Art engagé

Les mouvements artistiques on joué un rôle important dans la formation de la pensée de la gauche brésilienne, d’où sont issus les hommes politiques qui arrivent maintenant au pouvoir comme le président Luis Inácio Lula da Silva. Surtout pendant les années 60 et 70, où la musique, le théâtre et le cinéma ont été de forts éléments d’agglutination des forces politiques contraires au régime militaire instauré dans le pays à partir de 1964. Cependant, cela n’a pas été fait sans passer par d’intenses débats internes sur les objectifs de l’art, défendu soit comme « instrument de conscientisation politique » soit comme « manifestation libre des entraves idéologiques ».

« Il est difficile de préciser qui a influenceé qui à l’époque, je crois plus sûr de dire que les influences ont été mutuelles » explique la sociologue Márcia Tosta Dias, chercheur à l’Unesp et auteur du livre Os Donos da Voz (Boitempo, 2000), qui est devenu une référence dans l’étude de l’industrie phonographique brésilienne. Dans ce livre, elle explique les principaux courants artistiques de l’époque : le Cinéma Novo, le Tropicalisme, le Centre Populaire de Culture (CPC) de l’Union Nationale des Etudiants (UNE), la Bossa Nova. L’auteur observe qu’avant le coup d’état de 1964, la production culturelle dans le pays était intense et dialoguait beaucoup avec la pensée politique et sociale. Selon Márcia Dias, c’est à partir du coup d’état que cette production est devenue plus cachée et, en 1968, avec l’AI5 (L’acte institutionnel n° 5) elle rentre dans la clandestinité.

Elle décrit le rôle de chaque mouvement de l’époque. « Le Tropicalisme arrive à cette époque, touchant différents courants : de l’indépendant jusqu’au plus commercial, et s’attaque au régime de manière plus morale que politique. La » Jeune Garde « avait une autre position, moins engagée et plus commerciale », analyse la sociologue.

Márcia Tosta cite d’autres mouvements plus indépendants « dans la lutte politique et idéologique » comme un des courant de la Bossa Nova (avec Carlos Lyra, Geraldo Vandré, Edu Lobo et Nara Leão) ; le Cinéma Novo, les théâtres d’Opinion (de Oduvaldo Vianna Filho, plus connu comme Vianninha), le théâtre d’Arena (de José Celso Martinez Côrrea) ainsi que le théâtre de l’Opprimé (de Augusto Boal). La plus grand partie de ces mouvements sont apparus dans le CPC de l’UNE.

« Il y avait des discussions chaleureuses, mais elles n’étaient pas publiques, sur le rôle de l’ avant-garde que ces mouvements représentaient, quelle que soit l’option : cultiver l’art pour l’art ou l’art engagé » affirme Márcia Tosta.

Les « volantes »

« Qui était artiste était artiste et qui était dirigeant politique était dirigeant politique, mais bien sûr, avec la ferveur tant politique que culturelle qui existait dans le pays à ce moment-là, les frontières ont été diluées », défend le député fédéral Aldo Arantes (PC do B).
Arantes était le président de l’UNE entre 1961 et 1962, époque où on essayait d’affaiblir l’influence politique des leaders cariocas [de Rio] sur l’institution et rediriger l’attention des discussions vers des sujets plus proches des étudiants de tout le pays, comme par exemple, le débat sur la réforme universitaire.

Pour cela ont été créées les caravanes appelées « UNE volontes ». C’était des commissions, composées pour la plupart d’intégrants du CPC et de quelques directeurs de l’UNE, qui ont voyagé à travers les capitales brésiliennes pour créer des centres de l’UNE et leurs respectifs CPCs. « Glauber Rocha est apparu dans le CPC de Bahia » explique le député. Aldo Arantes se souvient que les discussions internes au CPC ont continué, mais centrées sur la thématique contenu versus forme et non plus sur l’option de l’engagement, car les artistes-militants, presque tous membres du parti communiste, intégraient les caravanes.

Les bases des discussions de l’époque venaient de la lecture des auteurs étrangers, principalement liés à la tradition humaniste catholique et au matérialisme historique allemand. Il était fréquent de voir des réunions où les militants organisaient des lectures de Karl Marx, père du marxisme, Herbert Marcuse, philosophe allemand, Teillard de Chardin, philosophe catholique français, Antonio Gramsci, scientifique politique italien, José Martí, poète cubain, Jean Paul Sartre, écrivain et philosophe français, Sérgio Buarque de Holanda, historien brésilien et Florestan Fernandes, sociologue brésilien, Frei Betto, Leonardo Boff et d’autres.

Révisions

Beaucoup de discussions sur l’art engagé dans cette période sont encore aujourd’hui l’objet de révisions. Quelques artistes et intellectuels qui ont participé de ce mouvement revoient leurs opinions à ce sujet. Le poète Ferreira Gullar, ancien militant du CPC-UNE, a sorti récemment un livre sur l’art Cultura Posta em Questão - Vanguarda e Desenvolvimento, um ensaio de 1969, où il fait une mise au point avec les dénommées avant-gardes artistiques qui ont préconisé l’art engagé.

Dans le livre Eu Não Sou Cachorro, Não - Música Popular Cafona e Ditadura Militar (ed. Record), l’historien Paulo César Araújo défend l’idée que les musiciens des années 70 considérés hangar (comme Waldik Soriano, Odair José, Dom et Ravel parmi d’autres) n’étaient pas aliénés comme cela a été considéré. Au contraire, selon l’auteur, ces artistes n’étaient pas des collabos, ils ont été censurés, ont du modifier les vers de leurs chansons et ont souffert avec la dictature. Araújo met en question l’idée que la dictature a été imposée verticalement sans l’accord de beaucoup de secteurs de la société brésilienne.

Chanson de protestation

Bien qu’ayant seulement eu du succès à partir de l’instauration du régime d’exception dans le pays, la chanson de protestation a toujours été présente dans l’imaginaire des musiciens nationaux depuis le début des années 20. Avec les musiciens ironiques des morros cariocas [bidonvilles de Rio], la musique populaire brésilienne contenait une forte critique envers les coutumes, et parfois la politique. Noel Rosa est montré comme le symbole de cette époque. Quelques experts affirment que cette création lui est antérieure.
Avec le régime militaire, l’engagement des mouvements universitaires et une masse urbaine de plus en plus grande, la population reconnaît, à la fin des années 50, la chanson de protestation comme genre, avec quelques composantes de la Bossa Nova. L’apogée de ce processus se fait avec l’endurcissement du régime à partir de la fin des années 60.
Quelques chansons sont devenues célèbres dans les festivals de musique populaire brésilienne dans les années 60 et 70 comme : « Zelão » de Sérgio Ricardo ; « Arrastão », de Vinícius de Moraes et Edu Lobo ; « Pra Não Dizer Que Não Falei das Flores » et « Caminhando » de Geraldo Vandré ; « Disparada », de Geraldo Vandré et Théo de Barros ; « Apesar de Você » et « A Banda », de Chico Buarque.

Des chansons de Caetano Veloso et Gilberto Gil sont connues comme des « chansons de protestation » de cette époque. Historiens et musicologues (et, en un sens, les tropicalistes eux-mêmes) affirment qu’elles n’ont pas été composées avec l’objectif exclusif de s’attaquer au régime politique. « Panis e Circense », « Alegria Alegria » et « É Proibido Proibir » étaient des chansons de lutte esthétique contre la vision nationale-populaire en vigueur à ce moment de l’histoire.

Source : CMI Brésil - Novembre 2002

Traduction : Erika Campelo pour Autres Brésils

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