8 mars : « Les douleurs de celles qui se battent pour la terre »

 | Par Carolina Bataier

Dans son nouveau livre, « Mulheres assentadas : mães de todas as lutas » (non-traduit, éditora FEMINAs), la journaliste Tamiris Volcean présente les récits de celles qui souffrent et résistent pour semer de nouvelles possibilités de vie.

par Carolina Bataier le 3 mars 2023

Traduction : Philippe ALDON pour Autres Brésils
Relecture de Du DUFFLES

En bordure de la route Comandante João Ribeiro de Barros, qui relie les villes de Bauru et Jaú à l’intérieur de l’État de São Paulo (SP), se trouve l’ assentamento [1] Horto de Aimorés. Ceux qui roulent sur l’asphalte bien entretenu ignorent facilement la réalité qui se cache derrière la barrière d’eucalyptus que l’on aperçoit le long de la route. Dans le livre-reportage Mulheres assentadas : mães de todas as lutas [2] , publié aux éditions Feminas, la journaliste et écrivaine Tamiris Volcean invite le lecteur à pénétrer dans cet espace fait de terre rouge, de soleil et de sueur.

Outre Horto de Aimorés, l’auteure a mené ses recherches dans deux autres « assentamentos » : Zumbi dos Palmares, dans la municipalité de Iaras (SP), et Boa Esperança, à João Ramalho (SP). L’immersion dans ces territoires a permis de recueillir des récits et commentaires pour ensemencer un récit sensible et inconfortable.

Les problèmes courants du quotidien des femmes sont présentés dans le livre avec une couche supplémentaire de brutalité. La violence domestique, l’abandon et les doubles ou triples journées font encore plus mal lorsqu’il n’y a pas d’eau ou de nourriture pour rafraîchir la peau et soulager l’estomac.

Dans l’un des passages, Tamiris présente le témoignage de Cleonice, une habitante du Horto de Aimorés. La routine quotidienne des soins aux enfants, la faim et le travail ardu de la terre l’ont amenée à découvrir, tardivement, une nouvelle grossesse. Quand elle a ressenti les douleurs de l’accouchement, elle était seule. Elle est arrivée à l’Hôpital public de Bauru grâce à un automobiliste qui l’avait prise en stop sur le bord de la route. Elle a subi une césarienne sans être consultée par l’équipe médicale. Cette violence obstétrique a marqué le début d’une série d’agressions. Ainsi, après avoir indiqué qu’elle résidait à l’assentamento, les professionnels n’ont plus tenu compte d’elle.

"Elle a quitté l’hôpital avec l’enfant dans ses bras et les mêmes vêtements que la veille, les points de suture de la césarienne lancinant dans son ventre et le regard perdu de quelqu’un qui se demande pourquoi sa maternité reçoit moins de soins que toutes celles qui l’entourent".

Dans un autre passage, la journaliste nous permet d’accéder à la mémoire traumatique de Cleusinha, une habitante de l’assentamento de Boa Esperança, à l’époque où elle vivait sous la bâche d’une tente et faisait partie des victimes de l’action de la police. La femme « se souvient d’avoir vu une mère pleurer devant sa toile de tente délabrée parce que le berceau qu’elle avait réussi à obtenir si difficilement pour son bébé était détruit ». Les actions violentes d’expulsion des habitants des terres improductives ne respectent pas les histoires individuelles. Elles sont incapables de voir les mains des femmes qui transforment la terre rouge en vie. Face à cette brutalité, Tamiris utilise la littérature pour affirmer que ces femmes existent, résistent et luttent.

Avec les témoignages choisis pour cet ouvrage, l’auteure sème des graines pour la récolte de nouveaux récits sur des sujets qui ajoutent à la violence du patriarcat la douleur de celles qui s’obstinent à chercher leur espace pour planter et voir germer la justice sociale.


Carolina Bataier est journaliste et écrivaine, auteure du livre de chroniques O pôr do sol dos astronautas (Editora Letramento). Elle s’intéresse aux questions liées aux droits humains et à la culture populaire et a publié ses travaux dans plusieurs médias nationaux.

Voir en ligne : As dores daquelas que lutam pela terra

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