Ce qui est en jeu avec l’approbation de la PEC 55

 | Par Carlos Drummond

Le Sénat analyse la proposition qui entrainera une limitation drastique des dépenses publiques pendant 20 ans.

Soucre : Carta Capital le 30/11/2016
Auteur : Carlos Drummond
Traduction : Marion Daugeard
Relecture : Maïa Inzaurralde Nahson

Le gel des dépenses du gouvernement dans le domaine social est au centre de la PEC. Sur la photo, une manifestation contre la PEC 55 sur l’Avenue Paulista le dimanche 27 novembre. Source : Carta Capital

L’examen par le Sénat, à partir de ce mardi 29, du Projet d’Amendement à la Constitution 55 (PEC 55), qui limite considérablement les dépenses publiques pendant deux décennies, met en jeu l’un des principaux instruments de justice sociale du pays, les dépenses dans l’éducation et la santé.
Le gel des dépenses du gouvernement dans ces domaines est au centre de la PEC, qui a été traitée et adoptée par la Chambre des députés sous le nom de PEC 241.

Les questions et réponses ci-dessous, tirées de diverses déclarations d’économistes montrent que le gouvernement va à l’encontre de l’histoire et de la tendance mondiale avec son projet d’imposer plus de sacrifices aux pauvres et d’éviter aux riches une imposition plus élevée.

Quel sera le principal effet sur la société en cas d’approbation de la PEC 55 ?
Le résultat le plus important sera une réduction significative des dépenses dans les secteurs de l’éducation et la santé, les seuls qui nécessitent un changement de Constitution. Cela entrainera des répercussions importantes sur les segments les plus pauvres de la population et la stimulation du secteur privé dans ces deux domaines.

Qu’est-ce que la Constitution dit à propos des dépenses dans le domaine de la santé et de l’éducation ?
La Constitution actuelle stipule qu’au moins 18% des Recettes Fiscales Nettes [1] du gouvernement fédéral doivent être obligatoirement dépensées dans l’éducation. Dans la santé, le minimum est de 15% des Recettes Courantes Nettes [2], un pourcentage qui doit être atteint progressivement d’ici à 2020.
L’exigence d’une application égale ou supérieure à ces pourcentages est considérée comme essentielle pour lutter contre l’inégalité profonde dans l’accès à la santé et à l’éducation dans le pays.

Qu’en sera-t-il de l’affectation des enveloppes budgétaires si la PEC est approuvée ?
Les montants investis en 2016 correspondent à 15% des Recettes Courantes Nettes dans la santé et 23% des Recettes Fiscales Nettes dans l’éducation. En 2017, les pourcentages seront respectivement de 18% et de 15%. À partir de 2018, ces deux domaines seront plafonnés sur les valeurs minimales de l’année précédente, et seront simplement réajustés sur l’inflation.
Aujourd’hui, l’augmentation des dépenses accompagne la croissance des recettes, presque toujours supérieure à l’inflation. La conclusion est que la valeur minimale destinée à l’éducation et à la santé va diminuer en proportion des recettes fiscales mais aussi par rapport au PIB, entrainant de graves dommages pour les populations à faible revenu.

Qu’en dit le gouvernement ?
Selon le gouvernement, la PEC 55 n’affecte pas la santé et l’éducation, dans la mesure où son seul objectif est de promouvoir un plus grand réalisme budgétaire. Elle ne gèle pas les dépenses réelles dans la santé et l’éducation, disent-ils, elle établit seulement que pour les augmenter, il sera nécessaire de procéder à la diminution des dépenses réelles sur d’autres postes du budget.
Mais si cela est le cas, pourquoi la proposition contient-elle un article spécifique prévoyant la réduction des actuels minimaux constitutionnels alloués à la santé et à l’éducation ? Cela, les partisans de la PEC 55 ne savent pas l’expliquer.

La PEC 55 est-elle une proposition moderne ? D’autres pays ont-ils pris des mesures similaires ?
La proposition constitue un retard pour diverses raisons. Il n’y a pas d’autre pays qui ait une règle similaire valable pendant deux décennies. Les limites de l’augmentation des dépenses sont fixes pour quelques années et sont indexées sur les variations du PIB, ce qui fait sens.
En outre, la PEC va à l’encontre de la tendance mondiale de révision des politiques d’austérité des gouvernements, identifiées comme une cause importante de la stagnation des économies depuis 2008.
Le gouvernement dit que la mesure est nécessaire en raison du manque de contrôle des dépenses primaires du gouvernement en 2014 et 2015, ce qui serait à l’origine de l’augmentation de la dette publique à cette période. Cela est faux. Sur la dernière décennie, le Brésil n’a eu de déficit primaire qu’au cours des deux dernières années.

Si les dépenses primaires ne sont pas la cause principale de l’augmentation de la dette publique, quelle en est l’explication ?
La dette publique a augmenté en raison de l’accumulation de réserves de change, de la baisse significative du taux de perception des recettes ces dernières années en raison de la récession, des exonérations fiscales et de l’augmentation des dépenses pour payer les intérêts de la dette publique. La dernière dépense a dépassé les 500 milliards de reais en 2015, soit environ 8% du PIB. Le problème n’est donc pas du côté des dépenses, mais dans les recettes.

La PEC pourrait contribuer à la croissance économique ?
La maîtrise des dépenses imposée par la PEC devrait provoquer l’arrêt ou la réduction des investissements publics dans les infrastructures, l’éducation et la santé pendant deux décennies, et cela ne contribue pas à la reprise de l’économie. Au contraire, cela peut aggraver la situation.

Quelles alternatives pourraient être adoptées ?
La principale est l’augmentation des taxes sur les riches. Dans ce domaine, le Brésil est très en retard. Depuis 2008, 21 des 34 pays de l’Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE) ont augmenté la taxation des plus riches. Les États-Unis ont augmenté les taux maximaux de l’Impôt sur le Revenu et le Chili a pris des mesures similaires en 2013 pour financer l’éducation. Le Brésil est l’un des rares endroits où l’on ne touche pas au sujet. Pour les super-riches d’ici, avec un revenu moyen de 4 millions d’euros, les deux-tiers de leurs gains, composés de bénéfices et de dividendes, sont exonérés, et un quart est investi dans le marché financier, avec des taux en moyenne situés entre 16% et 17%.

[1RLI en portugais.

[2RCL en portugais.

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