionnaires. Selon les anciens, qui privilégient les coutumes traditionnelles, la menace est grande. Aujourd’hui, dans plusieurs villages, il est courant de voir des parents kayapó qui restent dans les églises pour participer au culte au moment où des danses traditionnelles se déroulent à l’extérieur. Dans les villages d’Aukre et de Moikárako, où commençaient les fêtes des femmes (Menire Biok et la fête Bokaingó), j’ai réalisé que les églises organisaient des événements spéciaux aux mêmes dates que les fêtes traditionnelles, à titre d’exemple, des congrès de femmes ou même des cultes habituels, comme ceux qui ont lieu tous les dimanches. Pendant que les gens chantent des chansons traditionnelles dans la cour du village, les évangéliques chantent des hymnes, des louanges et des prières dans l’église pour que Dieu les bénisse et prenne soin d’eux, et ils lisent des versets de la Bible en langue kayapó.

Fête de Bokaingo, dans le village de Moikarako (Terre Autochtone Kayapó - PA)

Dans le village d’Aukre, l’une des dirigeantes, Ngrenhkàmôrô Kayapó, m’a raconté la chose suivante : « [Ce jour-là], c’était la fête traditionnelle des femmes (Menire Biok). Nous avons la coutume d’apporter du bois de chauffage, de le laisser devant la maison des responsables de la fête et de répéter nos chants. J’ai vu qu’il y avait un congrès de femmes [réunion d’évangéliques] et j’ai regretté l’absence d’un grand nombre d’entre elles à notre fête."

"En tant que femme dirigeante, j’encourage tout le monde à pratiquer nos traditions, à faire des coupes de cheveux traditionnelles, de la peinture corporelle et la corde sur les jambes de nos enfants. Nous ne pouvons pas mettre de côté ce que nous avons appris de nos grands-parents, parce qu’il est important d’enseigner aux enfants les connaissances qui nous viennent de nos ancêtres".

Tore Metuktire, femme dirigeante et ancienne du village de Kapot, (Terre Autochtone de Capoto/Jarina), se souvient du processus de progression des évangéliques parmi les Kayapó : "Dans les années 1970, j’avais 8 ans et je me promenais avec mes grands-parents qui m’ont fait découvrir les histoires des missionnaires qui sont arrivés sur notre territoire. Ils ont longé une rivière et ont eu des contacts avec d’autres peuples qui se trouvaient sur le chemin qui mène à la rivière Xingu… Lorsqu’ils sont arrivés à la Terre, ils ont commencé leur ministère dans le village qui s’appelait Poroi, qui conduit au village de Metuktire. Ils ont fait tout ce qu’on leur avait enseigné : prendre la parole, prêcher, sauver et ouvrir des églises pour former d’autres hommes et femmes à prendre la parole. Et puis, à partir de là, les églises se sont répandues."

Tore a commencé à assister aux offices, mais elle se souvient qu’au début, il n’y avait pas d’églises. "Nous nous réunissions toujours dans une maison le soir pour adorer Dieu avec des chants dans notre langue, il n’y avait pas de maisons d’église, et il n’y avait pas autant de gens qu’aujourd’hui."

Des évangéliques autochtones parlent de la naissance de Jésus avec les enfants du village Kapot (Terre Autochtone Capoto/Jarina - MT) la veille de Noël 2023.

Aujourd’hui, j’ai appris que des églises évangéliques ont été construites dans au moins cinq des huit villages de la Terre Autochtone Kayapó du Pará et dans trois des douze villages de la Terre Autochtone Capoto/Jarina : Piaraçu, Metuktire et Kapot, les trois plus grands. Les chefs de village disent qu’ils ne sont pas favorables à la présence de non-autochtones dans les villages pour promouvoir la formation d’évangéliques locaux. Dans le village de Kapot, où la première église de la Terre Autochtone Capoto Capoto/Jarina a été construite en 2009, le temple s’appelle Jeju inho kikre (Maison de Dieu, en langue kayapó) et Bepka_êkti Metuktire en est le responsable.

Rencontres avec Dieu

Maprin Metuktire, 33 ans, est né, a grandi et s’est marié dans le village de Kapot de la Terre Autochtone Capoto/Jarina du peuple Mebengõkrê Kayapó. Il y a environ deux ans, il s’est installé dans la ville de Colíder (MT). Il dit qu’il est devenu un ‘ouvrier-messager’ de la parole de Dieu après s’être rapproché de l’Église presbytérienne renouvelée.
"Au cours des fêtes traditionnelles des villages, on commet des péchés, comme boire de l’alcool, trahir... Je n’avais pas la maturité nécessaire quand j’étais jeune : j’ai fini par pécher, me saouler avec des parents pendant les fêtes traditionnelles, tromper ma femme et fumer", dit-il. Ses regrets l’ont amené à devenir chrétien. "J’ai abandonné mes habitudes depuis que j’ai trouvé Dieu."

