Dans la matinée du jeudi 19 décembre 2024, des représentants des organisations Autres Brésils, France Amérique Latine (FAL) et CRID, soutenues par diverses entités de défense des droits humains et environnementaux, ont envoyé une lettre ouverte au président Luiz Inácio Lula da Silva. Cette initiative a eu lieu à l’ambassade du Brésil à Paris et a mis en lumière les inquiétudes face aux conditions alarmantes auxquelles sont confrontés les peuples autochtones Guarani-Kaiowá et Terena.
La lettre, signée par des 14 associations, collectifs et syndicats, dénonce l’escalade de violences et les violations des droits fondamentaux des communautés autochtones. Elle rappelle l’attaque survenue en novembre dans la réserve de Dourados, au Mato Grosso do Sul, où une manifestation pacifique a été violemment réprimée par la police militaire. Des bombes lacrymogènes, des tirs à bout portant et des arrestations arbitraires ont marqué cet épisode, intensifiant la terreur vécue par ces populations.
Les signataires soulignent l’urgence d’actions concrètes, notamment l’accélération de la démarcation des terres autochtones, le renforcement des moyens d’action du Ministère des Peuples Autochtones et la FUNAI, l’élargissement de l’accès aux ressources essentielles comme l’eau potable et les soins de santé, ainsi que la garantie de protection contre les invasions et agressions. Ils insistent sur le fait que ces mesures sont indispensables non seulement pour assurer la survie de ces peuples, mais aussi pour renforcer la crédibilité internationale du Brésil, en particulier à l’approche de la COP30 à Belém en 2025.
Voici, en intégralité, le texte de la lettre remise au président Lula :
Lettre ouverte au président Luiz Inácio Lula da Silva
Monsieur le Président,
Nous, organisations françaises de solidarité internationale, vous adressons cette lettre pour exprimer notre profonde inquiétude face à la situation dramatique des peuples Guarani Kaiowá et Terena. Ces peuples, depuis des décennies, subissent des violences systématiques en raison de conflits fonciers exacerbés par la lenteur des processus de démarcation de leurs territoires traditionnels.
La récente attaque survenue dans la Réserve de Dourados, au Mato Grosso do Sul, illustre tragiquement cette réalité. Le 27 novembre dernier, une manifestation pacifique dénonçant le manque chronique d’eau a été réprimée par la Troupe de choc de la Police militaire, entraînant des violences inacceptables. Des grenades lacrymogènes ont été lancées jusque dans les habitations, des tirs à bout portant ont blessé gravement des femmes et des enfants, et plusieurs arrestations arbitraires ont été effectuées. Ces actes ont semé la terreur parmi les habitants, violant leurs droits fondamentaux et la constitution brésilienne qui place les territoires autochtones sous juridiction fédérale.
Cette attaque s’inscrit dans un contexte plus large d’escalade de violences. Les Guarani Kaiowá et Terena subissent des expulsions illégales, des menaces de mort, des agressions armées et des restrictions d’accès à l’eau et à la nourriture. Ces conditions dégradantes, aggravées par l’impunité dont bénéficient souvent les auteurs des violences, remettent en cause leur survie, leur culture et leur dignité.
À l’approche de la COP 30, qui se tiendra à Belém en 2025, il est vital que le Brésil démontre un engagement ferme envers les droits des peuples autochtones, les principaux défenseurs aujourd’hui des écosystèmes comme l’atteste plusieurs études récentes. Nous vous exhortons à :
- Accélérer la démarcation et la reconnaissance des territoires autochtones, en veillant à protéger les terres indigènes contre les invasions et expulsions illégales.
- Renforcer les moyens institutionnels du Ministère des Peuples Autochtones et de la FUNAI, pour garantir l’accès aux droits, la sécurité et la protection des populations concernées.
- Mener des enquêtes approfondies sur les attaques et poursuivre les responsables des violences, en luttant activement contre l’impunité qui alimente ces violences.
- Renforcer les programmes d’accès aux droits et ressources essentielles, comme l’eau potable et les soins de santé, pour répondre aux besoins fondamentaux de ces communautés.
Monsieur le Président, il est de votre devoir de garantir que les peuples autochtones, qui incarnent une partie essentielle de la diversité et de l’héritage culturel du Brésil, outre leur importance fondamentale dans la défense et préservation de la planète, puissent vivre en sécurité et avec dignité. Les actions concrètes que vous entreprendrez seront déterminantes pour renforcer la crédibilité du Brésil à l’échelle internationale et honorer les engagements pris en faveur des droits humains, de la lutte contre le changement climatique et pour la justice climatique.
Respectueusement,
Signataires : Amar Brasil, Attac, Autres Brésils, Collectif Bassines Non Merci 79, CRID, CSIA-Nitassinan, France Amérique Latine, Greenpeace France, RED-Br, Secours Catholique, Solidaires 79, Survival International, TEJE, Union Syndicale Solidaires.