Barbarie sociale : capitale São Paulo

 | Par João Pedro Stédile

(Article à paraître dans le journal O Dia, à Rio de Janeiro)

Chers Amis de Rio de Janeiro,

<img675|left> Lundi dernier, je suis rentré de rencontres internationales à Vienne. Une ville historique, avec un taux de chômage de 5%, où 90% des jeunes vont à l’université publique et gratuite. Il n’y a pas de bidonvilles. Et les indicateurs de violence sont insignifiants. Une ville tranquille et qui, la nuit, m’a même semblé un peu trop sombre. Il y a bien des problèmes sociaux, mais définitivement, c’est un pays avec peu de pauvreté et d’inégalité.

J’arrive à São Paulo, où j’habite, et il semblait que l’avion s’était trompé et avait atterri à Bagdad, tel était grand le climat d’appréhension, de violence, d’attentats, 81 morts en trois jours, des bombes de tous côtés. Et des mutineries dans plus de cent établissements carcéraux.

La police aculée, le gouvernement perdu, qui ment. Et la population effrayée. Certains secteurs de la presse, irresponsables, ne cherchaient qu’à faire monter leur audimat et leurs ventes : ils généraient plus de panique au sein de la population, ils demandaient plus d’armes, de répression, de prison, plus de lois, plus de guerre !!

Mais si la répression policière était la solution, il n’y aurait plus aucun problème, puisque cela fait 500 ans qu’on réprime les pauvres dans ce pays. São Paulo dispose de plus de 250 mille policiers militaires et civils, et il y a 300 milles autres hommes travaillant dans des entreprises de sécurité privée. Une armée plus grande que celle qui opère en Irak.

Mais les bandits se trompent. Et ils n’ont pas conscience de leur existence. Ils ne font que réagir à la situation qu’ils vivent. Mais ce que l’on doit comprendre, c’est pourquoi il y a à São Paulo 140 mille détenus et autant de violence.

Dans le fond, tout cela est le résultat d’une société historiquement construite sur la surexploitation des pauvres, à qui on nie tous les droits. Et de l’extrême inégalité sociale qui existe entre les pauvres et les riches. Tout cela s’est aggravé avec 15 années d’une politique économique néolibérale, qui n’a fait que marginaliser les pauvres. Comparez avec Vienne. Ici, le taux de chômage est de 25% de la population adulte. 65% des jeunes pauvres de la périphérie n’ont rien à faire. Seuls 8% des jeunes en âge d’aller à l’université peuvent entrer à la faculté. Tandis que le salaire minimum est de 350 réais, il y a 8 mille riches en ville qui dépensent plus de 30 mille réais par mois avec leurs cartes de crédit.

Avec le néolibéralisme, la solution pour les plus pauvres est la marginalité, la prison ou la migration vers d’autres pays, comme c’est le cas dans les autres pays latino-américains.

Tant que nous n’aurons pas un modèle économique qui garantisse des opportunités pour tous, de manière égalitaire, et qui permette aux pauvres d’améliorer leurs conditions de vie, le nombre d’entre eux qui s’en remettra au banditisme sera de plus en plus élevé.

Ou il y a des changements économiques et sociaux, ou la Barbarie va augmenter.


Par João Pedro Stedile, membre de la coordination nationale du MST et de la Via Campesina-Brésil

Traduction : Isabelle Dos Reis

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