Jakuri, pasteur Kayapó, lors d’une réunion de femmes évangéliques dans le village d’Aukre (Terre Autochtone Kayapó - PA)

Maprin est l’un des nombreux autochtones kayapó du Mato Grosso qui se sont rapprochés des églises évangéliques ces dernières années. Il n’y a pas de mission autorisée à opérer sur le territoire de Capoto/Jarina, que ce soit par les dirigeants kayapó ou par la Fondation nationale pour les peuples autochtones (FUNAI). Le processus de conversion commence aujourd’hui dans les villages eux-mêmes, là où il y a déjà des églises dirigées par des évangéliques locaux. Il se produit aussi dans les villes proches des Terre Autochtone, où beaucoup d’autochtones vivent maintenant en raison des possibilités d’études ou d’emploi dans les services publics.

"Je me suis installé en ville pour me rapprocher de l’église", dit Maprin. "J’ai ouvert ma maison à une femme non-autochtone de l’Église presbytérienne renouvelée de Colíder pour qu’elle organise des services pour les parents kayapó qui vivent en ville ; ils se sentent perdus et veulent changer de vie."

Il raconte comment se déroule le processus d’évangélisation lors de ces réunions : "Moi et quelques parents qui m’aident dans l’organisation du culte, nous traduisons chaque parole du Christ que la femme transmet. Un jour, quand je serai prêt, je commencerai à transmettre la parole de Dieu, et la femme accompagnera mon apprentissage pendant les cultes que j’irai diriger chez moi."

"Dans le village, il y a ceux qui sont avancés dans leur pratique religieuse. Ils organisent des cultes et observent les convertis pour dire quand tel parent est suffisamment préparé pour être à habilité à transmettre la parole de Dieu."

Maprin reconnaît que ce processus d’évangélisation a généré des conflits dans les villages : "Tous ceux qui croient sont détestés, même par leurs propres parents. J’ai entendu certaines personnes parler de la culture locale, du fait que les parents qui se sont rapprochés des églises ont abandonné leurs traditions. Mais je pense qu’ils disent cela pour essayer de nous éloigner de Dieu, je pense qu’ils veulent que nous continuions sur cette voie pleine de violence, de consommation d’alcool, de préjugés et de machisme au sein de la communauté."

Même s’il prône un changement de comportement, Maprin affirme ne pas être contre la culture traditionnelle kayapó en tant que telle. "J’ai toujours participé aux fêtes traditionnelles lorsque j’étais au village. Ces traditions de la culture Mebengõkrê sont dans notre sang depuis que nous sommes nés, et je ne pense pas qu’il soit nécessaire d’essayer de les changer, car Dieu nous a choisis ainsi."

Le principal responsable de la conversion de Maprin est Bepka_êkti Metuktire, 37 ans. Il vit également dans le village de Kapot, d’où est originaire Maprin, et y dirige l’église dont il est le principal référent, comme nous l’avons déjà mentionné. Bepka raconte que le processus d’évangélisation des Kayapó de Capoto/Jarina a commencé dans la Terre Autochtone Kayapó, située dans le Pará. "Je suis devenu le leader et le pasteur de l’église qui a été fondée en 2008 par deux parents Kayapó qui ont été appelés pour une formation pastorale à São Félix do Xingu (PA). L’événement a été organisé par les propres parents Kayapó de la Terre Autochtone, qui se sont engagés à faire connaître le Christ aux personnes qu’ils rencontraient, ainsi qu’à recevoir une formation pour ouvrir l’église."

"Ils ont également dû apprendre les règles à respecter pour devenir des ‘ouvriers-messagers’ de la parole du Christ", poursuit-il. "Au fil du temps, les parents qui ont entamé le processus de conversion ont appris à résister à la tentation du péché, ce qui leur a permis de commencer une nouvelle vie. Ils se sont progressivement éloignés de l’ancien mode de vie pour en adopter un autre qui leur a permis de poursuivre le processus d’intégration à l’église."

