Les pauvres sans droit au logement

 | Par Gisele Barbieri

<img754|left> Acclamé comme une solution au manque de logements sociaux, le projet lancé par le gouvernement Lula en septembre, ne résoudra pas le problème des familles à faibles revenus. Le droit au logement, contenu dans la Constitution, n’est pas acquis pour de nombreuses familles brésiliennes.

Le 12 septembre, le gouvernement a annoncé un nouveau projet de loi sur le logement pour mettre un terme à cette situation. Ces propositions, jugées électoralistes car lancées trois semaines avant la bataille présidentielle, ne bénéficient pas aux familles dont le revenu mensuel est inférieur à cinq salaires minimums, ce qui équivaut à R$ 1.700 (617 euros).

Selon une étude de la Fondation Getúlio Vargas, basée sur des données de l’Institut Brésilien de Géographie et de Statistiques(IBGE) de 2004, 92% des familles qui vivent dans des logements dégradés reçoivent moins de cinq salaires minimums. Les personnes qui ne dépassent pas ce seuil n’ont pas accès aux prêts logement et ne seront pas prises en compte par la réforme gouvernementale.

« A São Paulo, par exemple, une habitation digne ne peut pas revenir à moins de R$ 40 000 (14 524 euros). Les personnes qui gagnent moins de cinq salaires minimums n’ont pas les moyens de payer les intérêts d’un prêt de cette valeur. Le citoyen a besoin d’une aide financière ou il n’aura pas droit au logement » affirme le président du Syndicat de l’Industrie et de la Construction Civile de São Paulo (Sinduscon), João Cláudio Robusti.

Pour ce projet, le gouvernement financera R$ 8,7 milliards de prêts (3,16 milliards d’euros) em 2006, provenant du Système Brésilien d’Épargne et de Prêt, qui ne seront pas accessibles aux familles les plus pauvres. Cette nouvelle politique prévoit également un financement pour les entreprises de construction.

Des taux d’intérêts exorbitants

Lorsque les familles à revenus modestes obtiennent un financement, elles sont ensuite confrontées à un autre problème ; le remboursement de l’emprunt. Concernant les prêts immobiliers, un taux référentiel s’ajoute au taux d’intérêt. Dans le projet du gouvernement, le remboursement deviendrait facultatif mais le taux d’intérêt reste très élevé, aux alentours de 15%.

Le taux référentiel, utilisé pour ajuster les emprunts du Système Financier du Logement, a été créé par Fernando Collor. Pendant le gouvernement de Fernando Henrique Cardoso, ce taux a même dépassé celui de l’inflation ce qui entraîna un renchérissement de l’accès au crédit. D’après l’Institut d’Orientation aux Coopératives de Logement de l’État de São Paulo (Inocoop), pour que les populations pauvres aient accès à la propriété, le taux d’intérêt devrait être compris entre 6% et 7%.

Les taux d’intérêts élevés profitent aux banques qui ont connu des bénéfices records pendant le gouvernement de Luiz Inácio Lula da Silva. Ce n’est pas un hasard si les actions du secteur banquaire ont augmenté le jour du lancement de la proposition gouvernementale - les titres des banques Itaú et Bradesco ont connu une progression de plus de 1%. Les analystes financiers estiment que ces mesures ont créé un scénario favorable à la croissance du prix du crédit immobilier à moyen et long terme.

Pour la classe moyenne

Le gouvernement va allouer cette année R$ 1 milliard (365 millions d’euros) aux entreprises de construction. Ce budget sera fourni par la Caisse Économique Fédérale. « Même en comptant sur cette possibilité de financement, il y a peu de chances pour que les entreprises acceptent d’investir dans la construction de logements sociaux, estime un des directeurs de la Inocoop de São Paulo, Richard Moreton Treacher, puisque ces familles ont souvent des revenus provenant du secteur informel, ce qui ne donne aucune garantie aux constructeurs. »

La Banque Nationale de Développement Économique et Social (BNDES) va ouvrir un crédit de R$ 100 millions pour que les entreprises acceptent de financer la construction des maisons de ses employés. Treacher considère que cette mesure ne changera pas significativement les conditions d’accès à la propriété pour les populations pauvres : « Les complexes industriels ne sont pas localisés dans les centres urbains ou dans les zones où le déficit de logements est le plus important ».

Sans incitations

Les politiques lancées pour atténuer le manque de logements semblent ne pas recevoir les mêmes investissements que celles consacrées aux entreprises du bâtiment. Les financements prévus par le Fonds National de Logement à Intérêt Social ont été revus à la baisse pour l’année 2007. Créé au travers d’un projet de loi approuvé par Lula en juin 2005, le Fonds gère le budget destiné aux politiques de logements pour les familles à faible revenu, grâce à différentes actions comme l’urbanisation des favelas.

Le budget du Système national de logement et du Fonds proviennent de subventions du Fonds de Garantie du Temps de Service (FGTS), du Fonds d’Aide au Travailleur (FAT) et du Budget de l’Union. Le Fonds a reçu en 2006, R$ 1 milliard, et n’obtiendra en 2007 que R$ 400 millions (146 millions d‘euros).


Par Gisele Barbieri - Brasil de Fato - 30/09/2006

Traduction de Livia Honsel pour Autres Brésils


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