Feu à volonté !

 | Par Ivan du Roy

Stupéfaction. Lors du référendum du 23 octobre, une majorité de Brésiliens ont rejeté le projet d’interdire la vente d’armes à feu aux civils. En d’autres termes, 64% des votants approuvent implicitement les violences par armes à feu qui ravagent le pays, au rythme d’un mort tous les quarts d’heure ! 36 000 par an... Cette proposition ne comprenait pourtant aucun enjeu politique partisan. Le projet de loi avait été concocté par des ONG travaillant sur les problèmes de violences urbaines et avait été repris par le gouvernement.

Stupéfaction, dans un pays où les règlements de compte, où les affrontements entre gangs et polices, où les victimes de balles perdues, où les assassinats de leaders associatifs et syndicaux, font très régulièrement la une des journaux télévisés et remplissent les pages de faits divers. Cette proposition de loi n’aurait bien sûr pas réglé tous les problèmes, loin de là. Mais elle avait valeur de symbole : refuser la déferlante de violence. La population avait le choix de crier « plus jamais ça ! » à la face des mafias, des policiers corrompus, des propriétaires terriens et de leurs pistoleros, des mâles machos en quête de reconnaissance pour qui armes à feu est synonyme de virilité, prêts à dégainer au moindre regard mal interprété (plus d’un homicide par balles sur quatre est dû à une vengeance personnelle). Les deux tiers du Brésil leur ont au contraire dit : « Allez-y, continuez ! »

Stupéfaction. Une image me vient à l’esprit : celle de ce gamin, de 13 ou 14 ans, tranquillement assis sur une pierre au détour d’un sentier gravissant la favela de Santa Marta, au coeur de Rio. Ce gamin regarde avec admiration et fierté le Beretta qu’il tient entre ses mains. L’arme le fait exister. On le respecte et on le craint. Quelle promotion sociale pour ce gamin abandonné des pouvoirs publics ! C’est ce modèle de société qui vient d’être approuvé. Un modèle où, que vous soyez « soldados » d’un gang carioca ou homme de main d’un grand propriétaire du Mato Grosso, la possession d’une arme signifie pouvoir et reconnaissance sociale. « Droit à la légitime défense », invoqueront ceux qui critiquent les lacunes de l’Etat en matière de sécurité publique. Pouvoir de donner la mort plutôt, dans un Etat rendu déliquescent par ceux qui ont eu le pouvoir par les armes, la junte militaire soutenue par les grands propriétaires. Triste symbole.

Ivan du Roy - journaliste à Témoignage Chrétien - Octobre 2005

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