C’est alors que Bepka est devenu responsable du projet d’évangélisation : "Je traversais des moments difficiles dans ma vie, avec une maladie qui consumait mon corps. J’ai fini par rêver que Dieu me guérissait, ce qui m’a permis de chercher Dieu.".

"Aujourd’hui, c’est moi qui m’occupe de l’église, organise les cultes et le nettoyage du matériel reçu de l’Église presbytérienne renouvelée. Et avec le reste de l’équipe, nous nous réunissons pour réfléchir aux thèmes qui seront présentés lors des cultes."

Jakuri Kayapó est le pasteur de l’église du village d’Aukre, de la Terre Autochtone Kayapó du Pará. Depuis son plus jeune âge, il a pour objectif de répandre la parole du Christ parmi les Kayapó : "Dieu a prévu que nous naissions en tant que peuple autochtone. Chaque peuple a sa propre culture, et nous, les Mebengõkrê, nous cherchons Dieu, mais nous continuons à suivre nos coutumes traditionnelles.". "Chacun a un but dans la vie, et moi, je me suis préparé à suivre le chemin que Dieu m’a donné. Il m’a permis de changer, en éliminant de ma vie les pensées pécheresses et les mensonges."

Pour ce pasteur, il n’y a pas de contradiction entre les différents éléments de la culture traditionnelle kayapó et la religion : "En fait, nous devons être dans les églises avec nos peintures traditionnelles et nos accessoires pour entendre la parole du Christ, c’est le chemin que nous devons suivre."

Bien que les évangéliques kayapos interrogés dans le cadre du reportage déclarent ne rien avoir contre la culture traditionnelle de notre peuple, ils cessent de participer à nos rituels et à nos fêtes à des moments importants. C’est le cas avec les cérémonies nocturnes, qu’ils considèrent comme un péché parce qu’elles impliquent la consommation de boissons alcoolisées, telles que le Kwyrykango (fabriqué à partir de manioc). Bepka explique cette position de la manière suivante, "Pendant les fêtes traditionnelles, nous quittons l’église pour rejoindre la communauté, mais lorsque nous avons un congrès [une réunion d’évangéliques], lorsque d’autres parents sont dans notre village, ou lorsqu’il y a des répétitions de chansons traditionnelles la nuit, nous nous réunissons pour parler du Christ, à cause des péchés qui peuvent être pratiqués.".

L’avenir

Pour parler des impacts possibles de cette conversion sur l’avenir des Kayapó, j’ai interviewé deux de nos chefs les plus célèbres, les chefs Megaron Txukarramãe et Raoni Metuktire. Je voulais entendre les réflexions de chefs qui ont les yeux de nos ancêtres, car ce sont eux qui sont les porteurs de nombreuses histoires du peuple Mebengõkrê d’autrefois et qui se préoccupent de l’avenir de la génération qui les remplacera.

L’appel du chef Raoni, lors d’une réunion tenue dans le village de Piaraçu (Terre Autochtone Capoto/Jarina - MT) en 2023

Le chef Raoni Metuktire, connu pour son combat en faveur de la préservation de l’Amazonie et de la protection des territoires, est l’une des voix les plus connues de la lutte des peuples autochtones. Lorsque je lui ai demandé ce qu’il pensait de l’avancée des églises, il m’a répondu de la manière suivante :

« En regardant vers l’avenir, je ressens une sorte de tristesse à l’idée que les évangéliques remplacent nos traditions et nos chants traditionnels par ces chants chrétiens dans la langue traditionnelle. Je ne parle pas seulement pour le peuple Mebengõkrê Kayapó, mais pour tous ceux qui ont perdu les caractéristiques de leur peuple depuis le premier contact avec les non-autochtones et qui, aujourd’hui, luttent au péril de leur vie pour récupérer leurs territoires et leur langue maternelle."

"Mon parcours dans la lutte pour les peuples autochtones a commencé aux côtés des frères Villas-Bôas [3], qui m’ont appris la langue portugaise des Kuben (peuples non-autochtones). Ils m’ont surtout permis de comprendre les visées des églises qui s’étaient multipliées dans la plupart des villages autochtones. A cette époque, il y avait des conflits entre les groupes ethniques à cause de l’occupation des terres et ceux qui ne voulaient pas laisser les Kuben s’approcher de leurs peuples. Dans certains villages, les terres étaient exploitées par des mineurs et des bûcherons qui n’hésitaient pas à embaucher la population locale."

