Réseaux solidaires : autogestion et extension de la démocratie

 | Par Ariane Denault-Lauzier, Daniel Tygel

Entrevue avec le secrétaire exécutif du Forum brésilien d’économie solidaire (FBES), Daniel Tygel.

Adital : Quelle est l’importance, pour les entreprises et les organisations de l’économie solidaire, de s’organiser en réseaux ?

D.Tygel : La question du réseautage est fondamentale et l’articulation entre les acteurs de l’économie solidaire est pour nous d’une extrême importance pour l’avancée du mouvement au Brésil. Ceci implique le renforcement de notre sentiment identitaire comme mouvement, la construction d’initiatives de logistiques solidaires, de commercialisation (point de vente, centrales de commercialisation et de stockage), de consommation, etc. Ces articulations en réseaux existent au sein des différentes initiatives d’économie solidaire, quelles soient de production, de commercialisation, de soutien ou de consommateurs. Les réseaux existent aussi bien de façon sectorielle qu’au niveau des chaînes de production.

La stratégie de réseautage vise la transformation du marché, du système économique tel qu’on le connaît, et met de l’avant des mécanismes de régulation basés sur le bien être, l’assise communautaire, ayant comme intérêt le bien commun et non pas celui des grandes entreprises ou politiciens. C’est la stratégie que nous développons pour faire changer le cap de l’économie, une économie qui ne viserait plus le profit mais plutôt le mieux être et la réalisation personnelle et collective. Ce que l’on nomme la solidarité, l’autogestion et l’extension de la démocratie au plan économique dans l’organisation de la société.

Adital : Quel rôle joue le consommateur responsable dans la mouvance de l’économie solidaire ?

D.Tygel : Le rôle du consommateur responsable est très important mais il a été peu exploré jusqu’à maintenant. Il est encore difficile de concevoir les personnes, les institutions ou les groupes de consommateurs comme des éléments actifs de la construction de l’économie solidaire. Pour ce faire, il est nécessaire de travailler sous deux dimensions. La première porte sur l’éducation à la consommation responsable : ceci est fondamental, il est nécessaire de repenser la demande et d’en finir avec notre besoin de consommer à outrance et de percevoir l’accumulation comme ce qui définit notre réalité. Nous devons cultiver le « regard curieux » qui se demande « d’où provient ce produit, que porte-t-il comme histoire derrière sa production ? ». Je ne parle pas du discours moraliste mais d’une sincère prise de conscience sur le monde et la reconnaissance que chaque action implique une réaction, que l’acte de consommer n’est pas seulement une action individuelle, mais un investissement dans une forme de production qui peut être prédatrice y génératrice d’exclusion mais qui peut aussi être synonyme de construction d’une autre société !

La deuxième dimension qui doit être travaillée, au-delà de la conscientisation et de l’éducation (qui devraient être intégrées dans les établissements scolaires afin de nous préparer pour résister à la propagande qui nous inonde quotidiennement), c’est l’importance de l’organisation entre les consommateurs sous formes de projets solidaires, autant au plan individuel qu’au sein d’espaces institutionnels. Cette dimension active liée à l’organisation des consommateurs est un défi fondamental au sein du mouvement. En effet, elle permet des économies d’échelle, et, avec cette force collective d’achat, il est possible de renverser les lois du marché, de façon encore plus significative si l‘on implante les critères de commerce solidaire et équitable. Il existe des initiatives spectaculaires au pays, mais elles sont trop peu nombreuses devant nos grands défis.

Adital : Quelles sont les perspectives pour la prochaine année ? Quels sont les défis ?

D.Tygel : Premièrement, consolider (et avoir une incidence sur le Conseil National de l’Économie Solidaire) la proposition PRONADES (Programa Nacional de Desarrollo de la Economia Solidaria) et du Statut de l’Économie Solidaire (loi qui a comme principal objectif la reconnaissance par la législation brésilienne de l’économie solidaire). Ensuite, la priorité sera mise dans le renforcement des Forums Régionaux et Micro-régionaux d’économie solidaire comme espaces de construction des synergies locales afin de mettre en place un autre modèle de développement. Nous travaillerons aussi à la création et à la consolidation de réseaux importants au niveau local et national, notamment : le réseau de formateurs en économie solidaire ; le réseau d’initiatives de commercialisation et de logistique solidaire (points de vente, centrales, bases pour des services d’appui à la commercialisation) ; réseau de la finance solidaire (réseaux des coopératives, des fonds rotatifs et des banques communautaires) ; réseau des initiatives solidaires de consommation responsable ; réseaux et chaînes solidaires de production. Finalement, nous souhaitons concrétiser certaines alliances stratégiques avec les mouvements sociaux, particulièrement dans les champs de l’agroécologie, de la souveraineté alimentaire, du commerce équitable et solidaire, des femmes, du recyclage et de la réforme urbaine.


Source : http://www.adital.com.br/site/noticia.asp?cod=35656&lang=ES

Traduction : Ariane Denault-Lauzier (Chantier de l’économie sociale)


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