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Par Kakie Roubaud
Photos : Agência Brasil
Rio de Janeiro - 11/12/ 09
Voilà une bonne nouvelle qui ne devrait pas gâcher la fête des Brésiliens à Copenhague. La déforestation de l’Amazonie est en recul. L’Inpe (Institut National de Recherches Spatiales) a présenté les résultats de son monitoring annuel. Les chiffres sont en chute libre. En 2007/2008, les émissions sont tombées à 500 millions de tonnes de CO2 par an .
Ces dix dernières années, 7 à 800 millions de tonnes étaient rejetés chaque année dans l’atmosphère . Un recul historique ! Désormais, le déboisement de l’Amazonie n’est plus responsable que de 2% des émissions mondiales de CO 2 . On a presque envie de dire « seulement » !
« Avec des indices de croissance économique à la hausse et un déboisement à la baisse, le Brésil montre sa détermination à faire sa part » s’enthousiasmait il y a quinze jours l’ancien gouverneur de l’Acre, Jorge Viana, dans les pages « Opinio » de O Globo. Le choix d’une économie privilégiant l’insertion sociale tout en étant peu émettrice en carbone, de même que les engagements volontaires présentés à Copenhague, placent le Brésil à l’avant-garde mondiale de la durabilité » pouvait-on encore lire sous la plume de cet ancien ingénieur des Eaux et Forêts. Son Etat, à la frontière de la Bolivie et du Pérou, est pionnier dans la lutte contre la déforestation.
C’est le plus net recul national du déboisement enregistré en 21 ans, depuis que l’Inpe contrôle l’activité forestière de la région par satellite : 7 000 km2 soit malgré tout, la surface du District Fédéral plus la ville de São Paulo ! Le pic de la déforestation avait été enregistré en 2004 avec plus de 27 000 km2 « nettoyés » et partis en fumée.
La culture locale traditionnelle enseignait jusqu’ici qu’un bon arbre est un arbre mort et qu’un bon terrain est un terrain « propre ». Culture désormais battue en brèche par des concepts nouveaux comme la florestania de l’Acre, qui placent l’homme mais aussi les grands arbres, au centre de l’action politique de certains gouvernements.
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Des sept Etats qui composent l’Amazonie Légale , le plus touché par la déforestation est le Para, état côtier sur l’Atlantique dont la capitale est Belém. En 2009, il totalise, 3 687 km2 de forêt abattue, soit à lui tout seul, la moitié du déboisement survenu cette année en Amazonie !
Dans un discours enflammé Carlos Minc (dit-on, termine tous ses courriers par la phrase « salutations vertes et libertaires ») , le ministre brésilien de l’Environnement a assuré que 90% du recul de la déforestation était dû à la répression. Mais note O Globo, le directeur de l’Inpe raconte lui-même que la crise économique a eu un rôle central dans l’affaire.
Dans cette région grande comme l’Europe , vivent 25 millions de brésiliens, une population presque équivalente à la moitié de la France. Aussi les réalités et les raisons pour expliquer ce recul sont nombreuses. Crise économique bien sûr, intensification de la répression certainement, propositions alternatives à l’élevage aussi : outre l’intensification des pâturages existants, on trouve en Amazonie des cueilleurs de Noix du Para qui résistent à l’élevage et des petits agriculteurs qui plantent les arbres fruitiers en bio-dynamie .
De « ceux qui troquent 4 heures de TV contre deux tortues » à « l’industrie qui prospère sans couper un seul arbre » en passant par « les 260 usines thermoélectriques qui rejettent des gaz de diesel là où seule devrait exister une énergie propre », l’hebdomadaire Veja montre dans un numéro spécial intitulé « Amazonie : le facteur humain » que le futur de la région dépend moins des projets montés à Brasília ou de la bonne volonté des ONGs que du désir des 25 millions d’Amazoniens qui vivent en immense majorité dans les villes.
Une étude réalisée par le quotidien Folha de São Paulo démontre de son côté, chiffres à l’appui, que déforestation rime avec développement seulement à très court terme ! Dans les 50 municipalités qui ont le plus déboisé entre 2000 et 2006, l’emploi et le revenu a augmenté de 35% au delà de la moyenne régionale mais l’indice de santé est en deçà de 63%. Même chose avec l’éducation qui régresse. « L’Amazonie est coincée confirme à la Folha, Adalberto Verissimo, chercheur de l’ong Imazon mais il n’existe pas encore d’économie pour substituer le vieux modèle prédatoire »
C’est pourquoi à Copenhague, le gouvernement brésilien est aussi venu faire « son marché ». D’ici l’an prochain, il espère doubler le montant du Fundo Amazônia. Hier, Carlos Minc a annoncé les cinq premiers projets de ce fonds international pour l’Amazonie : récupération des surfaces dégradées, protection de la forêt, payements pour servies rendus à la planète. Une seule donation l’alimente pour l’instant : 1 milliard de dollars. Son donateur et principal instigateur ? L’Etat norvégien. Kakie Roubaud