"Certains kuben ne veulent pas que nous soyons reconnus comme autochtones. J’ai donc compris l’importance de la construction d’une union entre les peuples et, dès ma jeunesse, j’ai commencé à voyager pour convaincre les autres. Car nous sommes les seuls à avoir la force de défendre nos terres et nos droits. Etant donné la façon dont l’Église agit et l’attitude du monde contemporain qui nous diminue encore plus en tant que peuples autochtones, nous ne pouvons pas permettre à une culture qui ne soit pas la nôtre, de remplacer ce qui fait partie de notre identité."

« Il est triste de constater que nous en sommes arrivés à ce point où tant de forêts sont détruites par les incendies. Nous avons encore de la force, nous devons préserver nos droits, nous devons maintenir notre souveraineté, nous avons besoin que notre culture soit respectée ! Nous devons protéger la forêt pour que nos enfants et nos petits-enfants puissent exister, car sans elle, nous n’existerions pas. Nous voulons que notre culture soit respectée sur notre territoire, nous voulons vivre comme nos parents et nos ancêtres nous ont appris à le faire."

Le chef Megaron Txukarramãe a déclaré ceci :

"Je vois des changements chez les parents qui vont à la ville et reviennent chez eux dans les villages. Nous savons que chaque peuple a ses propres coutumes, comme les festivals, la nourriture, les rituels, etc. Aujourd’hui, presque personne ne partage nos traditions, ne les perpétue. Dans le passé, il y avait une force et une volonté d’organiser une fête pour que tout le monde puisse participer et montrer la force qui coule dans nos veines. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Nous sommes souvent considérés comme de ‘faux autochtones’ par les Blancs parce que nous sommes dans les villes et non dans les villages. Je suis inquiet pour ceux qui vivent dans les villes et qui entendent beaucoup d’horreurs ; nous sommes victimes de beaucoup de préjugés et tout cela, c’est un danger pour la santé mentale des enfants et des jeunes."

"On dit que si l’on devient membre d’une église, on peut changer. Pourquoi cela ne se traduit-il pas dans les faits ? Je vois beaucoup de gens qui sont entrés dans des églises et qui continuent à commettre des violences, à abuser, à boire, à tromper leur femme, etc. Ils jouent les innocents."

Ils ont traduit la Bible sans avoir une connaissance approfondie du peuple Mebengõkrê et sans la participation des parents. Nous devons écrire un livre pour faire connaitre la diversité et la richesse de notre culture et ne pas permettre aux Blancs de nous imposer la leur. Nous ne pouvons pas leur permettre de remplacer nos traditions. Nous ne voulons pas qu’ils nous apprennent et nous imposent leur manière de vivre nos cultures.

Nos territoires sont sacrés, pleins d’histoires, et nous ne pouvons permettre à aucun Blanc d’entrer et d’essayer de nous les enlever. C’est ici que nous respirons encore bien et que nous mangeons des aliments sains cultivés par nos propres mains.

Il n’est pas bon que les églises, les missions religieuses, pénètrent dans notre région, sur notre terre, pour changer nos coutumes. C’est très dangereux, très mauvais pour nos rituels, nos connaissances, notre langue, pour nous en tant que peuples originaires du Brésil. Nous devons conserver nos coutumes. Je suis également très inquiet de ce changement qui est en train de se produire, et nous ne voulons pas que notre peuple change et mette fin à nos coutumes".

L’auteure, Kokokaroti Txukahamãe Metuktire, 23 ans, est une communicatrice populaire du peuple Kayapó qui vit dans le village de Kapot, sur les terres autochtones de Capoto/Jarina (Mato Grosso). Elle travaille dans les médias sociaux en tant qu’influenceuse et est membre du collectif audiovisuel Beture.

Rédaction : Spensy Pimentel

Voir en ligne : Article original en portugais

[1Le cacique Raoni, sans doute âgé d’environ 90 ans, a dédié sa vie au combat contre la déforestation de l’Amazonie et l’accaparement de ses terres par « l’homme blanc ». Des luttes qui, bien loin d’avoir été gagnées, méritent, encore aujourd’hui, d’être portées sur la scène internationale pour être entendues.

[2Colectivo Beture. C’est un collectif de jeunes cinéastes autochtones Mẽbêngôkre, dont l’activité consiste à filmer la vie et la culture du peuple Kayapó. Beture est le nom de fourmis rouges et noires qui travaillent en groupe et dont la morsure est très douloureuse.

[3Les frères Villas-Bôas – Orlando, Cláudio e Leonardo – ont été d’importants explorateurs brésiliens et des défenseurs de la cause autochtone.

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