« Nous, les mères des quartiers pauvres, on n’a que nos corps pour lutter. » Assise à la table d’un fast-food déserté de la Baixada Fluminense, dans la banlieue nord de Rio de Janeiro, Nivia Raposo pèse ses mots et soutient le regard. Depuis l’assassinat, en 2015, de son fils Rodrigo, elle est en lutte. Nivia est l’une des porte-voix du réseau des mères de la Baixada, un collectif de mères endeuillées, dont les enfants ont été tués par la police, des milices ou bien ont disparu.
Rodrigo avait 19 ans lorsqu’il a été abattu en pleine rue, devant la maison familiale. Nivia se remémore en détail les derniers moments de la vie de son fils. Le récit lui coûte mais, si elle vit encore aujourd’hui, c’est « pour le raconter ». Quelques jours plus tôt, un policier militaire, voisin de la famille, avait interpellé Rodrigo et tenté – sans y parvenir, de lui extorquer de l’argent. Ce voisin, contre lequel Nivia témoignera dans le cadre de l’enquête sur la mort de Rodrigo, est membre d’une milice qui sévit dans un quartier proche. Tandis que l’assassin présumé est mis en fuite par les habitants et habitantes du quartier, s’en suit, pour la famille, le trop habituel déni de justice : une enquête bâclée, puis un procès qui n’en finit plus de se faire attendre. « Je ne pense pas que mon fils n’a pas eu de chance, je pense qu’il n’a pas eu de justice » résumait récemment Nivia dans une lettre publique.
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