« Contient des OGM »

<img554|left> Des mouvements sociaux et des ONG ont appuyé la décision du gouvernement en faveur de l’adoption du terme « Contient des OGM », qui sera défendue à la Réunion des Participants au Protocole de Cartagena sur la Biosécurité [1]. Un délai de quatre ans pour l’adaptation aux règles de ségrégation et d’identification des OGM par les sociétés exportatrices est toutefois inadmissible, affirment-ils.

Par Verena Glass - Agence Carta Maior - 14/03/2006


CURITIBA - La divulgation, dans la soirée du 13 mars 2006, de la position officielle du Brésil sur la polémique autour de la terminologie qui s’appliquera aux chargements transfrontaliers d’Organismes Vivants Génétiquement Modifiés (OVM en portugais) - la défense de l’usage du terme "Contient des OGM" là où se pratique déjà la ségrégation, avec un délai allant jusqu’à quatre ans pour la mise en adéquation, et l’autorisation de l’usage du "Peut contenir" pour ceux qui n’ont pas encore adopté le mécanisme d’identification -, a été célébrée par les organisations et mouvements sociaux comme une victoire ou une garantie partielle de biosécurité.

Ce mardi 14 mars, des entités qui font partie de la campagne « Brésil Libre de Transgéniques » ont émis une note dans laquelle ils reconnaissent l’avancée du pays par rapport à sa position précédente, favorable au « Peut contenir », mais ont condamné véhémentement le délai de quatre ans d’adaptation, dans la mesure où, selon elles, il s’est passé six ans depuis la création du Protocole de Cartagena, temps suffisant pour la mise en adéquation exigée par les mécanismes de biosécurité.

L’exigence d’étiquetage, qui fut présentée à Marina Silva, Ministre de l’Environnement, ce mardi après-midi, a deux fondements. D’après Marcelo Furtado, coordinateur de campagnes de Greenpeace, il est indispensable que le débat sur l’étiquetage cesse de se baser sur des arguments de marché, comme le veulent les entreprises transnationales de semences et les entreprises agroexportatrices - le secteur a avancé l’argument que la ségrégation et l’identification augmenteraient beaucoup les coûts de commercialisation -, et qu’il se concentre sur les aspects de la biosécurité.

Maria Rita Reis, avocate, membre de l’ONG Terre de Droits, avance que la ségrégation, en réalité, est déjà faite par les grandes entreprises agroexportatrices, soit pour obtenir de meilleurs prix pour le soja conventionnel sur le marché européen, stratégie adoptée, d’après elle, par des sociétés telles que Syngenta et Bunge, soit pour couvrir des royalties de producteurs, comme le fait Monsanto.

D’après Maria Rita Reis, la proposition d’un délai de quatre ans de mise en adéquation doit aider les entreprises dans une stratégie dangereuse, celle d’inventer la logique de l’étiquetage. «  Le risque est que la plantation de transgéniques ne se dissémine en un tel volume pendant cette période, qu’une identification contraire se fasse nécessaire : l’étiquetage des semences traditionnelles. Comme c’est le cas aujourd’hui pour les produits organiques. Le marché veut qu’une élite ait la possibilité de bien s’alimenter, et que le reste de la population soit obligé de consommer des déchets. Pendant ces quatre ans, ils veulent compter à nouveau sur le fait accompli. »


Il y a une fragilité, admet le Ministère de l’environnement

Après une période angoissante de bras de fer avec les secteurs liés à l’agrobusiness(parmi lesquels les Ministères de l’Agriculture et de la Science et de la Technologie) dans la dispute sur la position brésilienne, le Ministère de l’Environnement (MMA) obtient une victoire dans le gouvernement, bien qu’il ait défendu deux ans seulement d’adaptation pour l’étiquetage définitif.

D’après le gérant de ressources génétiques du MMA, Rubens Nodari, toutefois, la décision finale doit être envisagée comme une victoire du pays. « Elle permet un plus grand contrôle de la production, et plus de sécurité dans son maniement. Dire qu’un chargement contient telles et telles éventualités (transgéniques), avec des informations claires et précises sur le nom de la variété, le gène modifié, etc., est fondamental pour la biosécurité du pays ».

Quant à l’élévation des coûts pour les exportateurs, principale réclamation de l’agrobusiness, Nodari pense que, si l’avantage économique préconisé par les défenseurs des transgéniques est réel, il n’y aura pas de difficulté à aborder la ségrégation et l’identification. Il est clair que la libération d’un plus grand nombre de variétés transgéniques pourra rendre plus chère la ségrégation, plus de tests d’identification devant être faits, mais ce serait une option du secteur.

Sur le délai de mise en adéquation de quatre ans proposé par le gouvernement (le secteur agroexportateur voudrait cinq ans), Nodari avoue une certaine préoccupation : « La durée est peut-être exagérée. Il est possible qu’en quatre ans les secteurs opposés à l’étiquetage tentent de le mettre à bas, c’est une fragilité ».

D’un autre côté, comme le pense Marcelo Furtado, de Greenpeace, il faut faire confiance à la position politique des autres pays signataires du Protocole de Cartagena qui, à la réunion de Montréal en 2005, furent tous favorables à l’étiquetage, à l’exception du Brésil et de la Nouvelle Zélande.

Maintenant, la position brésilienne doit être évaluée par les autres délégations dans un débat plus fermé au sein du Groupe de Contact. Présentée aux pays d’Amérique Latine et des Caraïbes ce matin, la réception, d’après Nodari, en fut bonne, même de la part du Mexique, qui, la veille, s’était déclaré favorable au « Peut contenir ».

Traduction : Madeleine Jung pour Autres Brésils


Notes :

[1] [NDLR] L’objectif principal du Protocole de Cartagena sur la Biosécurité, défini en janvier 2000 dans le cadre de la Convention sur la Diversité Biologique(CDB) et entré en vigueur en septembre 2003, est de protéger la diversité biologique des risques potentiels portés par les OGM. Il définit les conditions d’échanges transfrontaliers des entités biologiques capables de transférer ou répliquer du matériel génétique comme les semences, plantes et animaux dont le patrimoine génétique a été modifié. La 8e Conférence des Parties (COP) à la Convention sur la diversité biologique s’est tenue en mars 2006 à Curitiba au Brésil. L’année dernière, au cours du dernier cycle de négociations, une puissante coalition de lobbies (commerce, industrie agroalimentaire, scientifiques) alliée aux Etats-Unis, au Canada et à l’Argentine (qui n’ont pas ratifié le Protocole), a empêché l’adoption d’une législation claire sur l’étiquetage. Et, sous cette pression, deux pays membres du Protocole, le Brésil et la Nouvelle-Zélande, ont bloqué un projet d’accord concernant l’identification des transports internationaux d’OGM destinés à l’alimentation humaine et animale ou à la transformation. Cette année, un accord sur l’identification des OGM a été trouvé : « les Parties doivent prendre les mesures nécessaires pour que la documentation accompagnant les OGM destinés à l’alimentation ou à la transformation indique notamment : dans les cas où l’identité des OGM est connue, grâce à l’utilisation de systèmes tels que les systèmes de préservation de l’identité, que la cargaison contient des OGM ; dans les cas où l’identité des OGM n’est pas connue, que la cargaison peut contenir un ou plusieurs OGM. »

L’Allemagne sera l’hôte du prochain sommet mondial sur la diversité biologique en 2008.

Pour plus d’informations, lire l’analyse des négociations faites par le GRET

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